Manipulation mentale
2 participants
Page 1 sur 1
Manipulation mentale
La manipulation mentale désigne l'ensemble des tentatives obscures ou occultes de fausser ou orienter la perception de la réalité d'un interlocuteur en usant d'un rapport de pouvoir, de séduction, de suggestion, de persuasion de soumission non volontaire ou consentie. Quand ce pouvoir ne s’exerce pas sur un objet, mais se rapporte au contrôle psychique d’une personne, on parle de manipulation mentale[1].
Cette notion protéïforme est récente dans ses contours, dérivé de la théorie du « lavage de cerveau » encore mal connue. Juridiquement, on lui préfère la notion de sujétion psychologique, le plus souvent dans le cadre d’accusations de dérives sectaires ou d'action d'ingénierie sociale. Par extension, les techniques de manipulations de l'opinion publique ou de manipulations de masse sont l'ensemble des moyens d'influence exercés sur une population à des fins économiques, militaires ou politiques.
Une notion controversée[modifier]Selon Stéphane Laurens, maître de conférences, « L'influence interindividuelle ou l'influence sociale fascine et effraye. (...) les terribles faits divers qui lui sont attribués (Suicides collectifs, crimes rituels…) ainsi que de troublantes études scientifiques (Travaux sur l'hypnose, études expérimentales sur le conformisme ou soumission à l'autorité…) nous affirment l'existence d'une force quasiment irrésistible et qui pourrait nous pousser à faire ou à penser des choses que nous ne voudrions pas, une force qui pourrait même nous conduire à notre perte. Il y a, avec l'influence, l'idée d'une intrusion, d'un véritable viol de la conscience, de la volonté… qui semble pouvoir passer sous le contrôle ou la volonté d'un autre. Ce n'est plus moi qui veut ou qui agit, c'est la volonté d'un autre qui est entrée en moi et c'est un autre qui agit à travers moi (sentiment de possession) »[2].
Arnaud Esquerre, sociologue, pose les questions « Qu’est-ce qui distingue un consentement fabriqué d’un consentement non fabriqué par quelqu’un d’autre ? Qui est en position de faire la distinction ? Quels sont les signes même d’une manipulation mentale ? » concluant qu’elles restent sans réponse[3]. Pourtant, la notion de manipulation mentale est fréquemment utilisée.
La théorisation de la manipulation mentale (appelée mind control (contrôle mental) ou plus récemment thought reform (réforme de la pensée) dans les pays anglophones) est très liée à la question des sectes. Le psychiatre Jean-Marie Abgrall le souligne en disant que « sans manipulation mentale, il ne peut exister de sectes »[4].
Élément de compréhension essentiel de certaines dérives pour les uns, thèse réfutée pour les autres[5], la controverse n’est pas terminée.
Historique[modifier]Les théories de lavage de cerveau et de manipulation mentale sont issues des recherches sur les programmes de pays totalitaires afin d’expliquer par quelle propagande et quelles méthodes ils étaient parvenues à, apparemment, endoctriner par exemple des prisonniers[6] ,[7]. Ces théories ont par la suite été étendues à l’étude des conversions religieuses en particulier sous l’impulsion de Margaret Singer dès les années 1960.
Le débat[modifier]En France, estimant que la législation ne permettait plus de lutter efficacement contre les sectes, un nouveau délit de « manipulation mentale » avait été proposé dans le projet de Loi About-Picard de 2001, et défini ainsi : « Le fait, au sein d'un groupement qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer ou d'exploiter la dépendance psychologique ou psychique des personnes qui participent à ces activités, d'exercer sur l'une d'entre elles des pressions graves et réitérées ou d'utiliser des techniques propres à altérer son jugement afin de la conduire, contre son gré ou non, à un acte ou une abstention qui lui est gravement préjudiciable.»[8]
Mais les oppositions à cette création d’un nouveau délit furent nombreuses[9]. La Commission nationale consultative des droits de l'homme, présidée par Pierre Truche, ancien premier président de la Cour de cassation, avait été consultée à cette occasion et avait rendu son avis ainsi : « La création d'un délit spécifique de manipulation mentale ne nous paraît pas opportune»[10]. Les députés ont finalement retenu une formulation plus « consensuelle » qui consistait à compléter « l’abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de faiblesse » existant (article 313-4, livre III du code pénal)[11]
Pour Roland Campiche, directeur de l'Observatoire des religions à l'Université de Lausanne : « Les expertises américaines qui ont étudié cette notion ont conclu qu'elle n'avait pas de consistance, et que l'individu restait capable de discernement lorsqu'il était engagé dans une secte. Cela dit, on ne peut faire abstraction de l'exploitation par les sectes d'une faiblesse passagère d'une personne. Mais au-delà, la responsabilité de l'individu reste engagée. On vit dans une société où la responsabilité individuelle est fortement mise en valeur. Alors pourquoi les gens ne seraient-ils pas aussi responsables dans le domaine de la religion?»[12]
Au contraire, pour l'avocat François Bellanger, président du groupe d'experts genevois qui s'est penché sur la question, « La manipulation mentale est une réalité. Mais il est vrai que le sujet est extrêmement difficile à réglementer. Il faut distinguer entre la manipulation mentale quotidienne, car nous sommes tous manipulés à des degrés divers, par la publicité par exemple, et la manipulation criminelle. Pour que celle-ci ait lieu, il faut une action physique et psychique répétée et systématique sur autrui dans le dessein d'affaiblir sa capacité de jugement ou de le placer dans un état de dépendance »[12].
Danièle Hervieu-Léger, sociologue des religions à l'École des hautes études en sciences sociales à Paris, est opposée à la thèse de la manipulation, qui « postule que l'individu qui choisit d'entrer dans une secte n'exerce en fait aucune volonté autonome »[12].
Selon le bureau de l’American Psychological Association, la théorie de la manipulation mentale« manque de rigueur scientifique et d’approche critique » [13]
Étude des rouages de la manipulation mentale[modifier]Dans « la parole manipulée », Philippe Breton, s'interroge sur le processus de manipulation et la nature de la violence faite à autrui. Il reprend un exemple de Beauvois et Joule dans lequel « un père demande à son fils, occupé avec un ami, d’aller lui acheter des cigarettes. Le fils accepte en pensant que ce n’est pas grave, le bureau de tabac étant tout près. Le père lui annonce alors qu’aujourd’hui la boutique du coin de la rue est fermée, qu’il faut aller à une autre, bien plus éloignée. Le fils, qui était déjà sur le point de partir, obtempère et sort de la maison d’un air morose. Que s’est-il passé ? Le père savait que s’il demandait de but en blanc à son fils d’aller au magasin éloigné, ce dernier n’accepterait pas, car ce serait une trop grande perte de temps. La manipulation repose ici sur la dissimulation d’une information importante, lors d’une première demande, trompeuse, qui permet d’obtenir une première réponse positive (...) Mais en quoi est-ce une action violente ? On pourrait se dire que le fils n’aurait certes sans doute pas accepté de rendre service à son père sans stratagème caché; mais quand il le fait, où est la contrainte ? Son père n’a pas donné d’ordre, le fils ne semble pas obéir. Pourtant, il s’agit bien d’une violence psychologique: à la différence d’une violence physique, qui passe par une action explicite, la manipulation « " consiste à entrer par effraction dans l’esprit de quelqu’un pour y déposer une opinion ou provoquer un comportement sans que ce quelqu’un sache qu’il y a eu effraction. Tout est là, dans ce geste qui se cache à lui-même comme manipulatoire" »[14].
Manipulation mentale et dérives sectaires en France[modifier]Le procès d'Arnaud Mussy, du Néo-Phare, en 2004, fut considéré comme la première application de la loi About-Picard sur la manipulation mentale ou « sujétion psychologique »[15],[16].
Manipulation mentale et société[modifier]Denis Duclos, sociologue, exprime la tension qui existe autour de la notion de manipulation mentale quand elle est perçue comme localisée uniquement dans les sectes : « Plus nous forcerons les gens à (...) s’accorder à l’idéal d’une humanité réglée par le droit commercial universel et son substrat technologique (en ignorant le caractère foncièrement coercitif de cette pure gestion), plus nous nous exposerons à ouvrir des plaies que la secte viendra exploiter, en opposition complice avec sa grande sœur globale »[17]. Pour beaucoup, la notion semble applicable à toutes sortes d'activités légales, comme la publicité[18]par exemple, voire plus simplement encore dans les relations de la vie quotidienne[19].
Exemples de techniques parfois associées à la notion[modifier] Pavlov[modifier]Pavlov en explorant expérimentalement au début du XXe siècle des voies simples de conditionnement animal par la récompense ou la punition ouvre des perspectives de compréhension de certains réflexes comportementaux pouvant être déclenchés par des stimuli (il faisait tinter une cloche lorsque qu'il présentait à un chien de la nourriture). En répétant l'expérience le tintement de cloche déclenchait la salivation, même sans présentation de nourriture. Ce comportement – qu'il n'avait pas avant – est le résultat de ce conditionnement). Pavlov a démontré qu'on peut utiliser de nombreux stimuli et programmer de nombreuses réactions organiques réflexes. Ici, la répétition du stimulus est un facteur essentiel.
Méthode PDH[modifier]PDH signifie Douleur-Drogue-Hypnose (Pain, Drug and Hypnosis), et évoque une méthode qui aurait été utilisée en Corée du Nord sur les soldats prisonniers de guerre, par des psychiatres et les services secrets.
Projet MKULTRA[modifier]Le Projet MKULTRA (ou MK-ULTRA) fut le nom de code d'un projet de la CIA des années 1950 à 1970 visant à manipuler mentalement certaines personnes par l'injection de substances psychotropes. Face à l'échec de la méthode MKULTRA, tous les enregistrements ont été détruits en 1973, par ordre du directeur d'alors de la CIA, Richard Helms.
"MICE"[modifier]"MICE" (acronyme signifiant souris (pluriel) en anglais) : Money, Ideology, Compromise et Ego recense les leviers psychologiques que les services secrets, notamment pendant la Guerre froide auraient utilisés pour obtenir des informations ou la collaboration d'agents ennemis, "acheter" ses services, le convaincre, le compromettre (ou le rendre sexuellement dépendant) ou en le flattant, selon des protocoles inspirés d'études et d'expérimentations de psychologie.
Messages subliminaux[modifier]Article détaillé : Message subliminal.
Dès les années 1950, le développement du cinéma et de la télévision aurait été l'occasion de tester une méthode de manipulation mentale fondée sur l'insertion d'une image subliminale, c'est-à-dire si brièvement présente que l'on ne peut la percevoir consciemment. La théorie étant fondée sur le fait que l'inconscient en garderait néanmoins une trace, poussant à agir par la suite d'une manière prédéterminée (comme pour l'achat d'un produit spécifique, par exemple). L'image doit être simple et non équivoque (symbole, couleur, logo). La théorie, établie par James Vicary et Vance Packard, remet en cause la publicité.
Au cours de la campagne de l'élection présidentielle française de 1988, une image de François Mitterrand est apparue au cours du générique du journal d'Antenne 2, la seconde chaîne nationale. Le psychologue social Jean-Léon Beauvois, qui parle de « petit scandale », estime que ces « présentations subliminales [étaient] destinées à produire un effet dit de simple exposition dans les mois précédents l'élection de 1988 »[20].
Manipulation par l'angoisse et la violence[modifier]Le principe de base – étudié dans les années 1930 – soutient qu'un individu en état de peur manifesterait des réactions de fuite et d'évitement les plus primaires et donc les plus prévisibles. Les fonctions complexes du cerveau, n'offrant pas de solution immédiate, seraient désactivées, rendant l'individu manipulable dans une situation d'extrême angoisse. Le sujet terrorisé – comme l'animal poursuivi par le chasseur – ne pourrait éviter les pièges qu'on lui tend. La terreur fut effectivement utilisée depuis l’Antiquité pour assurer le pouvoir des despotes, par la « méthode par l'exemple » appuyée par les dénonciations, interrogatoires, enlèvements, disparitions et exécutions aléatoires, etc. mais l'Histoire montre que la méthode n'a jamais été longtemps efficace, se retournant généralement après quelques années ou décennies contre les manipulateurs.
Manipulation par la suggestion psychothérapeutique[modifier]Une autre forme de manipulation mentale est à l’œuvre dans certaines psychothérapies, notamment par les faux souvenirs induits. Ces thérapies sont, dans la littérature, appelées TMR, thérapies de la mémoire refoulée ou retrouvée. Les objectifs sont de retrouver à l'âge adulte des souvenirs d'abus sexuels « refoulés » (au sens freudien) survenus dans l'enfance. Dans certains cas, la façon dont la thérapie est conduite pourrait générer de faux souvenirs qui sembleraient pourtant très réels à la personne concernée.
Dans un article publié le 13 décembre 2008 dans les Dossiers de l'Observatoire Zététique, intitulé "Faux souvenirs et manipulation mentale", l’auteur Brigitte Axelrad[21] analyse comment la manipulation mentale conduit des patient(e)s en psychothérapie, qui avaient gardé de leur enfance le sentiment qu’ils ou elles avaient été heureux, à « retrouver » sous l’influence de leur thérapeute des souvenirs d’abus sexuel jusque là ignorés. L’article se réfère notamment aux expériences de Stanley Milgram (Soumission à l'autorité) et à l'ouvrage de Robert Cialdini (Influence et Manipulation).
Selon l'association CEDIF, la pratique des contes thérapeutiques serait susceptible de participer de la création de faux souvenirs induits par le biais de techniques telles que l'Hypnose ericksonienne[22].
Méthode chimique[modifier]L'utilisation à hautes doses d'antidépresseurs et de sédatifs ou de certaines drogues aurait selon certains pour effet de limiter les capacités cognitives et discriminantes du sujet, suffisamment pour le conditionner. Une littérature romanesque ou de science fiction évoque la possibilité de conditionner l'individu ainsi drogué, sans qu'il garde la trace des informations ou du conditionnement opéré. Divers régimes totalitaires ont néanmoins utilisé des produits chimiques pour mettre leurs victimes en état de peur et de souffrance ou dans le cadre de la torture.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Manipulation_mentale
Cette notion protéïforme est récente dans ses contours, dérivé de la théorie du « lavage de cerveau » encore mal connue. Juridiquement, on lui préfère la notion de sujétion psychologique, le plus souvent dans le cadre d’accusations de dérives sectaires ou d'action d'ingénierie sociale. Par extension, les techniques de manipulations de l'opinion publique ou de manipulations de masse sont l'ensemble des moyens d'influence exercés sur une population à des fins économiques, militaires ou politiques.
Une notion controversée[modifier]Selon Stéphane Laurens, maître de conférences, « L'influence interindividuelle ou l'influence sociale fascine et effraye. (...) les terribles faits divers qui lui sont attribués (Suicides collectifs, crimes rituels…) ainsi que de troublantes études scientifiques (Travaux sur l'hypnose, études expérimentales sur le conformisme ou soumission à l'autorité…) nous affirment l'existence d'une force quasiment irrésistible et qui pourrait nous pousser à faire ou à penser des choses que nous ne voudrions pas, une force qui pourrait même nous conduire à notre perte. Il y a, avec l'influence, l'idée d'une intrusion, d'un véritable viol de la conscience, de la volonté… qui semble pouvoir passer sous le contrôle ou la volonté d'un autre. Ce n'est plus moi qui veut ou qui agit, c'est la volonté d'un autre qui est entrée en moi et c'est un autre qui agit à travers moi (sentiment de possession) »[2].
Arnaud Esquerre, sociologue, pose les questions « Qu’est-ce qui distingue un consentement fabriqué d’un consentement non fabriqué par quelqu’un d’autre ? Qui est en position de faire la distinction ? Quels sont les signes même d’une manipulation mentale ? » concluant qu’elles restent sans réponse[3]. Pourtant, la notion de manipulation mentale est fréquemment utilisée.
La théorisation de la manipulation mentale (appelée mind control (contrôle mental) ou plus récemment thought reform (réforme de la pensée) dans les pays anglophones) est très liée à la question des sectes. Le psychiatre Jean-Marie Abgrall le souligne en disant que « sans manipulation mentale, il ne peut exister de sectes »[4].
Élément de compréhension essentiel de certaines dérives pour les uns, thèse réfutée pour les autres[5], la controverse n’est pas terminée.
Historique[modifier]Les théories de lavage de cerveau et de manipulation mentale sont issues des recherches sur les programmes de pays totalitaires afin d’expliquer par quelle propagande et quelles méthodes ils étaient parvenues à, apparemment, endoctriner par exemple des prisonniers[6] ,[7]. Ces théories ont par la suite été étendues à l’étude des conversions religieuses en particulier sous l’impulsion de Margaret Singer dès les années 1960.
Le débat[modifier]En France, estimant que la législation ne permettait plus de lutter efficacement contre les sectes, un nouveau délit de « manipulation mentale » avait été proposé dans le projet de Loi About-Picard de 2001, et défini ainsi : « Le fait, au sein d'un groupement qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer ou d'exploiter la dépendance psychologique ou psychique des personnes qui participent à ces activités, d'exercer sur l'une d'entre elles des pressions graves et réitérées ou d'utiliser des techniques propres à altérer son jugement afin de la conduire, contre son gré ou non, à un acte ou une abstention qui lui est gravement préjudiciable.»[8]
Mais les oppositions à cette création d’un nouveau délit furent nombreuses[9]. La Commission nationale consultative des droits de l'homme, présidée par Pierre Truche, ancien premier président de la Cour de cassation, avait été consultée à cette occasion et avait rendu son avis ainsi : « La création d'un délit spécifique de manipulation mentale ne nous paraît pas opportune»[10]. Les députés ont finalement retenu une formulation plus « consensuelle » qui consistait à compléter « l’abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de faiblesse » existant (article 313-4, livre III du code pénal)[11]
Pour Roland Campiche, directeur de l'Observatoire des religions à l'Université de Lausanne : « Les expertises américaines qui ont étudié cette notion ont conclu qu'elle n'avait pas de consistance, et que l'individu restait capable de discernement lorsqu'il était engagé dans une secte. Cela dit, on ne peut faire abstraction de l'exploitation par les sectes d'une faiblesse passagère d'une personne. Mais au-delà, la responsabilité de l'individu reste engagée. On vit dans une société où la responsabilité individuelle est fortement mise en valeur. Alors pourquoi les gens ne seraient-ils pas aussi responsables dans le domaine de la religion?»[12]
Au contraire, pour l'avocat François Bellanger, président du groupe d'experts genevois qui s'est penché sur la question, « La manipulation mentale est une réalité. Mais il est vrai que le sujet est extrêmement difficile à réglementer. Il faut distinguer entre la manipulation mentale quotidienne, car nous sommes tous manipulés à des degrés divers, par la publicité par exemple, et la manipulation criminelle. Pour que celle-ci ait lieu, il faut une action physique et psychique répétée et systématique sur autrui dans le dessein d'affaiblir sa capacité de jugement ou de le placer dans un état de dépendance »[12].
Danièle Hervieu-Léger, sociologue des religions à l'École des hautes études en sciences sociales à Paris, est opposée à la thèse de la manipulation, qui « postule que l'individu qui choisit d'entrer dans une secte n'exerce en fait aucune volonté autonome »[12].
Selon le bureau de l’American Psychological Association, la théorie de la manipulation mentale« manque de rigueur scientifique et d’approche critique » [13]
Étude des rouages de la manipulation mentale[modifier]Dans « la parole manipulée », Philippe Breton, s'interroge sur le processus de manipulation et la nature de la violence faite à autrui. Il reprend un exemple de Beauvois et Joule dans lequel « un père demande à son fils, occupé avec un ami, d’aller lui acheter des cigarettes. Le fils accepte en pensant que ce n’est pas grave, le bureau de tabac étant tout près. Le père lui annonce alors qu’aujourd’hui la boutique du coin de la rue est fermée, qu’il faut aller à une autre, bien plus éloignée. Le fils, qui était déjà sur le point de partir, obtempère et sort de la maison d’un air morose. Que s’est-il passé ? Le père savait que s’il demandait de but en blanc à son fils d’aller au magasin éloigné, ce dernier n’accepterait pas, car ce serait une trop grande perte de temps. La manipulation repose ici sur la dissimulation d’une information importante, lors d’une première demande, trompeuse, qui permet d’obtenir une première réponse positive (...) Mais en quoi est-ce une action violente ? On pourrait se dire que le fils n’aurait certes sans doute pas accepté de rendre service à son père sans stratagème caché; mais quand il le fait, où est la contrainte ? Son père n’a pas donné d’ordre, le fils ne semble pas obéir. Pourtant, il s’agit bien d’une violence psychologique: à la différence d’une violence physique, qui passe par une action explicite, la manipulation « " consiste à entrer par effraction dans l’esprit de quelqu’un pour y déposer une opinion ou provoquer un comportement sans que ce quelqu’un sache qu’il y a eu effraction. Tout est là, dans ce geste qui se cache à lui-même comme manipulatoire" »[14].
Manipulation mentale et dérives sectaires en France[modifier]Le procès d'Arnaud Mussy, du Néo-Phare, en 2004, fut considéré comme la première application de la loi About-Picard sur la manipulation mentale ou « sujétion psychologique »[15],[16].
Manipulation mentale et société[modifier]Denis Duclos, sociologue, exprime la tension qui existe autour de la notion de manipulation mentale quand elle est perçue comme localisée uniquement dans les sectes : « Plus nous forcerons les gens à (...) s’accorder à l’idéal d’une humanité réglée par le droit commercial universel et son substrat technologique (en ignorant le caractère foncièrement coercitif de cette pure gestion), plus nous nous exposerons à ouvrir des plaies que la secte viendra exploiter, en opposition complice avec sa grande sœur globale »[17]. Pour beaucoup, la notion semble applicable à toutes sortes d'activités légales, comme la publicité[18]par exemple, voire plus simplement encore dans les relations de la vie quotidienne[19].
Exemples de techniques parfois associées à la notion[modifier] Pavlov[modifier]Pavlov en explorant expérimentalement au début du XXe siècle des voies simples de conditionnement animal par la récompense ou la punition ouvre des perspectives de compréhension de certains réflexes comportementaux pouvant être déclenchés par des stimuli (il faisait tinter une cloche lorsque qu'il présentait à un chien de la nourriture). En répétant l'expérience le tintement de cloche déclenchait la salivation, même sans présentation de nourriture. Ce comportement – qu'il n'avait pas avant – est le résultat de ce conditionnement). Pavlov a démontré qu'on peut utiliser de nombreux stimuli et programmer de nombreuses réactions organiques réflexes. Ici, la répétition du stimulus est un facteur essentiel.
Méthode PDH[modifier]PDH signifie Douleur-Drogue-Hypnose (Pain, Drug and Hypnosis), et évoque une méthode qui aurait été utilisée en Corée du Nord sur les soldats prisonniers de guerre, par des psychiatres et les services secrets.
Projet MKULTRA[modifier]Le Projet MKULTRA (ou MK-ULTRA) fut le nom de code d'un projet de la CIA des années 1950 à 1970 visant à manipuler mentalement certaines personnes par l'injection de substances psychotropes. Face à l'échec de la méthode MKULTRA, tous les enregistrements ont été détruits en 1973, par ordre du directeur d'alors de la CIA, Richard Helms.
"MICE"[modifier]"MICE" (acronyme signifiant souris (pluriel) en anglais) : Money, Ideology, Compromise et Ego recense les leviers psychologiques que les services secrets, notamment pendant la Guerre froide auraient utilisés pour obtenir des informations ou la collaboration d'agents ennemis, "acheter" ses services, le convaincre, le compromettre (ou le rendre sexuellement dépendant) ou en le flattant, selon des protocoles inspirés d'études et d'expérimentations de psychologie.
Messages subliminaux[modifier]Article détaillé : Message subliminal.
Dès les années 1950, le développement du cinéma et de la télévision aurait été l'occasion de tester une méthode de manipulation mentale fondée sur l'insertion d'une image subliminale, c'est-à-dire si brièvement présente que l'on ne peut la percevoir consciemment. La théorie étant fondée sur le fait que l'inconscient en garderait néanmoins une trace, poussant à agir par la suite d'une manière prédéterminée (comme pour l'achat d'un produit spécifique, par exemple). L'image doit être simple et non équivoque (symbole, couleur, logo). La théorie, établie par James Vicary et Vance Packard, remet en cause la publicité.
Au cours de la campagne de l'élection présidentielle française de 1988, une image de François Mitterrand est apparue au cours du générique du journal d'Antenne 2, la seconde chaîne nationale. Le psychologue social Jean-Léon Beauvois, qui parle de « petit scandale », estime que ces « présentations subliminales [étaient] destinées à produire un effet dit de simple exposition dans les mois précédents l'élection de 1988 »[20].
Manipulation par l'angoisse et la violence[modifier]Le principe de base – étudié dans les années 1930 – soutient qu'un individu en état de peur manifesterait des réactions de fuite et d'évitement les plus primaires et donc les plus prévisibles. Les fonctions complexes du cerveau, n'offrant pas de solution immédiate, seraient désactivées, rendant l'individu manipulable dans une situation d'extrême angoisse. Le sujet terrorisé – comme l'animal poursuivi par le chasseur – ne pourrait éviter les pièges qu'on lui tend. La terreur fut effectivement utilisée depuis l’Antiquité pour assurer le pouvoir des despotes, par la « méthode par l'exemple » appuyée par les dénonciations, interrogatoires, enlèvements, disparitions et exécutions aléatoires, etc. mais l'Histoire montre que la méthode n'a jamais été longtemps efficace, se retournant généralement après quelques années ou décennies contre les manipulateurs.
Manipulation par la suggestion psychothérapeutique[modifier]Une autre forme de manipulation mentale est à l’œuvre dans certaines psychothérapies, notamment par les faux souvenirs induits. Ces thérapies sont, dans la littérature, appelées TMR, thérapies de la mémoire refoulée ou retrouvée. Les objectifs sont de retrouver à l'âge adulte des souvenirs d'abus sexuels « refoulés » (au sens freudien) survenus dans l'enfance. Dans certains cas, la façon dont la thérapie est conduite pourrait générer de faux souvenirs qui sembleraient pourtant très réels à la personne concernée.
Dans un article publié le 13 décembre 2008 dans les Dossiers de l'Observatoire Zététique, intitulé "Faux souvenirs et manipulation mentale", l’auteur Brigitte Axelrad[21] analyse comment la manipulation mentale conduit des patient(e)s en psychothérapie, qui avaient gardé de leur enfance le sentiment qu’ils ou elles avaient été heureux, à « retrouver » sous l’influence de leur thérapeute des souvenirs d’abus sexuel jusque là ignorés. L’article se réfère notamment aux expériences de Stanley Milgram (Soumission à l'autorité) et à l'ouvrage de Robert Cialdini (Influence et Manipulation).
Selon l'association CEDIF, la pratique des contes thérapeutiques serait susceptible de participer de la création de faux souvenirs induits par le biais de techniques telles que l'Hypnose ericksonienne[22].
Méthode chimique[modifier]L'utilisation à hautes doses d'antidépresseurs et de sédatifs ou de certaines drogues aurait selon certains pour effet de limiter les capacités cognitives et discriminantes du sujet, suffisamment pour le conditionner. Une littérature romanesque ou de science fiction évoque la possibilité de conditionner l'individu ainsi drogué, sans qu'il garde la trace des informations ou du conditionnement opéré. Divers régimes totalitaires ont néanmoins utilisé des produits chimiques pour mettre leurs victimes en état de peur et de souffrance ou dans le cadre de la torture.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Manipulation_mentale
insoumise- Nombre de messages : 1288
Date d'inscription : 28/02/2009
Sujets similaires
» Les dangers de la manipulation mentale
» Ecole Fou mentale!!!
» Arezqi At Hemmuc évoque une "colonisation mentale" des Kabyles
» La manipulation de l'opinion publique
» Infiltration et manipulation
» Ecole Fou mentale!!!
» Arezqi At Hemmuc évoque une "colonisation mentale" des Kabyles
» La manipulation de l'opinion publique
» Infiltration et manipulation
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum