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Le journaliste, l’enquête et la révolution

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Le journaliste, l’enquête et la révolution  Empty Le journaliste, l’enquête et la révolution

Message  laic-aokas Lun 25 Juin - 14:23

Au moment de l’admission, il ya quelques semaines, dans un hôpital parisien de l’ancien chef d’état Chadli Bendjedid, un groupe de citoyens algériens, dont de nombreux médecins, ont manifesté leur opposition, non à l’ex-chef d’état auquel ils ont avec courtoisie souhaité un prompt rétablissement, mais à la politique des pouvoirs publics qui assurent à la nomenklatura du régime une prise en charge à l’étranger alors que le système national de santé est en totale déliquescence.


Cette courageuse initiative n’a pas eu l’écho médiatique (et encore moins l’impact sur l’administration) qu’elle méritait. Elle gagnerait à être reprise et amplifiée ici même par des organisations professionnelles, des syndicats et des associations de malades et de familles de malades. Puisqu’une telle action soulève un problème vécu quotidiennement par des millions d’algériens pour qui l’accès aux soins est devenu un cauchemar. Tandis que la qualité des prestations met en évidence une déshumanisation, partout présente, mais rendue plus criante dans cet univers où la fragilité et la dépendance des êtres se posent de manière vitale.


Une enquête s’impose nous ont signifié des lecteurs vigilants. Certainement. Il ya des journaux dans ce pays qui se targuent de fonctionner à l’instar des plus grandes publications du monde. Certains n’hésitent pas à parler de « presse la plus libre du monde arabe » d’autre s’octroient des titres comme « plus grand tirage de la presse arabe » Certains sont « indépendants » d’autres sont dédiés à la « vérité » et le succès des plus téméraires leur a ouvert les portes de l’audio-visuel et leur permet de faire une concurrence sérieuse à la vieille ENTV.


Il y a également des journalistes qui ont assuré que le « quatrième pouvoir » avait sauvé l’Algérie de l’hydre terroriste. Les citoyens sont en droit d’en attendre qu’il fasse de même en ce qui concerne l’hydre de la corruption, du favoritisme et de l’Algérie des deux collèges.


Effectivement. Des enquêtes s’imposent. Sur l’organisation de la sécurité sociale et les enveloppes allouées aux soins à l’étranger par exemple. Il ya, parait-il, en France, en Belgique et ailleurs des établissements prospères qui fermeraient si demain l’Algérie décidait de se doter d’un véritable système de santé. Mais même leur délocalisation en Algérie, qui permettrait de préserver les intérêts bien compris des deux parties, n’est pas envisagée par notre administration.


Des enquêtes s’imposent également sur les filières du médicament et de l’équipement médical qui ont absorbé des milliards de dollars au gré des pressions et des lobbies et sans que l’on puisse assurer une maitrise des dépenses, en fonction d’une politique clairement au service du malade et d’un système de santé efficient.

Certainement des enquêtes et des procès équitables s’imposent.


Mais il y a également des journalistes qui ont toujours dit que la liberté de la presse n’était pas garantie dans un pays où les autres libertés ne sont pas garanties.


Que le quatrième pouvoir dans un pays où l’on peine à situer le vrai pouvoir est une vue de l’esprit. Que sans une véritable justice il n’ya aucune chance pour un Etat de fonctionner autrement que comme lieu de prolifération de toutes sortes de mafias. Que seuls les agents du DRS- dûment mandatés- arrivent à ouvrir les portes des bureaux et ont accès aux dossiers. Ce qui se publie comme enquêtes sérieuses n’est le fruit d’aucun accès légalement garanti aux sources. Ni de téméraires Rambos affrontant dans un même geste héroïque : les obstacles de l’administration bureaucratique, les foudres de la mafia, une justice aux ordres, un pouvoir soucieux de ses seuls équilibres précaires et une société démissionnaire. Inutile de rêver.


Si le pouvoir réel (qui se situe quelque part dans les rapports qui se nouent et se dénouent entre El Mouradia et les Tagarins) ne se décide pas à se doter des moyens de nettoyer les écuries d’Augias ce pays va s’échouer sur les berges du siècle dans un fracas de colère et de désespoir. ET QUE SEULE LA MAFIA A AUJOURD’HUI LES MOYENS DE SURVIVRE A UN TEL DESASTRE. Car elle a mis à profit les années de braise et de sang de la sale guerre des années 90 pour se renforcer au détriment de l’Etat et de la société.


Au lendemain des émeutes de Janvier 2011 (avant même la chute de Ben Ali qui allait entrainer ce si fameux « printemps arabe ») des familles des quartiers de Bourouba, d’El Harach, de Badjarah se sont précipitées vers le siège de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme pour réclamer de l’aide pour leurs enfants arrêtés à cette occasion. Les rares avocats militants n’ont pas suffit pour assurer l’assistance judiciaire à ces familles. Maitre Bouchachi avait alors lancé un appel pour demander aux confrères d’assurer gratuitement la défense de ces familles, toutes gravement démunies, dans un moment aussi sensible. La réponse n’a pas tardé à venir sous la forme d’un refus net de la part d’un bâtonnat qui se targuait de ne pas faire de politique !


Effectivement. Pendant des années les procès des militants des droits de l’homme se faisaient en présence d’un plus grand nombre d’avocats tunisiens ou marocains que de compatriotes. Au moment même où les grosses affaires de corruption voyaient s’aligner des cohortes de défenseurs. Seules les affaires qui réussissaient à mobiliser la presse sur la base d’affinités précises arrivaient à faire bouger en dehors du cercle étroit des avocats militants.


Alors quand la « société civile » a décidé de marcher le 12 Février, les quartiers populaires n’ont pas suivi. Et pour cause ! Ceux qui s’imaginent que les révolutions se mènent dans les médias se trompent lourdement. Certes les médias peuvent s’illusionner et illusionner une partie de la société sur la réalité de leur pouvoir, mais l’essentiel des consciences se forge dans la confrontation quotidienne avec un système fondé sur le mépris. Et ce dernier fonctionne aussi sur une base de classe. La plupart des 200.000 morts de la sale guerre, civils et militaires, provenaient des couches populaires et n’ont été pleurés que par les leurs. Alors on peut faire un grand tintamarre pour faire croire que la société se mobilise mais il n’en n’est rien. Chat échaudé…


La responsabilité des élites leur impose précisément la multiplication des initiatives et des mobilisations –secteur par secteur- pour que l’action collective éclairée reprenne du sens et qu’elle assure une prise véritablement citoyenne sur les changements en perspective.

Sinon le populisme à venir sera autrement plus vindicatif que l’actuel.


Par Salima Ghezali


Source : lanation.info
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Date d'inscription : 03/06/2011

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