À propos de l'affaire Aboud Hichem
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À propos de l'affaire Aboud Hichem
Que reproche-t-on exactement à Aboud Hichem ? D’avoir donné une fausse information ou d’avoir divulgué, trop tôt, une vraie information ?
Hichem Aboud Et nous revoilà dans la machine à remonter le temps, à l’époque du procureur fouettard et du juge coupeur de langue ! Nous avons cru avoir chassé le naturel, le reflexe de l’interdit, mais le voilà qui revient au galop ! Au XXIe siècle, à l’heure d’Internet et des tweets, deux journaux sont saisis pour avoir évoqué la maladie du président de la république tandis que leur directeur est poursuivi pour des propos jugés outrageants pour l'Etat, tenus dans des médias étrangers. La justice algérienne a retrouvé cette célérité à s’autosaisir qui a fait sa réputation et qui, disons-le, a de quoi faire pâlir de jalousie le Jamaicain Usain Bolt. Où étaient donc ces sprinters en robe noire lorsque Le Matin dévoilait le pillage de Sonatrach ?
La répression qui frappe les deux journaux d’Aboud Hichem est annonciatrice d’un retour de l’inquisition moyenâgeuse. En d’autres temps, l’arbitraire ne se serait pas déroulé dans un si saisissant silence de la corporation. Mais il semble bien qu’ils ont choisi leur moment et leur victime. La presse algérienne, au mépris de ce qu’elle représente et dans une totale indifférence à la grandeur qu’elle est censée porter, se complaît dans le désintéressement et l’insensibilité. La victime, elle, est un personnage controversé, un peu barbouze, un peu journaliste, et dont nos censeurs savent qu’il a fait le vide autour de lui. Mais alors, faut-il une fois de plus, prendre la posture des trois singes sous prétexte que le directeur de ces journaux censurés passe pour un homme peu recommandable ? Les partisans de l’apathie ne manqueront jamais d’arguments pour justifier leur démission.
L’auteur de ces lignes, emprisonné par la mafia qui dirige ce pays, en sait quelque chose, lui à qui de courageux confrères ont fabriqué une fortune de milliardaire, un statut d’importateur de légumes secs et bien d’autres fadaises aussi burlesques les unes que les autres mais qui ont servi aux capitulards pour justifier leur capitulation, et aux plus fourbes, leur complicité avec les geôliers. Aboud Hichem, au demeurant, compta parmi les architectes les plus zélés de cette opération de dénigrement. Mais quoi, serions-nous condamnés à regarder éternellement notre nombril aux dépens de cette profession de plus en plus orpheline ? Dans cette affaire, il ne s’agit pas de défendre un homme, mais un principe basique : le droit pour un journal de publier des informations sensibles que le régime a réservées pour son seul usage.
Que reproche-t-on exactement à Aboud Hichem ? D’avoir donné une fausse information ou d’avoir divulgué, trop tôt, une vraie information ? Ce paradoxe propre aux États bananiers, il fut expérimenté sur notre propre chair en août 1992, date de notre première suspension, au Matin. Elle dura deux mois et faillit nous emporter. Un chef du gouvernement très ombrageux et assez imbu de sa personne, Belaïd Abdesslam, un dinosaure du parti unique nous punissait pour avoir donné une information vraie … mais embarrassante pour le pouvoir : l'arrestation du chef du Groupe islamiste armé (GIA), Abdelkader Chebouti. Nous étions encore assez naïfs pour ignorer qu'il en coûtait parfois davantage pour un journal, de publier une information vraie que de donner une nouvelle fausse. Depuis, l'énigme est restée entière : plus personne n'entendit parler de Chebouti. Qui était-il ? C'est à ces mystères qu'on reconnaît la brillante complexité de la politique algérienne.
Alors, pour revenir au cas qui nous concerne, concédons l'hypothèse que l'information selon laquelle le président Bouteflika se trouverait dans un état comateux n'arrange pas les états-majors de la combinaison politicienne qui ont besoin de temps pour leur cuisine interne. Il n’est pas exclu, non plus, que les informateurs de Aboud Hichem soient eux-mêmes inscrits dans une lutte d’appareils, au sein d’un clan opposé aux états-majors de la combinaison politicienne, avec un intérêt inverse, celui de précipiter les choses. Mais tout cela ne prime en rien dans la réaction que nous devons avoir en tant que journalistes. Un confrère, fût-il d'une traçabilité douteuse et de mœurs suspectes, a jugé utile de jeter sur la place publique une information que le sérail voulait garder pour lui : c’est tout ce que je retiens de l’affaire Aboud Hichem. Et pour cette seule raison, infime aux yeux des uns, discutable aux yeux des autres, lui et son équipe rédactionnelle ont droit à toute notre solidarité.
M. B.
Hichem Aboud Et nous revoilà dans la machine à remonter le temps, à l’époque du procureur fouettard et du juge coupeur de langue ! Nous avons cru avoir chassé le naturel, le reflexe de l’interdit, mais le voilà qui revient au galop ! Au XXIe siècle, à l’heure d’Internet et des tweets, deux journaux sont saisis pour avoir évoqué la maladie du président de la république tandis que leur directeur est poursuivi pour des propos jugés outrageants pour l'Etat, tenus dans des médias étrangers. La justice algérienne a retrouvé cette célérité à s’autosaisir qui a fait sa réputation et qui, disons-le, a de quoi faire pâlir de jalousie le Jamaicain Usain Bolt. Où étaient donc ces sprinters en robe noire lorsque Le Matin dévoilait le pillage de Sonatrach ?
La répression qui frappe les deux journaux d’Aboud Hichem est annonciatrice d’un retour de l’inquisition moyenâgeuse. En d’autres temps, l’arbitraire ne se serait pas déroulé dans un si saisissant silence de la corporation. Mais il semble bien qu’ils ont choisi leur moment et leur victime. La presse algérienne, au mépris de ce qu’elle représente et dans une totale indifférence à la grandeur qu’elle est censée porter, se complaît dans le désintéressement et l’insensibilité. La victime, elle, est un personnage controversé, un peu barbouze, un peu journaliste, et dont nos censeurs savent qu’il a fait le vide autour de lui. Mais alors, faut-il une fois de plus, prendre la posture des trois singes sous prétexte que le directeur de ces journaux censurés passe pour un homme peu recommandable ? Les partisans de l’apathie ne manqueront jamais d’arguments pour justifier leur démission.
L’auteur de ces lignes, emprisonné par la mafia qui dirige ce pays, en sait quelque chose, lui à qui de courageux confrères ont fabriqué une fortune de milliardaire, un statut d’importateur de légumes secs et bien d’autres fadaises aussi burlesques les unes que les autres mais qui ont servi aux capitulards pour justifier leur capitulation, et aux plus fourbes, leur complicité avec les geôliers. Aboud Hichem, au demeurant, compta parmi les architectes les plus zélés de cette opération de dénigrement. Mais quoi, serions-nous condamnés à regarder éternellement notre nombril aux dépens de cette profession de plus en plus orpheline ? Dans cette affaire, il ne s’agit pas de défendre un homme, mais un principe basique : le droit pour un journal de publier des informations sensibles que le régime a réservées pour son seul usage.
Que reproche-t-on exactement à Aboud Hichem ? D’avoir donné une fausse information ou d’avoir divulgué, trop tôt, une vraie information ? Ce paradoxe propre aux États bananiers, il fut expérimenté sur notre propre chair en août 1992, date de notre première suspension, au Matin. Elle dura deux mois et faillit nous emporter. Un chef du gouvernement très ombrageux et assez imbu de sa personne, Belaïd Abdesslam, un dinosaure du parti unique nous punissait pour avoir donné une information vraie … mais embarrassante pour le pouvoir : l'arrestation du chef du Groupe islamiste armé (GIA), Abdelkader Chebouti. Nous étions encore assez naïfs pour ignorer qu'il en coûtait parfois davantage pour un journal, de publier une information vraie que de donner une nouvelle fausse. Depuis, l'énigme est restée entière : plus personne n'entendit parler de Chebouti. Qui était-il ? C'est à ces mystères qu'on reconnaît la brillante complexité de la politique algérienne.
Alors, pour revenir au cas qui nous concerne, concédons l'hypothèse que l'information selon laquelle le président Bouteflika se trouverait dans un état comateux n'arrange pas les états-majors de la combinaison politicienne qui ont besoin de temps pour leur cuisine interne. Il n’est pas exclu, non plus, que les informateurs de Aboud Hichem soient eux-mêmes inscrits dans une lutte d’appareils, au sein d’un clan opposé aux états-majors de la combinaison politicienne, avec un intérêt inverse, celui de précipiter les choses. Mais tout cela ne prime en rien dans la réaction que nous devons avoir en tant que journalistes. Un confrère, fût-il d'une traçabilité douteuse et de mœurs suspectes, a jugé utile de jeter sur la place publique une information que le sérail voulait garder pour lui : c’est tout ce que je retiens de l’affaire Aboud Hichem. Et pour cette seule raison, infime aux yeux des uns, discutable aux yeux des autres, lui et son équipe rédactionnelle ont droit à toute notre solidarité.
M. B.
Azul- Nombre de messages : 29959
Date d'inscription : 09/07/2008
Re: À propos de l'affaire Aboud Hichem
http://www.lematindz.net/news/11794-a-propos-de-laffaire-aboud-hicham.html
Azul- Nombre de messages : 29959
Date d'inscription : 09/07/2008
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