«En Algérie, la femme est un sous-citoyen»
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«En Algérie, la femme est un sous-citoyen»
«En Algérie, la femme est un sous-citoyen»
11 mai 2010 à 11:33
(Mis à jour: 11:38)
Manifestation féministe en
solidarité avec les travailleuses d'Hassi Messaoud, devant l'ambassade
d'Algérie à Paris, lundi 10 mai (DR)
Par ARIANE LECOINTRE
Nadia Kaci est comédienne et co-auteur du livre Laissées pour mortes (éditions Max Milo), qui recueille le témoignage de Rahmouna Salah et Fatiha Maamoura, deux victimes du déchaînement de violence à Hassi Messaoud
en 2001. Dans cette ville algérienne, les femmes sont régulièrement
victimes de violences de la part d'hommes venus là, souvent seuls, pour
travailler dans l'industrie pétrolière. Liberation.fr l'a rencontrée
lundi 10 mai, à la manifestation de soutien aux femmes d'Hassi Messaoud,
devant l'ambassade d'Algérie à Paris.
Pourquoi vous battez-vous? Quelle est l'attitude du gouvernement algérien face aux violences d'Hassi Messaoud?
A Hassi Messaoud,
une des villes les plus surveillées d'Algérie, cinq cents hommes
peuvent attaquer cent femmes, les violer, les torturer, voler leurs
maigres biens, en toute impunité. C'était en 2001. Si ces agressions
recommencent aujourd'hui, c'est parce que ces hommes agissent en toute
impunité. Pour légitimer la barbarie, les femmes ont été accusées d'être
des prostitués.
Le gouvernement refuse de défendre ces femmes. Les plaintes sont
restées sans suite. Le ministère de l'action sociale et de la solidarité
nationale est dans le déni, le gouvernement prétend que l'affaire
d'Hassi Messaoud est un complot monté par la France pour déstabiliser
l'Algérie, ce silence est effarant.
Les actes commis à Hassi Messaoud sont la conséquence directe du code
de la famille de 1984, qui réduit la femme au statut de mineur. En
Algérie, la femme est un sous-citoyen. On ne constate aucune volonté
politique de régler le problème, et c'est ça le plus inquiétant.
Est-ce que les violences d'Hassi Messaoud sont un événement isolé ou symptomatique d'une violence récurrente en Algérie?
En Algérie, quand une femme se fait battre dans la rue, personne ne fait attention, les gens pense «ce doit être son mari, son père ou son frère».
Personne ne fait entendre raison aux hommes, puisque les femmes sont
considérées comme des propriétés. Hassi Messaoud est un peu particulier
dans la mesure où il y a beaucoup de mouvements de population, mais on
peut observer dans tout le pays ces mouvements de violence orientés
contre les femmes.
La voie médiatique est-elle le seul moyen de faire avancer les choses? Comment les médias algériens réagissent-ils?
La seule solution pour faire évoluer la condition des femmes d'Hassi
Messaoud est la pression médiatique. Il ne faut surtout pas que cette
pression se relâche, car les hommes attendent une accalmie pour
recommencer leurs attaques.
En revanche, en Algérie, c'est le silence quasi total. En 2001, Salima Tlemçani a eu le courage de faire le récit des violences d'Hassi Messaoud dans El Watan.
Aujourd'hui, elle reçoit des menances, au même titre que les femmes
agressées. Le seul article que j'ai lu sur les dernières agressions
date d'aujourd'hui, dans Liberté.
Sur place, la presse est censurée, les journalistes étrangers ont du
mal à obtenir des visas pour constater les violences faites aux femmes,
c'est le black-out complet.
Depuis la parution de votre livre (février 2010), avez-vous constaté des changements en Algérie?
Non, après la parution du livre (Laissées pour mortes), j'ai
reçu des appels de femmes d'Hassi Messaoud, qui me disaient qu'elles se
faisaient encore agresser. Les travailleuses reçoivent des coups de
fils, des menaces, on leur demande de se taire, de ne pas raconter ce
qui leur est arrivé. Elles vivent dans la peur en permanence.
D'après mes sources, Hassi Messaoud est toujours un espace de
non-droit. J'ai entendu parler d'une femme brûlée vive, mais je n'ai
aucun moyen d'obtenir des précisions. Là où j'observe du changement,
c'est que le monde est plus à l'écoute de ce qui se passe à Hassi
Messaoud, il faut que la pression continue, et se renforce.
11 mai 2010 à 11:33
(Mis à jour: 11:38)
Manifestation féministe en
solidarité avec les travailleuses d'Hassi Messaoud, devant l'ambassade
d'Algérie à Paris, lundi 10 mai (DR)
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Par ARIANE LECOINTRE
Nadia Kaci est comédienne et co-auteur du livre Laissées pour mortes (éditions Max Milo), qui recueille le témoignage de Rahmouna Salah et Fatiha Maamoura, deux victimes du déchaînement de violence à Hassi Messaoud
en 2001. Dans cette ville algérienne, les femmes sont régulièrement
victimes de violences de la part d'hommes venus là, souvent seuls, pour
travailler dans l'industrie pétrolière. Liberation.fr l'a rencontrée
lundi 10 mai, à la manifestation de soutien aux femmes d'Hassi Messaoud,
devant l'ambassade d'Algérie à Paris.
Pourquoi vous battez-vous? Quelle est l'attitude du gouvernement algérien face aux violences d'Hassi Messaoud?
A Hassi Messaoud,
une des villes les plus surveillées d'Algérie, cinq cents hommes
peuvent attaquer cent femmes, les violer, les torturer, voler leurs
maigres biens, en toute impunité. C'était en 2001. Si ces agressions
recommencent aujourd'hui, c'est parce que ces hommes agissent en toute
impunité. Pour légitimer la barbarie, les femmes ont été accusées d'être
des prostitués.
Le gouvernement refuse de défendre ces femmes. Les plaintes sont
restées sans suite. Le ministère de l'action sociale et de la solidarité
nationale est dans le déni, le gouvernement prétend que l'affaire
d'Hassi Messaoud est un complot monté par la France pour déstabiliser
l'Algérie, ce silence est effarant.
Les actes commis à Hassi Messaoud sont la conséquence directe du code
de la famille de 1984, qui réduit la femme au statut de mineur. En
Algérie, la femme est un sous-citoyen. On ne constate aucune volonté
politique de régler le problème, et c'est ça le plus inquiétant.
Est-ce que les violences d'Hassi Messaoud sont un événement isolé ou symptomatique d'une violence récurrente en Algérie?
En Algérie, quand une femme se fait battre dans la rue, personne ne fait attention, les gens pense «ce doit être son mari, son père ou son frère».
Personne ne fait entendre raison aux hommes, puisque les femmes sont
considérées comme des propriétés. Hassi Messaoud est un peu particulier
dans la mesure où il y a beaucoup de mouvements de population, mais on
peut observer dans tout le pays ces mouvements de violence orientés
contre les femmes.
La voie médiatique est-elle le seul moyen de faire avancer les choses? Comment les médias algériens réagissent-ils?
La seule solution pour faire évoluer la condition des femmes d'Hassi
Messaoud est la pression médiatique. Il ne faut surtout pas que cette
pression se relâche, car les hommes attendent une accalmie pour
recommencer leurs attaques.
En revanche, en Algérie, c'est le silence quasi total. En 2001, Salima Tlemçani a eu le courage de faire le récit des violences d'Hassi Messaoud dans El Watan.
Aujourd'hui, elle reçoit des menances, au même titre que les femmes
agressées. Le seul article que j'ai lu sur les dernières agressions
date d'aujourd'hui, dans Liberté.
Sur place, la presse est censurée, les journalistes étrangers ont du
mal à obtenir des visas pour constater les violences faites aux femmes,
c'est le black-out complet.
Depuis la parution de votre livre (février 2010), avez-vous constaté des changements en Algérie?
Non, après la parution du livre (Laissées pour mortes), j'ai
reçu des appels de femmes d'Hassi Messaoud, qui me disaient qu'elles se
faisaient encore agresser. Les travailleuses reçoivent des coups de
fils, des menaces, on leur demande de se taire, de ne pas raconter ce
qui leur est arrivé. Elles vivent dans la peur en permanence.
D'après mes sources, Hassi Messaoud est toujours un espace de
non-droit. J'ai entendu parler d'une femme brûlée vive, mais je n'ai
aucun moyen d'obtenir des précisions. Là où j'observe du changement,
c'est que le monde est plus à l'écoute de ce qui se passe à Hassi
Messaoud, il faut que la pression continue, et se renforce.
laic-aokas- Nombre de messages : 14024
Date d'inscription : 03/06/2011
Re: «En Algérie, la femme est un sous-citoyen»
http://www.liberation.fr/monde/0101634803-en-algerie-la-femme-est-un-sous-citoyen
laic-aokas- Nombre de messages : 14024
Date d'inscription : 03/06/2011
folle- Nombre de messages : 3347
Date d'inscription : 25/01/2009
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