Samia Shariff: une longue route vers la liberté
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Samia Shariff: une longue route vers la liberté
Lorsque Samia Shariff est entrée dans la salle, un murmure a parcouru l’assemblée. N’y avait-il pas erreur sur la personne? Maquillée, habillée à la mode occidentale, l’auteure du Voile de la peur se promenait tête nue. C’est pourtant une femme vêtue du niqab qui apparaît sur la couverture de son livre et qui fait d’habitude des apparitions médiatiques. C’est désormais fini.
«Ça y est, je pense que je suis faite pour commencer une autre vie et ne plus avoir peur. Je ne veux plus avoir peur.» Pour la première fois, elle a témoigné à visage découvert. Quant au maquillage prononcé, Samia se justifie, dans un grand éclat de rire. «Je sais… j’exagère un peu maintenant, parce que je fais ce que je veux!»
Lorsqu’elle parle, on entend chez elle une pointe d’accent québécois, comme si elle s’était complètement fondue dans son pays d’accueil, pour en faire, enfin, ce chez soi tant espéré.
Elle commence à raconter les horreurs de son passé sur un ton presque détaché, le sourire aux lèvres, comme mue par la force de l’habitude. Mais ce n’est qu’une apparence, car brusquement, les larmes surgissent, inattendues, lorsqu’elle évoque le rapt de son premier-né par sa mère.
«C’est très pénible de raconter chaque fois mon histoire, personne ne peut évoquer un tel passé et dire que cela ne lui fait plus rien. Pourquoi je suis souriante? Parce que je suis libre de le faire, j’ai envie de raconter mais pas tout… parce que c’est trop dur.»
Pourquoi continuer à se faire mal alors? «Je veux montrer aux gens d’ici la souffrance de certaines femmes musulmanes. C’est pour elles que je parle, et pour moi aussi. Car pour moi, c’est une sorte de vengeance envers ceux qui m’ont fait souffrir. Je suis maintenant libre d’en parler, d’écrire un livre.»
Aujourd’hui, malgré le souvenir de ses souffrances et l’amertume face à une France qui n’a pas su l’aider quand elle en aurait eu besoin, Samia Shariff essaie de profiter au maximum de sa nouvelle vie canadienne. Mais il n’est pas si aisé de tourner la page… «C’est sûr, je me sens mieux, je suis libre, je voyage… Mais parfois, je retourne en arrière. On ne réussit jamais à vraiment tourner la page. Les pages d’un livre font toujours partie du livre, on a beau les tourner et même fermer le livre, ces pages restent là.»
Samia Shariff reçoit parfois des lettres qui lui font chaud au coeur et lui rappellent à quel point son témoignage a pu être utile à d’autres. À des femmes musulmanes bien sûr, mais pas seulement! «Beaucoup de femmes, québécoises ou françaises, m’écrivent et me disent “Samia, depuis que j’ai lu ton livre, je ne vais plus chez mon psy, j’ai decouvert que les bobos que j’avais, c’était moi qui me les créais et je me suis sentie tout à coup guérie, j’ai compris que j’avais un mari formidable, une famille qui m’aimait!”»
En effet, le témoignage de Samia Shariff est si bouleversant qu’il permet de relativiser beaucoup de petits tracas et de prendre conscience de la valeur de notre liberté.
La liberté, comme la tolérance, sont des valeurs auxquelles Samia Shariff est profondément attachée. Et elle ne voit d’ailleurs pas d’un bon oeil les débats qui agitent actuellement le Québec. Elle a préparé un discours qu’elle lira le mois prochain, lorsque la commission Bouchard-Taylor s’arrêtera à Montréal. «Le mot-clé de ce discours est la tolérance. Les Québécois doivent vraiment comprendre que leurs immigrés ont une identité, une religion, une culture et un passé différentes, et les immigrés ne doivent pas non plus déranger les Québécois. Quand on arrive, on n’est pas encore Québécois ou Canadien, on est comme un invité.»
Si Samia Shariff s’inquiète des demandes exagérées de certaines communautés, elle est encore plus alarmée par les commentaires racistes entendus lors des audiences de la commission. «Cela me rappelle la France et me fait très peur. Quand je suis arrivée il y a six ans, on n’entendait pas ces commentaires, maintenant on les crie fort. Et moi, je n’ai pas envie de voir un Jean-Marie Le Pen ici!»
Aujourd’hui, Samia Shariff a trouvé sa place au Québec et prépare un nouveau livre. Son prochain souhait: fonder une association qui aiderait les femmes musulmanes en difficultés.
En quelques mots
Samia Shariff (le nom est un pseudonyme) a vécu la peur au ventre presque toute sa vie.
En 1959, elle naît en France dans une riche famille algérienne. Mal-aimée, maltraitée, elle suit sa famille en Algérie à l’âge de sept ans. À 16 ans, elle est mariée de force à un intégriste qui la bat et abuse d’elle. Pendant des années, entre France et Algérie, elle subira les violences physiques et psychologiques de son mari, de sa famille et d’inconnus, dans une Algérie qui a sombré dans le terrorisme.
Évadée d’Algérie avec ses cinq enfants, elle vivra des mois d’errance dans une France peu accueillante, pour enfin poser ses valises à Montréal en 2001. En 2006, elle publie Le Voile de la peur. Elle précise que le titre de son témoignage ne vise pas à incriminer le voile mais qu’il rappelle que, sous son voile, elle tremblait de peur
«Ça y est, je pense que je suis faite pour commencer une autre vie et ne plus avoir peur. Je ne veux plus avoir peur.» Pour la première fois, elle a témoigné à visage découvert. Quant au maquillage prononcé, Samia se justifie, dans un grand éclat de rire. «Je sais… j’exagère un peu maintenant, parce que je fais ce que je veux!»
Lorsqu’elle parle, on entend chez elle une pointe d’accent québécois, comme si elle s’était complètement fondue dans son pays d’accueil, pour en faire, enfin, ce chez soi tant espéré.
Elle commence à raconter les horreurs de son passé sur un ton presque détaché, le sourire aux lèvres, comme mue par la force de l’habitude. Mais ce n’est qu’une apparence, car brusquement, les larmes surgissent, inattendues, lorsqu’elle évoque le rapt de son premier-né par sa mère.
«C’est très pénible de raconter chaque fois mon histoire, personne ne peut évoquer un tel passé et dire que cela ne lui fait plus rien. Pourquoi je suis souriante? Parce que je suis libre de le faire, j’ai envie de raconter mais pas tout… parce que c’est trop dur.»
Pourquoi continuer à se faire mal alors? «Je veux montrer aux gens d’ici la souffrance de certaines femmes musulmanes. C’est pour elles que je parle, et pour moi aussi. Car pour moi, c’est une sorte de vengeance envers ceux qui m’ont fait souffrir. Je suis maintenant libre d’en parler, d’écrire un livre.»
Aujourd’hui, malgré le souvenir de ses souffrances et l’amertume face à une France qui n’a pas su l’aider quand elle en aurait eu besoin, Samia Shariff essaie de profiter au maximum de sa nouvelle vie canadienne. Mais il n’est pas si aisé de tourner la page… «C’est sûr, je me sens mieux, je suis libre, je voyage… Mais parfois, je retourne en arrière. On ne réussit jamais à vraiment tourner la page. Les pages d’un livre font toujours partie du livre, on a beau les tourner et même fermer le livre, ces pages restent là.»
Samia Shariff reçoit parfois des lettres qui lui font chaud au coeur et lui rappellent à quel point son témoignage a pu être utile à d’autres. À des femmes musulmanes bien sûr, mais pas seulement! «Beaucoup de femmes, québécoises ou françaises, m’écrivent et me disent “Samia, depuis que j’ai lu ton livre, je ne vais plus chez mon psy, j’ai decouvert que les bobos que j’avais, c’était moi qui me les créais et je me suis sentie tout à coup guérie, j’ai compris que j’avais un mari formidable, une famille qui m’aimait!”»
En effet, le témoignage de Samia Shariff est si bouleversant qu’il permet de relativiser beaucoup de petits tracas et de prendre conscience de la valeur de notre liberté.
La liberté, comme la tolérance, sont des valeurs auxquelles Samia Shariff est profondément attachée. Et elle ne voit d’ailleurs pas d’un bon oeil les débats qui agitent actuellement le Québec. Elle a préparé un discours qu’elle lira le mois prochain, lorsque la commission Bouchard-Taylor s’arrêtera à Montréal. «Le mot-clé de ce discours est la tolérance. Les Québécois doivent vraiment comprendre que leurs immigrés ont une identité, une religion, une culture et un passé différentes, et les immigrés ne doivent pas non plus déranger les Québécois. Quand on arrive, on n’est pas encore Québécois ou Canadien, on est comme un invité.»
Si Samia Shariff s’inquiète des demandes exagérées de certaines communautés, elle est encore plus alarmée par les commentaires racistes entendus lors des audiences de la commission. «Cela me rappelle la France et me fait très peur. Quand je suis arrivée il y a six ans, on n’entendait pas ces commentaires, maintenant on les crie fort. Et moi, je n’ai pas envie de voir un Jean-Marie Le Pen ici!»
Aujourd’hui, Samia Shariff a trouvé sa place au Québec et prépare un nouveau livre. Son prochain souhait: fonder une association qui aiderait les femmes musulmanes en difficultés.
En quelques mots
Samia Shariff (le nom est un pseudonyme) a vécu la peur au ventre presque toute sa vie.
En 1959, elle naît en France dans une riche famille algérienne. Mal-aimée, maltraitée, elle suit sa famille en Algérie à l’âge de sept ans. À 16 ans, elle est mariée de force à un intégriste qui la bat et abuse d’elle. Pendant des années, entre France et Algérie, elle subira les violences physiques et psychologiques de son mari, de sa famille et d’inconnus, dans une Algérie qui a sombré dans le terrorisme.
Évadée d’Algérie avec ses cinq enfants, elle vivra des mois d’errance dans une France peu accueillante, pour enfin poser ses valises à Montréal en 2001. En 2006, elle publie Le Voile de la peur. Elle précise que le titre de son témoignage ne vise pas à incriminer le voile mais qu’il rappelle que, sous son voile, elle tremblait de peur
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Date d'inscription : 30/01/2009
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http://www.lexpress.to/archives/1910/
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