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Lettre ouverte au Président Nicolas Sarkozy

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Lettre ouverte au Président Nicolas Sarkozy Empty Lettre ouverte au Président Nicolas Sarkozy

Message  fatima Dim 25 Sep - 19:01

Objet : Lettre ouverte au Président Nicolas Sarkozy
À : afprabat@mtds.com


Lettre ouverte au Président Nicolas Sarkozy :
Pourquoi la France est hostile aux imazighen* ?

Par Rachid RAHA**

Monsieur le Président,

Votre discours du 15 septembre à Benghazi, nous a laissés pantois et stupéfaits vu que vous avez affirmé : « (...) jeunes de Benghazi, jeunes de Libye, jeunes Arabes (…)». « (...) tous les peuples « arabes » qui veulent se libérer de leurs chaînes (…). Vos propos laissent penser que le peuple libyen serait un peuple « arabe » autant sur le plan ethnique que sociologique, identitaire, culturel et linguistique.



Monsieur le Président,

Permettez moi, de vous signaler que le succès de la révolution libyenne revient en grande partie au peuple autochtone amazigh, qui s’est rebellé à l’Est de la Libye et qui a eu le mérite de libérer Tripoli, et au peuple Toubou qui ont libéré une grande partie du Sud. Ceux que vous concéderez comme des « arabes » sont en réalité des amazighs pour beaucoup arabisés après leur conversion à l’Islam. Une arabisation forcée, voulue et accéléré par le dictateur déchu Kadhafi.



Monsieur le Président,

Vous ne cessez pas de qualifier les actuelles révolutions des peuples du Sud de la méditerranée « de printemps arabe », quand en réalité, il s’agit d’un printemps des peuples d’Afrique du Nord et du Proche-Orient. Dans la révolution nord-africaine du jasmin en Tunisie, les amazighs, même minoritaires, se sont engagés profondément pour le renversement du système dictatorial de Ben Ali comme l’ont fait les « coptes » et les amazighs de Siwa en Egypte tout comme sont entrain de le faire les kurdes et les druzes en Syrie…



Monsieur le Président,

La réduction des peuples d’Afrique du Nord et du Proche Orient sous l’étiquette de peuple arabe, perpétuant l’influence de l’idéologie totalitaire panarabiste ne satisfait pas aux intérêts des peuples. Vous venez d’aider les libyens à se libérer du colonialisme « arabiste » de Kadhafi, mais nous flairons le danger du néo-colonialisme franco-britannique d’ordre économique, qui s’intéresserait davantage aux ressources naturelles et au pétrole qu’à la libération des peuples !



Monsieur le Président,

Vous savez bien que la politique d’arabisation idéologique, qui a ruiné le système éducatif de nos pays d’Afrique du nord (Maroc, Algérie, Tunisie…) a été enclenchée par vos écoles coloniales « franco-arabes », qui a formé une large élite urbaine à laquelle vos prédécesseurs avaient cédé le pouvoir après votre départ d’Afrique du Nord. Ce phénomène d’arabisation qui avait commencé pendant la période coloniale, avait déjà permis le déracinement des amazighs, forcées par l’exode rural, à descendre de leurs montagnes vers les centres urbains.



Monsieur le Président,

Vous parlez de votre pays comme le foyer des droits de l’homme, le pays qui a chassé la monarchie absolutiste de Louis XVI. Mais, votre pays est malheureusement celui qui est à l’origine des problèmes actuels que vivent les peuples d’Afrique du Nord. Votre pays a soutenu l’absolutisme et l’archaïsme au Maroc et ailleurs. L’Etat français qui a maquillé l’Etat sultanien, de tendance médiévaliste, en un état « supposé » moderne où les citoyens continuent toujours à être traités comme des « sujets » par la maintenance de traditions déphasées comme le baise main et le rite de la soumission dite « bay’a», malgré l’adoption d’une nouvelle constitution que vous avez salué partout sans qu’elle se traduise par aucun changement palpable pour le peuple marocain.



Le système « makhzénien » continue à prendre le dessous sur tout changement au demeurant avec la bénédiction de la France. Comme vous le savez, c’est la France coloniale qui avait obligé l’armée espagnole, dans une action commune et coordonnée, utilisant des armes chimiques de destruction massive, telles que l’ypérite, le phosgène et la chloropicrine, et les escadrilles dites « chérifiennes » pour massacrer les populations civiles, afin de mater la guerre de libération d’Abdelkrim El Khattabi (1921-1927). Cette guerre à l’encontre des rifains est un crime contre l’humanité. Et c’est toujours l’Etat français qui a exclu l’armée de libération, formée exclusivement de combattants amazighs, des négociations des conditions de l’indépendance qui ont abouti aux accords d’Aix les Bains, en 1954, donnant lieu à une pseudo indépendance, en substituant l’élite administrative coloniale par la nouvelle élite urbaine « arabiste » ou « fassi ». Et lorsque les amazighs se sont soulevés contre la marginalisation des leurs au sein des premiers gouvernements post-indépendance, ce sont vos aviateurs qui ont contribué à décharger des bombes, y inclus le napalm, sur les populations civiles au Rif lors des événements des années 1958-1959. Un autre chapitre des crimes contre l’humanité. Sans parler de la complicité de vos services et de leur silence complice dans les assassinats politiques des membres distingués de l’armée de libération, dont Abass Messaadi, commis sur ordres de vos « protégés » du parti de l’Istiqlal, dont l’un d’eux, en l’occurrence Mehdi Ben Barka, a été assassiné par des agents communs de vos services et des services marocains.



Monsieur le Président,

Je ne vous demanderais pas si des « mallettes diplomatiques » ont été acheminés de Rabat vers Paris, durant le règne de Jaques Chirac ou le règne d’autres présidents français, mais une chose est claire, le jacobinisme de l’Etat marocain, renforcé par l’idéologie dictatoriale panarabiste, n’est pas sans liens avec votre pays... Cela constitue actuellement l’handicap majeur pour sa démocratisation. Je vous confesse que le débat sur la régionalisation politique, que nous avons eu le mérite d’enclencher au Maroc, en tant que mouvement amazigh, s’est soldée par une frustration énorme en copiant le modèle le plus mauvais au monde, le modèle français, où les régions historiques sont dépourvues de vraies prérogatives politiques et divisées en départements pour de simples considération socio-économiques, qui n’arrangent en aucune manière l’intégration et l’épanouissement de vos propres peuples : breton, occitan, basque, corse, calédonien…



Monsieur le Président,

Si les sacrifices humains de votre mémorable révolution de 1789 se sont achevés par la déclaration universelle des droits du citoyen, et qui a évolué par la suite en la déclaration universelle des droits de l’homme adoptée le 10 décembre 1948, les citoyens et les peuples du monde entier l’ont développé et l’ont enrichie jusqu’à ce que l’Assemblé Générale des Nations Unies l’adopte sous une nouvelle déclaration universelle, celle des droits des peuples autochtones, adoptées le 13 septembre 2007. Aussi, c’est sur la base des principes de cette dernière que nous vous demandons de respecter, et que vous appuyez l’autodétermination et l’autonomie des peuples du monde, d’Afrique du Nord, du Proche Orient et de votre propre pays, à savoir la France. Les révolutions en Tunisie, en Egypte et en Libye, au Yémen, ou en Syrie et ailleurs… sont faites par des citoyens et des peuples, qu’il ne faut absolument pas réduire à l’arabisme ! Les transitions démocratiques que ces pays sont entrain de vivre ne peuvent réussir que s’ils respectent le principe d’autodétermination et d’autonomies de leurs propres peuples autochtones avec le passage des Etats centralisés et jacobins vers les « Etats des régions » comme le stipule l’article 46 de la déclaration des peuples autochtones. La Libye, par exemple, ne peut devenir un état authentiquement démocratique qu’à la condition que les populations de la Cyrénaïque, de la Tripolitaine, de Fezzan, les amazighs de Jbel Nefoussa à l’Est, les Touarègues et les Toubous au Sahara construisent un état décentralisé de régions qui disposerait d’un gouvernement et d’un parlement régionaux autonomes.



Monsieur le Président,

Le néo-colonialisme économique que vous avez parfaitement réussi à installer au Maroc, au Niger et au Mali, à travers vos multinationales (Veolia, Areva…) et que vous préparez en Libye ne résoudra pas le problème du développement humain, qui stopperait l’émigration vers votre pays, ni réduira le risque terroriste islamiste qui se répand dans la région nord-africaine et sahélienne. Je vous dirais même plus, imaginez juste un instant que les quatre millions de citoyens français d’origine amazigh de votre chère république, à coté des millions de citoyens amazighs du Maroc, de l’Algérie, de Tunisie… boycottent les produits français, [par exemple l’achat de vos marques de voitures (Renault, Dacia, Peugeot, Citroën…)], votre économie serait mise à genoux. N’oubliez pas que les amazighes, engagés dans vos armées, ont contribué à défendre, comme chair à canon, et à libérer la France lors des deux guerres mondiales, du péril nazi. C’est aussi grâce aux amazighs en tant que mains d’œuvre qui ont contribué efficacement à la reconstruction de la France après les deux guerres mondiales. De même, ce sont des figures amazighes, comme Zineddine Zidane, que le sport et les arts français ont connu ses meilleurs moments de gloire, etc.



Monsieur le Président,

En définitive, vous savez bien, que le respect des droits collectifs des peuples n’est aucunement en contradiction avec les droits individuels que vous avez érigés en tant que religion d’Etat. Ils sont plutôt complémentaires et leurs applications ne feront que renforcer la paix et le bien être des individus et des peuples aussi bien de France que d’Afrique et du Monde. Et parmi ces peuples singuliers, il y a le « grand peuple amazigh » qui fait inéluctablement partie intégrante de votre propre diversité ethnique et linguistique et culturelle. En Afrique du nord, M. Le Président, il n’y a pas de « peuples arabes », sinon des peuples amazighes, des hommes libres, dont certains et en grande majorité sont amazighophones et/ou arabophones, et d’autres, en minorité, sont francophones (Kabylie) et hispanophones (Iles Canaries) !





* Imazighen, connus sous le nom des berbères, veut dire les hommes libres.




--
Rachid RAHA
Président de la Fondation Montgomery Hart des Etudes Amazighs
Vice-Président du Congrès Mondial Amazigh
Editeur de journal "Le Monde Amazigh"
GSM: 00 212 668 292 153
Fax: 00 212 537 727 283
E-mail: rachid.raha@gmail.com
Web: www.amadalpresse.com/rachid_raha
Adresse: Editions AMAZIGH
5, Rue Dakar Appt. 7
10.040 Rabat / Morocco
fatima
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