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ICI MIEUX QUE LA-BAS Jasmin à l’étrange odeur de salafisme

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Message  Azul Dim 17 Juin - 16:31

Par Arezki Metref
arezkimetref@free.fr
Dimanche 10 juin. Exposition Printemps des arts dans une galerie au Palais El Ebdellia à la Marsa, dans un quartier de Tunis. Des activistes salafistes déboulent et vandalisent des œuvres jugées «insultantes pour l’islam».
Signes extérieurs : une haine de l’art grimaçante. Celles qui ont échappé à l’autodafé sont bloquées le lendemain par les autorités elles-mêmes. Et comme si l’opération coup-de-poing ne suffisait pas, 2 500 salafistes déferlent sur Tunis attaquant des commissariats, incendiant, comme à Essijoumi, le tribunal ainsi que le bureau du procureur, laissé totalement en cendres. Affrontements avec les forces de l’ordre dont les chefs avouent n’avoir pas reçu de consignes : 65 policiers sont blessés, 162 personnes interpellées. Le gouvernement Ennahda renvoie dos à dos le bourreau et la victime. Au lieu de défendre les artistes agressés, parmi lesquels les plus créatifs de Tunisie, le ministre de la Culture s’en prend… à eux, les accusant de commettre des atteintes au sacré. Cerise sur le gâteau, il veut porter plainte contre les organisateurs de l’exposition. Les artistes sont arrêtés par la police à l'égal des salafistes qui viennent de brûler leurs œuvres et des bâtiments officiels. Le mouvement salafiste est d’une telle ampleur agressive qu’il contraint le gouvernement à décréter l’Etat d’urgence. Un couvre-feu, de 21h à 5h du matin, a été imposé dans huit régions dont la capitale. Comme si le tisonnier pour activer le brasier n’était pas assez agité, Ayman al Zaouari, successeur autoproclamé de Ben Laden à la tête d’Al Qaïda, en ajoute un moulinet. Il appelle les Tunisiens à défendre la Charia, accusant au passage les islamistes d’Ennahda au pouvoir de ne pas en faire assez. Rappelons que ces derniers, extrémistes eux-mêmes comme le montre cette affaire, ont laissé les radicaux s'approprier l’université de la Mendouba. Eh bien, al Zaouari ne les rend pas moins coupables de s’être reniés et d’avoir trahi l’islam. Le ministre des Affaires religieuses, Noureddine Khademi, dopé à ce soutien inattendu de la pieuvre intégriste, préconise qu’on consacre législativement les atteintes à l’islam. Commentant le raid salafiste contre la galerie, c’est sur les œuvres qu’il focalise. En critique d’art averti, il commente : «Certaines œuvres vont à l’encontre des principes mêmes de l’Islam.» Défenseur bien entendu «de la liberté d’expression ou de créativité », il n’accepte pas que celle-ci «s’attaque à la religion». Si, comme celle du ministre de la Culture, la déclaration du ministre des Affaires religieuses sur cette affaire ne vaut pas position officielle, alors qu’est-ce qui le serait ? La préconisation de constitutionnaliser «les atteintes à l’islam» est une autre façon d’entrer la loi islamique dans la législation après l’échec essuyé à l’automne dernier par Ennahda d’inscrire la Charia dans la Constitution. Tout indique que le pouvoir abdique sans se battre devant le salafisme laissant entrer le pays, dont les acquis laïques ont été hérités de Bourguiba et de sa Constitution de 1959, la première de la Tunisie indépendante, dans une zone de tempêtes où le spectre de la guerre civile n’est pas aussi délirant que ça ! Pour l’avoir payé cher, nous autres Algériens sommes familiers de l’enchaînement de ces faits qui tissent le chaos. Déjà, il y a quelques mois, on a vu la répétition en Tunisie d’un acte liberticide que nous ne connaissons que trop bien pour l’avoir abrité au temps de la montée de l’islamisme. La diffusion de Persépolis, film d’animation francoiranien de Vincent Paronnaud et Marjane Satrapi sur la chaîne privée Nessma TV, a valu à cette dernière une tentative de saccage de ses locaux et la dévastation de la demeure de Nabil Karoui, son directeur général. Ça ne s’est pas arrêté là ! Accusé de «porter atteinte à l’ordre public et aux symboles religieux», il a été présenté devant un tribunal où un procureur n’a pas hésité à requérir contre lui la peine de mort. De report en report, subsistera une amende, mais le signal est envoyé. On l’entend à l’université de La Menouba où le corps enseignant, progressiste et acquis aux idées de laïcité, et l’UGET, l’Union générale des étudiants tunisiens, se battent contre les salafistes pour que soit appliquée la loi interdisant le niqab. Ce conflit qui dure depuis des mois a connu des moments de vérité comme celui qui a vu un de ces salafistes étrangers à l’université, appelés au secours de l’islamisation de la faculté, retirer le drapeau tunisien pour le remplacer par le drapeau d’Al Qaïda… Cet affrontement que le gouvernement se garde de trancher condense la tension entre l’élite moderniste laïque et les salafistes dans le pays. L’émiettement des partis démocrates laisse, en face des islamistes, des individus ou des groupes corporatistes dispersés. Ne disait-on pas déjà que les islamistes qui n’avaient pas aventuré la moindre phalange dans la «révolution de jasmin», étaient comme d’habitude prompts et habiles à moissonner les sacrifices des autres ? L’arrivée au pouvoir d’Ennahda qui jure ses grands dieux de faire montre de modération a exacerbé le mouvement salafiste qui agit désormais à visage découvert et dans l’impunité, parce qu’il exprime sans doute ce que, contraints par la realpolitik, les comparses de Ghennouchi sont obligés d’euphémiser.On en est là! Mainmise des salafistes qui, à partir de la rue, avec violence, font pression sur un gouvernement qui ne demande que ça. Censure des artistes, répression des démocrates, attaques contre l'intelligence, panoplie que l'on a bien connue autrefois chez nous ! Autre phénomène que nous avons aussi connu par le passé, le ralliement au salafisme des «démocrates modérés» qui y voient une sorte d'aspiration populaire tandis que c'est tout l'inverse, et la tendance de nombreux amis tunisiens à relativiser la gravité de la situation à laquelle a conduit la «révolution du jasmin». Beaucoup d'entre eux n'y voient que des dérapages sans conséquences d'une révolution en train de procéder à de nouveaux réglages. Nous avons aussi connu ce genre d'analyse. Des démocrates et des intellectuels qui valident l'islamisme comme expression populaire, c’est déjà vu ! Mais — et ça aussi nous connaissons — des intellectuels se dressent contre ce mouvement brutal, conquérant, sanglant qui entend «moraliser» la société en en extirpant la diversité, en s'attaquant à l'art. Soixante-dix intellectuels tunisiens de haut niveau viennent de publier dans la presse internationale un manifeste dans lequel ils mettent en garde contre «le sixième califat». Ce manifeste, intitulé «L'avenir de la démocratie en Tunisie», est signé entre autres par l'écrivain Fethi Belhaj, l'artiste Meriem Bouderbala, les universitaires Emna ben Miled, Abdelwahab Medeb, le cinéaste Fadhel Jaziri, ou encore les poètes Mohamed Sghaïr Oueld Ahmed et Tahar Bekri, l'économiste Gérard Maarek... Dressant un constat alarmant de l'avancée du salafisme comme perversion de la révolution tunisienne, les signataires soulignent : «Le discours de l'identité ethnique et confessionnelle envahit le pays. Cette propagation du fanatisme est exacerbée par les prédicateurs les plus archaïques et les plus haineux du Moyen-Orient qui sont reçus en maîtres à penser. Aux yeux d'Ennahda, la tunisianité est secondaire par rapport à cette identité exaltée.» Devant l'incapacité peut-être programmée du gouvernement Ennahda à protéger les institutions et les personnes des atteintes salafistes, devant la défaillance organisée de l'autorité de l'Etat qui favorise le climat d'insécurité propice à la conquête extrémiste, d'autres voix s'élèvent pour des solutions plus radicales. Ainsi Mezri Haddad, philosophe et ancien ambassadeur de Tunisie auprès de l'Unesco, n'y va pas par trente-six chemins. Il appelle l'armée à «prendre le contrôle du pays, instaurer l'état d'urgence, et rétablir l'ordre républicain». Voilà qui nous rappelle un certain janvier 1992 en Algérie. Mezri Haddad n'est pas le seul, le chef du Néo Destour, Ahmed Mansour, appelle lui aussi le général Rachid Ammar à constituer un gouvernement de transition avec des politiciens honnêtes de l'ancien régime comme Ahmed Mestiri, Ahmed Ben Salah, etc. Tandis que les salafistes saccageaient les quartiers de Tunis, un tribunal condamnait Ben Ali à la prison à perpétuité, ce qui lui fait une belle jambe. Vraiment…
A. M.

Azul
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