Lahouari Addi, professeur de sociologie à l’IEP de Lyon : «L’Etat ne veut pas que l’économie s’autonomise de la tutelle du politique»
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Lahouari Addi, professeur de sociologie à l’IEP de Lyon : «L’Etat ne veut pas que l’économie s’autonomise de la tutelle du politique»
[size=32]Lahouari Addi, professeur de sociologie à l’IEP de Lyon : «L’Etat ne veut pas que l’économie s’autonomise de la tutelle du politique»[/size]
H.L.
14 JANVIER 2019 À 11 H 12 MIN
2035
Le régime algérien ne veut pas que l’économie s’autonomise de la tutelle du politique», a affirmé, hier, Lahouari Addi, professeur de sociologie à l’IEP de Lyon, dans un entretien accordé au site électronique Maghrebemergent. «L’économie algérienne dépend à 97% des hydrocarbures parce que la logique politique du régime refuse que les richesses soient créées par la société.
Le pouvoir réel, c’est-à-dire les militaires, préfère que les richesses proviennent de l’Etat, qui les redistribue aux différentes catégories sociales sous forme de privilèges, de salaires et d’aides sociales. Le régime craint que le processus de création des richesses lui échappe, d’autant plus que la présence d’hydrocarbures lui permet de ne pas dépendre de la société. En Algérie, c’est la société qui dépend de l’Etat pour la subsistance et non l’inverse ; c’est ce schéma que cherche à perpétuer le régime.
L’Etat algérien ne veut pas que l’économie s’autonomise de la tutelle du politique», a-t-il souligné pour expliquer l’incapacité du régime à engager des réformes économiques structurelles. Pour appuyer ses propos, Lahouari Addi a cité le cas du groupe Cevital dont des projets d’investissement sont bloqués. «Imaginez-vous qu’il y ait 100 entreprises comme Cevital qui emploient 30% de la main-d’œuvre industrielle du pays et qui participent à hauteur de 50% aux exportations.
Ces 100 entreprises deviendraient une force politique qui demandera à l’Etat d’avoir une politique qui conforte les intérêts du capital et non du régime.» Et d’ajouter : «Les patrons demanderont l’autonomie de la justice pour protéger la concurrence et exiger une neutralité de l’Etat par rapport à la parité de la monnaie. Ils exigeront de limiter le déficit du budget de l’Etat pour ne pas avoir à augmenter les salaires de leurs ouvriers. Ceci poussera les travailleurs à avoir des syndicats représentatifs qui les défendent.
Si cela se produit, l’Etat deviendrait un arbitre entre forces sociales aux intérêts antagonistes. Or, l’Etat en Algérie ne veut pas être arbitre ; il veut représenter les patrons, les ouvriers et toutes les autres catégories sociales. Le régime algérien a un appétit insatiable de pouvoir, ce qui est une marque de culture féodale.» A propos du bras de fer entre l’administration et le patron de Cevital, Lahouari Addi n’impute pas les déboires de l’homme d’affaires, contrairement à ce qu’avait avancé ce dernier, à son origine kabyle. «Il aurait rencontré les mêmes blocages s’il était Tlemcénien.
Le régime ne lui pardonne pas de s’être lancé dans la production à cette échelle. S’il était juste un importateur ou un entrepreneur en construction dépendant de marchés publics, il n’aurait eu aucun problème avec l’administration. Le régime algérien n’est pas régionaliste, même s’il y a des responsables qui le sont à titre personnel», croit savoir le professeur de sociologie. Selon lui, le régime refuse l’autonomie du pouvoir économique pour des raisons politiques. «Sinon, comment expliquer que ce même régime promeut Ali Haddad originaire de la Kabylie comme Issad Rebrab ? La différence, c’est que l’un vit des chantiers publics de l’Etat, et l’autre est créateur de richesses et exportateur. Ali Haddad est économiquement plus vulnérable, d’où sa fragilité politique.
Le régime cherche à promouvoir des hommes d’affaires qui lui doivent tout. Je ne dis pas que Rebrab n’a pas été protégé par des clans du pouvoir dans le passé. Mais l’évolution ultérieure de ses activités économiques risque de lui donner une indépendance que le régime craint. Surtout qu’il peut faire des émules.
Avec 100 Rebrab sur le territoire national, le régime perdrait le contrôle sur la société», a argué Lahouari Addi. Evoquant, par ailleurs, la prochaine élection présidentielle prévue en avril prochain, il a estimé que «les militaires» ne peuvent répéter le scénario du 4e mandat du fait que «Bouteflika est à peine conscient de ce qui se passe autour de lui».
«Certains avancent le nom de Ouyahia pour être le prochain président. C’est possible. Mais les militaires ont peur qu’une fois installé dans la fonction, il leur échappe et s’autonomise du MDN. II y a eu un précédent avec Boumediène choisi par Krim Belkacem, Boussouf et Bentobbal du fait qu’il était timide et effacé. Chacun des trois espérait le manipuler à sa guise. Il les a écartés et est devenu le nouveau leader. Les généraux craignent l’avènement d’un Boumediène ou d’un Erdogan algérien. Il est possible que les généraux fassent appel à Lakhdar Brahimi qui présente l’avantage d’être sans ambitions politiques», a-t-il pronostiqué.
H.L.
14 JANVIER 2019 À 11 H 12 MIN
2035
Le régime algérien ne veut pas que l’économie s’autonomise de la tutelle du politique», a affirmé, hier, Lahouari Addi, professeur de sociologie à l’IEP de Lyon, dans un entretien accordé au site électronique Maghrebemergent. «L’économie algérienne dépend à 97% des hydrocarbures parce que la logique politique du régime refuse que les richesses soient créées par la société.
Le pouvoir réel, c’est-à-dire les militaires, préfère que les richesses proviennent de l’Etat, qui les redistribue aux différentes catégories sociales sous forme de privilèges, de salaires et d’aides sociales. Le régime craint que le processus de création des richesses lui échappe, d’autant plus que la présence d’hydrocarbures lui permet de ne pas dépendre de la société. En Algérie, c’est la société qui dépend de l’Etat pour la subsistance et non l’inverse ; c’est ce schéma que cherche à perpétuer le régime.
L’Etat algérien ne veut pas que l’économie s’autonomise de la tutelle du politique», a-t-il souligné pour expliquer l’incapacité du régime à engager des réformes économiques structurelles. Pour appuyer ses propos, Lahouari Addi a cité le cas du groupe Cevital dont des projets d’investissement sont bloqués. «Imaginez-vous qu’il y ait 100 entreprises comme Cevital qui emploient 30% de la main-d’œuvre industrielle du pays et qui participent à hauteur de 50% aux exportations.
Ces 100 entreprises deviendraient une force politique qui demandera à l’Etat d’avoir une politique qui conforte les intérêts du capital et non du régime.» Et d’ajouter : «Les patrons demanderont l’autonomie de la justice pour protéger la concurrence et exiger une neutralité de l’Etat par rapport à la parité de la monnaie. Ils exigeront de limiter le déficit du budget de l’Etat pour ne pas avoir à augmenter les salaires de leurs ouvriers. Ceci poussera les travailleurs à avoir des syndicats représentatifs qui les défendent.
Si cela se produit, l’Etat deviendrait un arbitre entre forces sociales aux intérêts antagonistes. Or, l’Etat en Algérie ne veut pas être arbitre ; il veut représenter les patrons, les ouvriers et toutes les autres catégories sociales. Le régime algérien a un appétit insatiable de pouvoir, ce qui est une marque de culture féodale.» A propos du bras de fer entre l’administration et le patron de Cevital, Lahouari Addi n’impute pas les déboires de l’homme d’affaires, contrairement à ce qu’avait avancé ce dernier, à son origine kabyle. «Il aurait rencontré les mêmes blocages s’il était Tlemcénien.
Le régime ne lui pardonne pas de s’être lancé dans la production à cette échelle. S’il était juste un importateur ou un entrepreneur en construction dépendant de marchés publics, il n’aurait eu aucun problème avec l’administration. Le régime algérien n’est pas régionaliste, même s’il y a des responsables qui le sont à titre personnel», croit savoir le professeur de sociologie. Selon lui, le régime refuse l’autonomie du pouvoir économique pour des raisons politiques. «Sinon, comment expliquer que ce même régime promeut Ali Haddad originaire de la Kabylie comme Issad Rebrab ? La différence, c’est que l’un vit des chantiers publics de l’Etat, et l’autre est créateur de richesses et exportateur. Ali Haddad est économiquement plus vulnérable, d’où sa fragilité politique.
Le régime cherche à promouvoir des hommes d’affaires qui lui doivent tout. Je ne dis pas que Rebrab n’a pas été protégé par des clans du pouvoir dans le passé. Mais l’évolution ultérieure de ses activités économiques risque de lui donner une indépendance que le régime craint. Surtout qu’il peut faire des émules.
Avec 100 Rebrab sur le territoire national, le régime perdrait le contrôle sur la société», a argué Lahouari Addi. Evoquant, par ailleurs, la prochaine élection présidentielle prévue en avril prochain, il a estimé que «les militaires» ne peuvent répéter le scénario du 4e mandat du fait que «Bouteflika est à peine conscient de ce qui se passe autour de lui».
«Certains avancent le nom de Ouyahia pour être le prochain président. C’est possible. Mais les militaires ont peur qu’une fois installé dans la fonction, il leur échappe et s’autonomise du MDN. II y a eu un précédent avec Boumediène choisi par Krim Belkacem, Boussouf et Bentobbal du fait qu’il était timide et effacé. Chacun des trois espérait le manipuler à sa guise. Il les a écartés et est devenu le nouveau leader. Les généraux craignent l’avènement d’un Boumediène ou d’un Erdogan algérien. Il est possible que les généraux fassent appel à Lakhdar Brahimi qui présente l’avantage d’être sans ambitions politiques», a-t-il pronostiqué.
Azul- Nombre de messages : 29959
Date d'inscription : 09/07/2008
Re: Lahouari Addi, professeur de sociologie à l’IEP de Lyon : «L’Etat ne veut pas que l’économie s’autonomise de la tutelle du politique»
https://www.elwatan.com/edition/actualite/lahouari-addi-professeur-de-sociologie-a-liep-de-lyon-letat-ne-veut-pas-que-leconomie-sautonomise-de-la-tutelle-du-politique-14-01-2019?fbclid=IwAR3oK_ETSSFZj5fmH4BVswcDxitOIwYCaIoPd9j2q1lKtr3x4MrUItJ2zqk
Azul- Nombre de messages : 29959
Date d'inscription : 09/07/2008
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