MARIAGE PAR LA FATIHA: La face cachée d'une pratique controversée
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MARIAGE PAR LA FATIHA: La face cachée d'une pratique controversée
La face cachée d'une pratique controversée
MARIAGE PAR LA FATIHA
Wahida BAHRI L'Expression : 03 - 11 - 2009
Le mariage par la Fatiha sans aucune autre forme de légalisation auprès des instances civiles officielles est depuis quelques années devenu le recours pour bon nombre de couples. Ce phénomène prend des proportions alarmantes au vu des conséquences engendrées par cette pratique souvent malheureuse, voire dramatique.
Pour sceller leur union, certains couples se contentent aujourd'hui, d'une lecture de la Fatiha en présence de deux témoins, au lieu de passer par la voie légale, en l'occurrence un acte de mariage établi par la mairie officialisant ainsi leur union. Si, par le passé, cette pratique, conforme aux préceptes de l'Islam, était acceptée, mais surtout assumée par la société, ce n'est pas le cas aujourd'hui. Autres temps, autres moeurs, les risques qu'engendre cette pratique sont devenus de plus en plus réels. La société connaît de grandes mutations tant sur le plan socioéconomique que sur le plan des mentalités. Ces dernières, de nos jours, il faut bien en convenir, malsaines dans beaucoup de situations, rendent ainsi nécessaire la transcription obligatoire auprès des instances officielles, stipulent les textes de loi, notamment le Code de la famille, qui explique que le mariage est un acte de consentement mutuel pour fonder un foyer. Il est régi par les articles 4 et 18 stipulant la nécessité de sceller cette union entre deux êtres majeurs et consentants devant un notaire ou un officier de l'état civil. Malheureusement, cette disposition n'a pas empêché les couples de recourir au mariage par la seule et unique Fatiha en se limitant à la présence d'un imam et de deux témoins, parfois eux-mêmes invités à cette liaison sans aucun écrit, si la chose est conclue entre les deux couples sans la présence de leurs parents. Mais dans le cas où ces derniers sont mis dans la confidence, il y a lieu de constater la présence d'un taleb pour la lecture de la Fatiha selon les préceptes de la religion musulmane rendant ainsi la relation des deux êtres licite, un dîner comme offrande «laâcha taâ lahlal», sera suivi de youyous pour annoncer l'union.
Le phénomène du mariage par la Fatiha, très en vogue dans notre société ne préserve pas les droits de la femme, encore moins ceux des enfants, il est assimilable à un vulgaire concubinage. Et d'expliquer tout simplement: «Un homme qui s'unit à une femme par la Fatiha peut se séparer d'elle, dans le meilleur des cas grâce à la même Fatiha, avec la tranquille conviction de ne rien risquer. Pis encore, il peut facilement partir et s'éclipser et laisser son épouse livrée à elle-même, car il faut le noter, le taleb qui a scellé cette union n'a ni les moyens ni les attributions légales pour veiller à sa pérennité. Cette situation rend la tâche de la femme plus ardue pour faire reconnaître ce mariage.» Des statistiques, recueillies auprès des instances en charge des affaires relatives à la légalisation de mariages par la Fatiha, annoncent un record: rien que pour les années 2007 et 2008 quelque 237 affaires pour la première et 412 pour la seconde, dont 50% ont été tranchées par la présence de témoins et les talebs qui ont scellé ces unions, pendant que les autres affaires sont toujours en cours. Le mariage est prouvé par un extrait des registres de l'état civil. S'il n'est pas transcrit, il peut être prouvé par une ordonnance du parquet, comme il est stipulé par l'article 22 du Code de la famille. Les services de l'état civil de la mairie de Annaba, qui accueillent chaque semaine des centaines de victimes dans ces cas, enregistrent quelque 100 à 120 demandes de reconnaissance de mariage, pendant que les tribunaux relevant de la circonscription de la cour de Annaba continuent d'enrôler les affaires liées à la reconnaissance de mariage par la Fatiha et à la reconnaissance de la paternité, notamment au niveau du tribunal d'El Hadjar avec un taux de quelque 7%.
Rencontrées dans les couloirs des tribunaux de Annaba, quelques femmes victimes du mariage par la Fatiha se disent à l'unanimité, soucieuses pour l'avenir de leurs enfants, qui sont en âge d'être scolarisés, mais ne peuvent accéder aux bancs de l'école, faute d'un nom paternel. Djouhra, cette jeune maman à la fleur de l'âge, traîne derrière elle une fillette de 5 ans, Aya, au visage angélique, attend tout comme sa mère à ce que la justice l'aide à porter le nom de son papa qu'elle n'a jamais connu. «Elle avait 15 mois lorsque son père est parti sans jamais chercher à la voir», nous dira Djouhra en expliquant les circonstances de son mariage par la Fatiha: «J'avais 27 ans lorsque le père de ma fille est venu demander ma main à mon père, lui expliquant que je serais la deuxième femme car il avait une première.» 11 ans d'écart entre Djouhra et son mari qui a prétendu que sa première femme était gravement malade et qu'elle était condamnée médicalement. «Il disait que notre mariage par la Fatiha n'est qu'une affaire de temps, car il ne voulait pas blesser sa femme pour le peu de temps qui lui restait à vivre. Mon père a accepté, à condition qu'un acte soit établi par un notaire, et devra rester en instance jusqu'à ce qu'il soit enregistré au niveau de l'état civil au moment voulu.» Malheureusement, ni la Fatiha ni l'acte de mariage établi par le notaire, encore moins, la naissance de la petite Aya n'ont pu retenir le faux mari, qui, après avoir vécu avec Djouhra 15 mois, a fini par quitter le domicile conjugal qui était en location, sans le moindre mot ni trace. Aujourd'hui, Aya a 5 ans et doit être inscrite en cours préparatoire, mais il se trouve que la petite ne porte ni le nom de son père ni celui de sa mère. C'est là un cas parmi tant d'autres, tous similaires dans la pratique, mais pas dans les circonstances. Leur point commun est celui de faire reconnaître leur union auprès des tribunaux, soit par la faute de l'entêtement du mari soit à cause du parjure des témoins. Même si certaines raisons sociales, religieuses, psychologiques ou matérielles empêchent les nouveaux mariés d'officialiser leur union auprès des instances publiques, l'apparition aujourd'hui de maladies comme le sida «impose la sensibilisation des candidats au mariage sur la nécessité de se rapprocher des services de l'état civil. Ces derniers exigent pour l'établissement d'un acte de mariage un certificat médical de moins de 3 mois pour prouver l'absence de facteur organique ou physique pouvant rendre incompatible l'union des deux candidats au mariage», explique un avocat. Quant aux raisons qui poussent les femmes mariées par la Fatiha à recourir à la justice, c'est la naissance des enfants, ou pour régler une affaire de succession ou d'héritage, explique maître N.CH. avocate agréée à la Cour suprême tout en insistant sur l'officialisation du mariage pour préserver les droits de la femme et des enfants en cas de divorce ou de décès de l'époux.
Du côté masculin, les hommes ayant contracté un mariage par la Fatiha sont de plus en plus nombreux à refuser de reconnaître leurs enfants, encore moins leur union, estimant que les femmes sont responsables de leur situation, en acceptant dans un premier temps de se marier par la Fatiha, et de ne pas enfanter. Une fois le mariage consommé, elles obligent l'homme à reconnaître l'union et l'enfant; ce qui pousse ce dernier à partir. C'est pourquoi le nombre d'hommes à procéder à la reconnaissance de ce genre d'union est très réduit par rapport au nombre de femmes. C'est là des points de vue de différents hommes interrogés sur la pratique du mariage par la Fatiha, qui, malgré beaucoup d'efforts, est toujours appliquée. En dépit des mesures rigoureuses prises par le ministère des Affaires religieuses et des Wakfs, portant sur l'interdiction de la prononciation de la Fatiha, avant d'avoir officialisé l'union par un acte de mariage établi par les services de la mairie, puis présenté par les deux époux lors de la cérémonie de la Fatiha, malheureusement, cette disposition n'a pas eu l'effet escompté sur la pratique. Et par conséquence, le phénomène, non seulement persiste, mais prend de plus en plus d'ampleur dans la wilaya de Annaba où les cérémonies de la Fatiha sont organisées dans un cadre strictement familial au domicile de la mariée.
En effet, nul ne peut contrôler tous les lieux où est pratiquée la Fatiha, et la direction des affaires religieuses n'a pas encore reçu de plainte faisant état d'un imam qui a prononcé la Fatiha sans avoir eu à vérifier l'acte de mariage établi, au préalable, par la mairie. Par ailleurs, il s'avère que la présence d'un imam dans une cérémonie de mariage par la Fatiha, organisée dans un cadre très privé, n'est pas une exigence religieuse, dans un contexte où nombre de citoyens croient, à tort bien sûr, quiconque maîtrisant quelques versets coraniques est habilité à prononcer la Fatiha pour les candidats au mariage, mais aussi pour les femmes répudiées et renvoyées avec bagages et enfants, devenues des victimes emblématiques de cette pratique, qui se sont vu regagner le domicile conjugal après qu'un tel ait fait la lecture de la Fatiha et remarié les deux époux..., sachant pertinemment que la religion est très stricte en ce qui concerne les femmes répudiées notamment. Mais puisque la Fatiha est sujette aux subterfuges, elle est aussi un stratagème pour rendre licites certains péchés, Très en vogue depuis quelques années, le concubinage est une pratique qui permet à un couple de vivre ensemble sans être lié par les liens du mariage. «Mouachara rair charia», dira un imam approché pour en savoir plus sur la chose. L'homme de religion explique le phénomène du concubinage comme étant l'un des plus grands péchés réprouvés par Dieu dans son livre sacré: «Toute personne qui prétend au mariage doit se soumettre aux conditions édictées par le Coran. Ces mêmes conditions sont rapportées par le Code de la famille». Il citera, entre autres, la demande el khotba, la dot, les témoins et l'officialisation de l'union par les services de l'état civil. «En l'absence de ces éléments, la relation est considérée nulle et non avenue et entre dans le cadre des plus grands péchés», a expliqué l'imam en ajoutant: «Ainsi la religion musulmane considère les relations entre femmes et hommes désirant fonder un foyer comme étant des plus nobles. Hors cette optique, il n'y a pas lieu de parler de hallal et les versets coraniques sont très clairs sur ce sujet.» Mais en dépit des interdictions apportées par le Livre Sacré et imposées par les traditions arabo-musulmanes, les couples ont bravé toutes interdictions en prétendant au mariage par la Fatiha, qui selon certains, est lue par quelqu'un qui n'est pas habilité à le faire, et pourrait être lui-même témoin de cet acte établi verbalement entre le couple désireux de vivre ensemble sans être déclaré à l'état civil, ce qui lui permettra de retrouver sa liberté à tout moment.
En effet, aujourd'hui beaucoup de couples vivant en concubinage se disent dans une situation légale par le biais de la Fatiha. Mais est-ce que cette situation est légale et vis-à-vis de qui? En toute vraisemblance, ce n'est pas vis-à-vis de la religion, puisque conclusion faite, les quelques couples vivant en concubinage font allusion plutôt à la société, estimant que chacun est libre de vivre comme il veut et personne n'a un droit de regard sur l'autre. N.D., étudiante en médecine, vit depuis 3 ans avec son concubin T.F., cadre dans une administration à Annaba, révèle: «Nous avons fait appel à un ami, il nous a lu la Fatiha pour éviter que les voisins de l'immeuble ne nous agacent, puisqu'on ne vit pas toujours ensemble, ainsi nous avons quelqu'un pour témoigner de notre relation et donc on n'est pas dans le péché». Apostrophé sur l'habilité de l'homme qui a scellé cette union, il s'avère être une connaissance de son compagnon. En tout cas, le concubinage demeure cette relation extra-conjugale passible de peine de prison et condamnée par la religion qui la considère comme adultère.
Le mariage établi par la Fatiha demeure une pratique difficile à contenir pour prouver une union, même si elle est établie selon les rites et pratiques de la religion. Conséquence pour l'un comme pour l'autre, le parcours du combattant pour faire valoir les droits aussi bien ceux de la femme que ceux des enfants.
MARIAGE PAR LA FATIHA
Wahida BAHRI L'Expression : 03 - 11 - 2009
Le mariage par la Fatiha sans aucune autre forme de légalisation auprès des instances civiles officielles est depuis quelques années devenu le recours pour bon nombre de couples. Ce phénomène prend des proportions alarmantes au vu des conséquences engendrées par cette pratique souvent malheureuse, voire dramatique.
Pour sceller leur union, certains couples se contentent aujourd'hui, d'une lecture de la Fatiha en présence de deux témoins, au lieu de passer par la voie légale, en l'occurrence un acte de mariage établi par la mairie officialisant ainsi leur union. Si, par le passé, cette pratique, conforme aux préceptes de l'Islam, était acceptée, mais surtout assumée par la société, ce n'est pas le cas aujourd'hui. Autres temps, autres moeurs, les risques qu'engendre cette pratique sont devenus de plus en plus réels. La société connaît de grandes mutations tant sur le plan socioéconomique que sur le plan des mentalités. Ces dernières, de nos jours, il faut bien en convenir, malsaines dans beaucoup de situations, rendent ainsi nécessaire la transcription obligatoire auprès des instances officielles, stipulent les textes de loi, notamment le Code de la famille, qui explique que le mariage est un acte de consentement mutuel pour fonder un foyer. Il est régi par les articles 4 et 18 stipulant la nécessité de sceller cette union entre deux êtres majeurs et consentants devant un notaire ou un officier de l'état civil. Malheureusement, cette disposition n'a pas empêché les couples de recourir au mariage par la seule et unique Fatiha en se limitant à la présence d'un imam et de deux témoins, parfois eux-mêmes invités à cette liaison sans aucun écrit, si la chose est conclue entre les deux couples sans la présence de leurs parents. Mais dans le cas où ces derniers sont mis dans la confidence, il y a lieu de constater la présence d'un taleb pour la lecture de la Fatiha selon les préceptes de la religion musulmane rendant ainsi la relation des deux êtres licite, un dîner comme offrande «laâcha taâ lahlal», sera suivi de youyous pour annoncer l'union.
Le phénomène du mariage par la Fatiha, très en vogue dans notre société ne préserve pas les droits de la femme, encore moins ceux des enfants, il est assimilable à un vulgaire concubinage. Et d'expliquer tout simplement: «Un homme qui s'unit à une femme par la Fatiha peut se séparer d'elle, dans le meilleur des cas grâce à la même Fatiha, avec la tranquille conviction de ne rien risquer. Pis encore, il peut facilement partir et s'éclipser et laisser son épouse livrée à elle-même, car il faut le noter, le taleb qui a scellé cette union n'a ni les moyens ni les attributions légales pour veiller à sa pérennité. Cette situation rend la tâche de la femme plus ardue pour faire reconnaître ce mariage.» Des statistiques, recueillies auprès des instances en charge des affaires relatives à la légalisation de mariages par la Fatiha, annoncent un record: rien que pour les années 2007 et 2008 quelque 237 affaires pour la première et 412 pour la seconde, dont 50% ont été tranchées par la présence de témoins et les talebs qui ont scellé ces unions, pendant que les autres affaires sont toujours en cours. Le mariage est prouvé par un extrait des registres de l'état civil. S'il n'est pas transcrit, il peut être prouvé par une ordonnance du parquet, comme il est stipulé par l'article 22 du Code de la famille. Les services de l'état civil de la mairie de Annaba, qui accueillent chaque semaine des centaines de victimes dans ces cas, enregistrent quelque 100 à 120 demandes de reconnaissance de mariage, pendant que les tribunaux relevant de la circonscription de la cour de Annaba continuent d'enrôler les affaires liées à la reconnaissance de mariage par la Fatiha et à la reconnaissance de la paternité, notamment au niveau du tribunal d'El Hadjar avec un taux de quelque 7%.
Rencontrées dans les couloirs des tribunaux de Annaba, quelques femmes victimes du mariage par la Fatiha se disent à l'unanimité, soucieuses pour l'avenir de leurs enfants, qui sont en âge d'être scolarisés, mais ne peuvent accéder aux bancs de l'école, faute d'un nom paternel. Djouhra, cette jeune maman à la fleur de l'âge, traîne derrière elle une fillette de 5 ans, Aya, au visage angélique, attend tout comme sa mère à ce que la justice l'aide à porter le nom de son papa qu'elle n'a jamais connu. «Elle avait 15 mois lorsque son père est parti sans jamais chercher à la voir», nous dira Djouhra en expliquant les circonstances de son mariage par la Fatiha: «J'avais 27 ans lorsque le père de ma fille est venu demander ma main à mon père, lui expliquant que je serais la deuxième femme car il avait une première.» 11 ans d'écart entre Djouhra et son mari qui a prétendu que sa première femme était gravement malade et qu'elle était condamnée médicalement. «Il disait que notre mariage par la Fatiha n'est qu'une affaire de temps, car il ne voulait pas blesser sa femme pour le peu de temps qui lui restait à vivre. Mon père a accepté, à condition qu'un acte soit établi par un notaire, et devra rester en instance jusqu'à ce qu'il soit enregistré au niveau de l'état civil au moment voulu.» Malheureusement, ni la Fatiha ni l'acte de mariage établi par le notaire, encore moins, la naissance de la petite Aya n'ont pu retenir le faux mari, qui, après avoir vécu avec Djouhra 15 mois, a fini par quitter le domicile conjugal qui était en location, sans le moindre mot ni trace. Aujourd'hui, Aya a 5 ans et doit être inscrite en cours préparatoire, mais il se trouve que la petite ne porte ni le nom de son père ni celui de sa mère. C'est là un cas parmi tant d'autres, tous similaires dans la pratique, mais pas dans les circonstances. Leur point commun est celui de faire reconnaître leur union auprès des tribunaux, soit par la faute de l'entêtement du mari soit à cause du parjure des témoins. Même si certaines raisons sociales, religieuses, psychologiques ou matérielles empêchent les nouveaux mariés d'officialiser leur union auprès des instances publiques, l'apparition aujourd'hui de maladies comme le sida «impose la sensibilisation des candidats au mariage sur la nécessité de se rapprocher des services de l'état civil. Ces derniers exigent pour l'établissement d'un acte de mariage un certificat médical de moins de 3 mois pour prouver l'absence de facteur organique ou physique pouvant rendre incompatible l'union des deux candidats au mariage», explique un avocat. Quant aux raisons qui poussent les femmes mariées par la Fatiha à recourir à la justice, c'est la naissance des enfants, ou pour régler une affaire de succession ou d'héritage, explique maître N.CH. avocate agréée à la Cour suprême tout en insistant sur l'officialisation du mariage pour préserver les droits de la femme et des enfants en cas de divorce ou de décès de l'époux.
Du côté masculin, les hommes ayant contracté un mariage par la Fatiha sont de plus en plus nombreux à refuser de reconnaître leurs enfants, encore moins leur union, estimant que les femmes sont responsables de leur situation, en acceptant dans un premier temps de se marier par la Fatiha, et de ne pas enfanter. Une fois le mariage consommé, elles obligent l'homme à reconnaître l'union et l'enfant; ce qui pousse ce dernier à partir. C'est pourquoi le nombre d'hommes à procéder à la reconnaissance de ce genre d'union est très réduit par rapport au nombre de femmes. C'est là des points de vue de différents hommes interrogés sur la pratique du mariage par la Fatiha, qui, malgré beaucoup d'efforts, est toujours appliquée. En dépit des mesures rigoureuses prises par le ministère des Affaires religieuses et des Wakfs, portant sur l'interdiction de la prononciation de la Fatiha, avant d'avoir officialisé l'union par un acte de mariage établi par les services de la mairie, puis présenté par les deux époux lors de la cérémonie de la Fatiha, malheureusement, cette disposition n'a pas eu l'effet escompté sur la pratique. Et par conséquence, le phénomène, non seulement persiste, mais prend de plus en plus d'ampleur dans la wilaya de Annaba où les cérémonies de la Fatiha sont organisées dans un cadre strictement familial au domicile de la mariée.
En effet, nul ne peut contrôler tous les lieux où est pratiquée la Fatiha, et la direction des affaires religieuses n'a pas encore reçu de plainte faisant état d'un imam qui a prononcé la Fatiha sans avoir eu à vérifier l'acte de mariage établi, au préalable, par la mairie. Par ailleurs, il s'avère que la présence d'un imam dans une cérémonie de mariage par la Fatiha, organisée dans un cadre très privé, n'est pas une exigence religieuse, dans un contexte où nombre de citoyens croient, à tort bien sûr, quiconque maîtrisant quelques versets coraniques est habilité à prononcer la Fatiha pour les candidats au mariage, mais aussi pour les femmes répudiées et renvoyées avec bagages et enfants, devenues des victimes emblématiques de cette pratique, qui se sont vu regagner le domicile conjugal après qu'un tel ait fait la lecture de la Fatiha et remarié les deux époux..., sachant pertinemment que la religion est très stricte en ce qui concerne les femmes répudiées notamment. Mais puisque la Fatiha est sujette aux subterfuges, elle est aussi un stratagème pour rendre licites certains péchés, Très en vogue depuis quelques années, le concubinage est une pratique qui permet à un couple de vivre ensemble sans être lié par les liens du mariage. «Mouachara rair charia», dira un imam approché pour en savoir plus sur la chose. L'homme de religion explique le phénomène du concubinage comme étant l'un des plus grands péchés réprouvés par Dieu dans son livre sacré: «Toute personne qui prétend au mariage doit se soumettre aux conditions édictées par le Coran. Ces mêmes conditions sont rapportées par le Code de la famille». Il citera, entre autres, la demande el khotba, la dot, les témoins et l'officialisation de l'union par les services de l'état civil. «En l'absence de ces éléments, la relation est considérée nulle et non avenue et entre dans le cadre des plus grands péchés», a expliqué l'imam en ajoutant: «Ainsi la religion musulmane considère les relations entre femmes et hommes désirant fonder un foyer comme étant des plus nobles. Hors cette optique, il n'y a pas lieu de parler de hallal et les versets coraniques sont très clairs sur ce sujet.» Mais en dépit des interdictions apportées par le Livre Sacré et imposées par les traditions arabo-musulmanes, les couples ont bravé toutes interdictions en prétendant au mariage par la Fatiha, qui selon certains, est lue par quelqu'un qui n'est pas habilité à le faire, et pourrait être lui-même témoin de cet acte établi verbalement entre le couple désireux de vivre ensemble sans être déclaré à l'état civil, ce qui lui permettra de retrouver sa liberté à tout moment.
En effet, aujourd'hui beaucoup de couples vivant en concubinage se disent dans une situation légale par le biais de la Fatiha. Mais est-ce que cette situation est légale et vis-à-vis de qui? En toute vraisemblance, ce n'est pas vis-à-vis de la religion, puisque conclusion faite, les quelques couples vivant en concubinage font allusion plutôt à la société, estimant que chacun est libre de vivre comme il veut et personne n'a un droit de regard sur l'autre. N.D., étudiante en médecine, vit depuis 3 ans avec son concubin T.F., cadre dans une administration à Annaba, révèle: «Nous avons fait appel à un ami, il nous a lu la Fatiha pour éviter que les voisins de l'immeuble ne nous agacent, puisqu'on ne vit pas toujours ensemble, ainsi nous avons quelqu'un pour témoigner de notre relation et donc on n'est pas dans le péché». Apostrophé sur l'habilité de l'homme qui a scellé cette union, il s'avère être une connaissance de son compagnon. En tout cas, le concubinage demeure cette relation extra-conjugale passible de peine de prison et condamnée par la religion qui la considère comme adultère.
Le mariage établi par la Fatiha demeure une pratique difficile à contenir pour prouver une union, même si elle est établie selon les rites et pratiques de la religion. Conséquence pour l'un comme pour l'autre, le parcours du combattant pour faire valoir les droits aussi bien ceux de la femme que ceux des enfants.
fatima- Nombre de messages : 1074
Date d'inscription : 28/02/2009
Re: MARIAGE PAR LA FATIHA: La face cachée d'une pratique controversée
Le mariage par la fatiha ou la face cachée d'une pratique controversée
Oran
N C Le Maghreb : 07 - 08 - 2008
Le phénomène du mariage par la seule "fatiha", sans autre forme de légalisation de l'union auprès des administrations civiles officielles, a pris de l'ampleur ces dernières années à Oran, comme sans doute partout ailleurs dans le pays, avec les conséquences pas toujours heureuses que l'on devine. Pour sceller leur union, certains candidats au mariage se contentent aujourd'hui, en effet, d'une lecture de la fatiha par un taleb en présence de quelques témoins, au lieu de s'adresser aussi aux institutions de l'Etat pour officialiser leur mariage. Si par le passé, cette pratique - conforme aux préceptes de l'Islam - était assumée et acceptée par l'ensemble de la société, aujourd'hui les temps ont changé et les risques bien plus réels."La société connaît de grandes mutations aussi bien sur les plans économique et social que sur celui des mentalités, devenues par les temps qui courent, il faut bien en convenir, malsaines dans beaucoup de situations, rendant ainsi nécessaire la transcription du mariage auprès des institutions officielles", résume une avocate installée à Oran. Le mariage, un acte de consentement mutuel pour fonder un foyer basé sur l'amour et le respect, est régi par les articles 4 et 18 du code de la famille qui stipulent la nécessité de sceller cette union sacrée entre deux êtres majeurs et consentants devant un notaire ou un officier de l'état civil. Cette disposition légale n'a pas empêché beaucoup de jeunes oranais de se limiter au minimum requis: un couscous comme "offrande" aux invités-témoins du mariage, des youyous pour annoncer l'union et la fatiha lue par le taleb pour la rendre licite conformément aux préceptes de l'Islam.
Difficile officialisation d'une union sacrée
En guise de mise en garde contre les risques encourus, la présidente d'une association féminine d'Oran ne mâche pas ses mots: "Cette pratique en vogue ne préserve par les droits de la femme. Elle est assimilable à un vulgaire concubinage!". Et d'expliquer simplement : "Un homme qui s'unit à une femme par la fatiha peut se séparer d'elle, dans le meilleur des cas grâce à la même fatiha, avec la tranquille conviction de ne rien risquer. Pire, il peut facilement s'en aller et laisser son épouse livrée à son sort car le taleb qui a scellé cette union n'a ni les moyens ni les attributions légales pour veiller à sa pérennité. En plus, cela rend la tâche de la femme à faire reconnaître ce mariage très ardue". Des statistiques recueillies auprès du tribunal d'Oran révèlent d'ailleurs que le nombre d'affaires liées à la légalisation de mariages par la fatiha a atteint au cours du 1er semestre de l'année en cours, 451 affaires (tranchées) sur les 2.339 affaires liées à la famille traitées durant la même période. Le mariage est prouvé par un extrait des registres de l'état civil. S'il n'est pas transcrit, il peut être prouvé par une ordonnance du parquet conformément à l'article 22 du code de la famille. Le service de l'état civil de la commune d'Oran, qui accueille chaque semaine des dizaines de victimes dans ce cas, a enregistré près de 200 demandes de reconnaissance de mariage au cours du premier semestre 2008, tandis que les tribunaux relevant de la cour d'Oran continuent d'enrôler des affaires liées à la reconnaissance de mariages par la fatiha. Une femme rencontrée dans un tribunal affirmera qu'après une dizaine d'années de mariage (par la fatiha), elle et son mari ont décidé d'un commun accord de légaliser leur union en recourant à la justice. Plusieurs autres femmes dans son cas peinent, par contre, à faire reconnaître leur union par la faute de l'entêtement du mari ou à cause du parjure de témoins. Même si certaines raisons sociales, religieuses, psychologiques ou matérielles empêchent des nouveaux mariés d'officialiser leur union auprès des institutions publiques, l'apparition aujourd'hui de maladies comme le sida "impose la sensibilisation des candidats au mariage sur la nécessité de se rapprocher des services de l'état civil", note un avocat. Ces derniers "exigent, pour l'établissement de l'acte de mariage, un certificat médical daté de moins de trois mois prouvant la bonne santé des époux et l'absence de tout facteur organique ou physiologique pouvant rendre incompatible l'union projetée", fait savoir un gynécologue d'Oran. "Les réticences de certains époux à transcrire leur union auprès des institutions concernées s'expliquent aussi par la crainte des longues procédures administratives", estime M. Medjahedi Mustapha, un chercheur en anthropologie sociale et culturelle. Les affaires liées à la reconnaissance des mariages contractés par la fatiha sont traitées dans un délai n'excédant pas les trois mois, assure pourtant le président du tribunal d'Oran. "Parmi les raisons qui poussent de nombreux couples unis par la fatiha à entamer une procédure de reconnaissance de mariage figurent la naissance d'enfants de cette union ou pour régler une affaire de succession ou d'héritage", relève ce magistrat qui insistera sur l'officialisation du mariage pour préserver les droits de l'épouse en cas de divorce ou de décès du conjoint. Un chercheur du Centre algérien de recherche en anthropologie sociale et culturelle (CRACS) d'Oran, M. Lahcen Redouane, pense, lui, que les chiffres disponibles sur le refus de certains hommes d'officialiser leur mariage sont en deçà de la réalité. "Il existe, soutient-il, des centaines et des centaines d'hommes ayant contracté un mariage par la fatiha et qui refusent toujours de le faire enregistrer auprès des juridictions concernées, et cela pour plusieurs raisons comme le refus pur et simple de reconnaître la réalité de cette union, ou encore le refus d'assumer la paternité des enfants nés de ce mariage pour fuir le versement de la pension alimentaire à la mère en cas de divorce".
L'administration s'implique, le phénomène persiste
Malgré une instruction du ministère des Affaires religieuses faisant obligation aux imams de ne prononcer la fatiha que pour les unions déjà officialisées par un acte administratif dûment établi et présenté par les deux époux lors de la cérémonie, le phénomène persiste, constate un juriste. Le Directeur des affaires religieuses de la wilaya d'Oran est clair à ce sujet: "La fatiha n'est prononcée dans les mosquées de la wilaya que pour les unions scellées auprès d'un notaire ou d'un officier de l'état civil, et tout imam transgressant l'instruction ministérielle s'expose à des sanctions administratives", avertit-il. Mais il reste que beaucoup de cérémonies de fatiha sont encore organisées dans un cadre strictement familial, au domicile d'un des époux. "Nous ne pouvons pas contrôler tous les lieux où est pratiqué ce rite et la direction des affaires religieuses n'a pas encore reçu, à ce jour, une plainte de tel ou tel citoyen contre un imam qui aurait enfreint l'instruction", note la même source. Le directeur des affaires religieuses relève que le contrôle s'avère d'autant plus difficile que la présence d'un l'imam dans une cérémonie de mariage par la fatiha, organisée dans un cadre privé, n'est pas une exigence religieuse, dans un contexte où nombre de citoyens croient -à tort- que quiconque apprend quelques versets de Coran est habilité à lire la fatiha.
Femmes victimes: des cas parlants
Les témoignages recueillis auprès de certaines femmes révèlent des cas d'épouses répudiées et renvoyées avec bagages et enfants, devenant des victimes emblématiques de cette pratique. Plusieurs ont avoué s'être liées au premier homme, même plus âgé qu'elles de plusieurs années, marié ou ayant des enfants. L'essentiel pour elles, était de trouver un compagnon et un toit pour pouvoir enfin fonder une famille. Autre exemple, autre anomalie: nombre de jeunes filles n'ayant pas atteint encore l'âge légal du mariage (19 ans) ont préféré convoler en noces par la seule fatiha, notamment celles, intéressées, dont le soupirant jouit d'une situation sociale confortable ou réside à l'étranger. Outre ces cas, on relève aussi que certaines veuves percevant des pensions après le décès de leur époux recourent à cette pratique de mariage par la fatiha par crainte de perdre le bénéfice de cette indemnité, ou encore d'autres qui acceptent ce type d'union pour découvrir plus tard qu'elles étaient liées à un polygame invétéré, qui use de ce stratagème pour ne pas avoir à solliciter le consentement de la première ou de la seconde épouse comme le mentionne le code de la famille. Un sondage sur le mariage par la fatiha réalisé, en 2005, par l'association "Femmes revendiquant leurs droits" (FARD), qui active à Oran, indique que parmi 100 femmes sondées, 20% ont été victimes de cette pratique s'étant retrouvées liées à un polygame. Les conditions économiques et sociales, le coût excessif des dots et la crise de logement ont conduit au recul de l'âge du mariage mais seraient aussi responsables de l'augmentation du taux des unions par la fatiha aussi bien dans les villes que les zones rurales d' Oran. "Beaucoup y voient aussi un moyen accepté par la société et la religion pour réparer des situations sociales parfois incommodantes", souligne M. Medjahedi. Si le mariage par la fatiha qui remplit toutes les conditions édictées par la religion, est assumé par la société, "certains n'y voient qu'un moyen pour cacher un concubinage, ou une sorte de "zawadj el moutaâ", aux effets désastreux pour la stabilité de la famille", explique une sociologue qui ne manque pas de dire et redire qu'une femme liée par cette forme d'union est soumise au diktat de son compagnon et "ne pourra que se soumettre à ses lubies et désirs quels qu'ils soient".
Oran
N C Le Maghreb : 07 - 08 - 2008
Le phénomène du mariage par la seule "fatiha", sans autre forme de légalisation de l'union auprès des administrations civiles officielles, a pris de l'ampleur ces dernières années à Oran, comme sans doute partout ailleurs dans le pays, avec les conséquences pas toujours heureuses que l'on devine. Pour sceller leur union, certains candidats au mariage se contentent aujourd'hui, en effet, d'une lecture de la fatiha par un taleb en présence de quelques témoins, au lieu de s'adresser aussi aux institutions de l'Etat pour officialiser leur mariage. Si par le passé, cette pratique - conforme aux préceptes de l'Islam - était assumée et acceptée par l'ensemble de la société, aujourd'hui les temps ont changé et les risques bien plus réels."La société connaît de grandes mutations aussi bien sur les plans économique et social que sur celui des mentalités, devenues par les temps qui courent, il faut bien en convenir, malsaines dans beaucoup de situations, rendant ainsi nécessaire la transcription du mariage auprès des institutions officielles", résume une avocate installée à Oran. Le mariage, un acte de consentement mutuel pour fonder un foyer basé sur l'amour et le respect, est régi par les articles 4 et 18 du code de la famille qui stipulent la nécessité de sceller cette union sacrée entre deux êtres majeurs et consentants devant un notaire ou un officier de l'état civil. Cette disposition légale n'a pas empêché beaucoup de jeunes oranais de se limiter au minimum requis: un couscous comme "offrande" aux invités-témoins du mariage, des youyous pour annoncer l'union et la fatiha lue par le taleb pour la rendre licite conformément aux préceptes de l'Islam.
Difficile officialisation d'une union sacrée
En guise de mise en garde contre les risques encourus, la présidente d'une association féminine d'Oran ne mâche pas ses mots: "Cette pratique en vogue ne préserve par les droits de la femme. Elle est assimilable à un vulgaire concubinage!". Et d'expliquer simplement : "Un homme qui s'unit à une femme par la fatiha peut se séparer d'elle, dans le meilleur des cas grâce à la même fatiha, avec la tranquille conviction de ne rien risquer. Pire, il peut facilement s'en aller et laisser son épouse livrée à son sort car le taleb qui a scellé cette union n'a ni les moyens ni les attributions légales pour veiller à sa pérennité. En plus, cela rend la tâche de la femme à faire reconnaître ce mariage très ardue". Des statistiques recueillies auprès du tribunal d'Oran révèlent d'ailleurs que le nombre d'affaires liées à la légalisation de mariages par la fatiha a atteint au cours du 1er semestre de l'année en cours, 451 affaires (tranchées) sur les 2.339 affaires liées à la famille traitées durant la même période. Le mariage est prouvé par un extrait des registres de l'état civil. S'il n'est pas transcrit, il peut être prouvé par une ordonnance du parquet conformément à l'article 22 du code de la famille. Le service de l'état civil de la commune d'Oran, qui accueille chaque semaine des dizaines de victimes dans ce cas, a enregistré près de 200 demandes de reconnaissance de mariage au cours du premier semestre 2008, tandis que les tribunaux relevant de la cour d'Oran continuent d'enrôler des affaires liées à la reconnaissance de mariages par la fatiha. Une femme rencontrée dans un tribunal affirmera qu'après une dizaine d'années de mariage (par la fatiha), elle et son mari ont décidé d'un commun accord de légaliser leur union en recourant à la justice. Plusieurs autres femmes dans son cas peinent, par contre, à faire reconnaître leur union par la faute de l'entêtement du mari ou à cause du parjure de témoins. Même si certaines raisons sociales, religieuses, psychologiques ou matérielles empêchent des nouveaux mariés d'officialiser leur union auprès des institutions publiques, l'apparition aujourd'hui de maladies comme le sida "impose la sensibilisation des candidats au mariage sur la nécessité de se rapprocher des services de l'état civil", note un avocat. Ces derniers "exigent, pour l'établissement de l'acte de mariage, un certificat médical daté de moins de trois mois prouvant la bonne santé des époux et l'absence de tout facteur organique ou physiologique pouvant rendre incompatible l'union projetée", fait savoir un gynécologue d'Oran. "Les réticences de certains époux à transcrire leur union auprès des institutions concernées s'expliquent aussi par la crainte des longues procédures administratives", estime M. Medjahedi Mustapha, un chercheur en anthropologie sociale et culturelle. Les affaires liées à la reconnaissance des mariages contractés par la fatiha sont traitées dans un délai n'excédant pas les trois mois, assure pourtant le président du tribunal d'Oran. "Parmi les raisons qui poussent de nombreux couples unis par la fatiha à entamer une procédure de reconnaissance de mariage figurent la naissance d'enfants de cette union ou pour régler une affaire de succession ou d'héritage", relève ce magistrat qui insistera sur l'officialisation du mariage pour préserver les droits de l'épouse en cas de divorce ou de décès du conjoint. Un chercheur du Centre algérien de recherche en anthropologie sociale et culturelle (CRACS) d'Oran, M. Lahcen Redouane, pense, lui, que les chiffres disponibles sur le refus de certains hommes d'officialiser leur mariage sont en deçà de la réalité. "Il existe, soutient-il, des centaines et des centaines d'hommes ayant contracté un mariage par la fatiha et qui refusent toujours de le faire enregistrer auprès des juridictions concernées, et cela pour plusieurs raisons comme le refus pur et simple de reconnaître la réalité de cette union, ou encore le refus d'assumer la paternité des enfants nés de ce mariage pour fuir le versement de la pension alimentaire à la mère en cas de divorce".
L'administration s'implique, le phénomène persiste
Malgré une instruction du ministère des Affaires religieuses faisant obligation aux imams de ne prononcer la fatiha que pour les unions déjà officialisées par un acte administratif dûment établi et présenté par les deux époux lors de la cérémonie, le phénomène persiste, constate un juriste. Le Directeur des affaires religieuses de la wilaya d'Oran est clair à ce sujet: "La fatiha n'est prononcée dans les mosquées de la wilaya que pour les unions scellées auprès d'un notaire ou d'un officier de l'état civil, et tout imam transgressant l'instruction ministérielle s'expose à des sanctions administratives", avertit-il. Mais il reste que beaucoup de cérémonies de fatiha sont encore organisées dans un cadre strictement familial, au domicile d'un des époux. "Nous ne pouvons pas contrôler tous les lieux où est pratiqué ce rite et la direction des affaires religieuses n'a pas encore reçu, à ce jour, une plainte de tel ou tel citoyen contre un imam qui aurait enfreint l'instruction", note la même source. Le directeur des affaires religieuses relève que le contrôle s'avère d'autant plus difficile que la présence d'un l'imam dans une cérémonie de mariage par la fatiha, organisée dans un cadre privé, n'est pas une exigence religieuse, dans un contexte où nombre de citoyens croient -à tort- que quiconque apprend quelques versets de Coran est habilité à lire la fatiha.
Femmes victimes: des cas parlants
Les témoignages recueillis auprès de certaines femmes révèlent des cas d'épouses répudiées et renvoyées avec bagages et enfants, devenant des victimes emblématiques de cette pratique. Plusieurs ont avoué s'être liées au premier homme, même plus âgé qu'elles de plusieurs années, marié ou ayant des enfants. L'essentiel pour elles, était de trouver un compagnon et un toit pour pouvoir enfin fonder une famille. Autre exemple, autre anomalie: nombre de jeunes filles n'ayant pas atteint encore l'âge légal du mariage (19 ans) ont préféré convoler en noces par la seule fatiha, notamment celles, intéressées, dont le soupirant jouit d'une situation sociale confortable ou réside à l'étranger. Outre ces cas, on relève aussi que certaines veuves percevant des pensions après le décès de leur époux recourent à cette pratique de mariage par la fatiha par crainte de perdre le bénéfice de cette indemnité, ou encore d'autres qui acceptent ce type d'union pour découvrir plus tard qu'elles étaient liées à un polygame invétéré, qui use de ce stratagème pour ne pas avoir à solliciter le consentement de la première ou de la seconde épouse comme le mentionne le code de la famille. Un sondage sur le mariage par la fatiha réalisé, en 2005, par l'association "Femmes revendiquant leurs droits" (FARD), qui active à Oran, indique que parmi 100 femmes sondées, 20% ont été victimes de cette pratique s'étant retrouvées liées à un polygame. Les conditions économiques et sociales, le coût excessif des dots et la crise de logement ont conduit au recul de l'âge du mariage mais seraient aussi responsables de l'augmentation du taux des unions par la fatiha aussi bien dans les villes que les zones rurales d' Oran. "Beaucoup y voient aussi un moyen accepté par la société et la religion pour réparer des situations sociales parfois incommodantes", souligne M. Medjahedi. Si le mariage par la fatiha qui remplit toutes les conditions édictées par la religion, est assumé par la société, "certains n'y voient qu'un moyen pour cacher un concubinage, ou une sorte de "zawadj el moutaâ", aux effets désastreux pour la stabilité de la famille", explique une sociologue qui ne manque pas de dire et redire qu'une femme liée par cette forme d'union est soumise au diktat de son compagnon et "ne pourra que se soumettre à ses lubies et désirs quels qu'ils soient".
fatima- Nombre de messages : 1074
Date d'inscription : 28/02/2009
Re: MARIAGE PAR LA FATIHA: La face cachée d'une pratique controversée
Oran
Les risques du mariage par la seule Fatiha
Info Soir Info Soir : 06 - 08 - 2008
Pratique n Le phénomène du mariage par la seule fatiha, sans autre forme de légalisation de l'union auprès des administrations civiles officielles, a pris de l'ampleur, ces dernières années avec des conséquences pas toujours heureuses.
Pour sceller leur union, certains couples se contentent d'une lecture de la fatiha par un taleb en présence de quelques témoins. Si par le passé, cette pratique – conforme aux préceptes de l'islam – était assumée et acceptée par tout le monde, elle comporte aujourd'hui bien des risques. «La société connaît de grandes mutations aussi bien sur les plans économique et social que sur celui des mentalités, devenues, par les temps qui courent, malsaines dans beaucoup de situations, rendant ainsi nécessaire la transcription du mariage auprès des institutions officielles», résume une avocate établie à Oran. En guise de mise en garde contre les risques encourus, une présidente d'une association féminine affirme : «Cette pratique en vogue ne préserve par les droits de la femme. Elle est assimilable à un vulgaire concubinage.» Et d'expliquer : «Un homme qui s'unit à une femme par la fatiha peut se séparer d'elle, dans le meilleur des cas grâce à la même fatiha, avec la tranquille conviction de ne rien risquer. Pis, il peut facilement s'en aller et laisser son épouse livrée à son sort car le taleb qui a scellé cette union n'a ni les moyens ni les attributions légales pour veiller à sa pérennité. En outre, cela rend la tâche de la femme à faire reconnaître ce mariage très ardue.» Des statistiques recueillies auprès du tribunal d'Oran révèlent, d'ailleurs, que le nombre d'affaires liées à la légalisation de mariages par la fatiha a atteint, au cours du premier semestre de l'année en cours, le nombre de 451. Si bien que des femmes peinent à faire reconnaître leur union par la faute de l'entêtement du mari où à cause du parjure de témoins, d'autres, n'ayant pas encore atteint l'âge légal du mariage, préfèrent la seule fatiha, notamment celles, intéressées, dont le soupirant jouit d'une situation sociale confortable ou réside à l'étranger. Outre ces cas, on relève aussi que certaines veuves percevant des pensions après le décès de leur époux recourent à cette pratique par crainte de perdre le bénéfice de cette indemnité. Dans bien des cas, celles qui acceptent ce type d'union découvrent plus tard qu'elles étaient liées à un polygame invétéré, qui use de ce stratagème pour ne pas avoir à solliciter le consentement de la première ou de la seconde épouse comme l'exige le Code de la famille. Un sondage réalisé en 2005 par l'association Femmes revendiquant leurs droits, qui active à Oran, a révélé que parmi les 100 femmes sondées, 20% ont été victimes de cette pratique.
Les risques du mariage par la seule Fatiha
Info Soir Info Soir : 06 - 08 - 2008
Pratique n Le phénomène du mariage par la seule fatiha, sans autre forme de légalisation de l'union auprès des administrations civiles officielles, a pris de l'ampleur, ces dernières années avec des conséquences pas toujours heureuses.
Pour sceller leur union, certains couples se contentent d'une lecture de la fatiha par un taleb en présence de quelques témoins. Si par le passé, cette pratique – conforme aux préceptes de l'islam – était assumée et acceptée par tout le monde, elle comporte aujourd'hui bien des risques. «La société connaît de grandes mutations aussi bien sur les plans économique et social que sur celui des mentalités, devenues, par les temps qui courent, malsaines dans beaucoup de situations, rendant ainsi nécessaire la transcription du mariage auprès des institutions officielles», résume une avocate établie à Oran. En guise de mise en garde contre les risques encourus, une présidente d'une association féminine affirme : «Cette pratique en vogue ne préserve par les droits de la femme. Elle est assimilable à un vulgaire concubinage.» Et d'expliquer : «Un homme qui s'unit à une femme par la fatiha peut se séparer d'elle, dans le meilleur des cas grâce à la même fatiha, avec la tranquille conviction de ne rien risquer. Pis, il peut facilement s'en aller et laisser son épouse livrée à son sort car le taleb qui a scellé cette union n'a ni les moyens ni les attributions légales pour veiller à sa pérennité. En outre, cela rend la tâche de la femme à faire reconnaître ce mariage très ardue.» Des statistiques recueillies auprès du tribunal d'Oran révèlent, d'ailleurs, que le nombre d'affaires liées à la légalisation de mariages par la fatiha a atteint, au cours du premier semestre de l'année en cours, le nombre de 451. Si bien que des femmes peinent à faire reconnaître leur union par la faute de l'entêtement du mari où à cause du parjure de témoins, d'autres, n'ayant pas encore atteint l'âge légal du mariage, préfèrent la seule fatiha, notamment celles, intéressées, dont le soupirant jouit d'une situation sociale confortable ou réside à l'étranger. Outre ces cas, on relève aussi que certaines veuves percevant des pensions après le décès de leur époux recourent à cette pratique par crainte de perdre le bénéfice de cette indemnité. Dans bien des cas, celles qui acceptent ce type d'union découvrent plus tard qu'elles étaient liées à un polygame invétéré, qui use de ce stratagème pour ne pas avoir à solliciter le consentement de la première ou de la seconde épouse comme l'exige le Code de la famille. Un sondage réalisé en 2005 par l'association Femmes revendiquant leurs droits, qui active à Oran, a révélé que parmi les 100 femmes sondées, 20% ont été victimes de cette pratique.
fatima- Nombre de messages : 1074
Date d'inscription : 28/02/2009
Re: MARIAGE PAR LA FATIHA: La face cachée d'une pratique controversée
je cite "Le mariage par la Fatiha sans aucune autre forme de légalisation auprès des instances civiles officielles est depuis quelques années devenu le recours pour bon nombre de couples. Ce phénomène prend des proportions alarmantes au vu des conséquences engendrées par cette pratique souvent malheureuse, voire dramatique"
en quoi cette pratique est malheureuse et dramatique???
en quoi cette pratique est malheureuse et dramatique???
Azul- Nombre de messages : 29959
Date d'inscription : 09/07/2008
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