«En Tunisie, les femmes se sentent menacées»
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«En Tunisie, les femmes se sentent menacées»
ÉMOIGNAGE - La jeune blogueuse Lina Ben Mhenni*, icône de la « révolution de jasmin », manifeste lundi soir à Tunis pour le retrait d'un projet d'article de la Constitution qui revient sur le principe d'égalité des sexes.
Lina Ben Mhenni. Crédit: Jilian Cyork, CC
Lina Ben Mhenni. Crédit: Jilian Cyork, CC
LE FIGARO. - Allez-vous participer à la manifestation ce soir?
Lina Ben Mhenni. - Bien sûr! Le 13 août, c'est la Journée nationale de la femme tunisienne. Cela correspond à l'anniversaire de la promulgation du Code de statut personnel (une série de lois édictées après l'indépendance en 1956 par le président Bourguiba pour instaurer l'égalité juridique entre l'homme et la femme dans plusieurs domaines, NDRL ), que l'on fête chaque année. Mais aujourd'hui n'est pas une fête. Le droit des femmes est de plus en plus menacé par Ennahda, le parti islamiste qui est au pouvoir en Tunisie depuis octobre 2011. Actuellement, le débat porte sur le projet de l'article 28 de la Constitution, qui se réfère non pas à «l'égalité» mais à la «complémentarité» entre la femme et l'homme. Il faut absolument retirer cet article. On ne sait pas comment le gouvernement pourrait l'utiliser. Ça pourrait très bien être une première étape avant de légaliser la polygamie par exemple. Sous Ben Ali, on luttait pour faire progresser le droit des femmes, notamment pour obtenir l'égalité devant l'héritage. Aujourd'hui, on doit se battre juste pour préserver nos acquis. C'est une véritable régression!
La situation des femmes s'est-elle déjà détériorée depuis l'arrivée au pouvoir des islamistes?
Les femmes se sentent menacées, elles hésitent à se balader dans la rue en robe. Les mêmes policiers qui attaquaient les femmes voilées sous Ben Ali s'en prennent aujourd'hui aux filles en jupes! Alors qu'il n'y a aucune loi obligeant les femmes à se couvrir, celles qui portent une jupe un peu courte peuvent se retrouver au commissariat. En juin, l'actrice Rym el-Banna s'est fait agresser et traiter de «pute» par des policiers parce qu'elle portait une robe de plage.
Craignez-vous une répression policière violente ce soir?
C'est très possible. La répression est de retour: jeudi dernier, une quarantaine de personnes ont été arrêtées après la manifestation à Sidi Bouzid, parmi lesquels des mineurs! Moi-même, j'ai été tabassée par dix policiers la semaine dernière lors d'une manifestation pacifique contre le gouvernement à Tunis. Les policiers risquent d'autant plus d'être agressifs que certains manifestants, dont je fais partie, vont marcher sur l'avenue Bourguiba et non pas sur l'artère Mohammed V, qui est le seul itinéraire autorisé par le ministère de l'Intérieur. Mais le parcours autorisé est exactement le même que celui qu'on avait le droit d'emprunter sous Ben Ali, quand on organisait des manifestations propalestiniennes par exemple! Si les gens sont morts pendant la révolution, c'est pour que l'on puisse manifester librement. Si je ressors dans la rue aujourd'hui, c'est pour dire qu'il y a des gens qui résistent contre cette nouvelle dictature, qui ne baissent pas les bras.
* Lina Ben Mhenni a activement participé à la «révolution de jasmin» en appelant sans relâche au soulèvement sur son blog «A Tunisian Girl». Le nom de cette professeur d'anglais de 29 ans avait été cité en 2011 pour le prix Nobel de la paix. Elle est désormais éditée en France (A Tunisian Girl, Indigènes éditions).
Lina Ben Mhenni. Crédit: Jilian Cyork, CC
Lina Ben Mhenni. Crédit: Jilian Cyork, CC
LE FIGARO. - Allez-vous participer à la manifestation ce soir?
Lina Ben Mhenni. - Bien sûr! Le 13 août, c'est la Journée nationale de la femme tunisienne. Cela correspond à l'anniversaire de la promulgation du Code de statut personnel (une série de lois édictées après l'indépendance en 1956 par le président Bourguiba pour instaurer l'égalité juridique entre l'homme et la femme dans plusieurs domaines, NDRL ), que l'on fête chaque année. Mais aujourd'hui n'est pas une fête. Le droit des femmes est de plus en plus menacé par Ennahda, le parti islamiste qui est au pouvoir en Tunisie depuis octobre 2011. Actuellement, le débat porte sur le projet de l'article 28 de la Constitution, qui se réfère non pas à «l'égalité» mais à la «complémentarité» entre la femme et l'homme. Il faut absolument retirer cet article. On ne sait pas comment le gouvernement pourrait l'utiliser. Ça pourrait très bien être une première étape avant de légaliser la polygamie par exemple. Sous Ben Ali, on luttait pour faire progresser le droit des femmes, notamment pour obtenir l'égalité devant l'héritage. Aujourd'hui, on doit se battre juste pour préserver nos acquis. C'est une véritable régression!
La situation des femmes s'est-elle déjà détériorée depuis l'arrivée au pouvoir des islamistes?
Les femmes se sentent menacées, elles hésitent à se balader dans la rue en robe. Les mêmes policiers qui attaquaient les femmes voilées sous Ben Ali s'en prennent aujourd'hui aux filles en jupes! Alors qu'il n'y a aucune loi obligeant les femmes à se couvrir, celles qui portent une jupe un peu courte peuvent se retrouver au commissariat. En juin, l'actrice Rym el-Banna s'est fait agresser et traiter de «pute» par des policiers parce qu'elle portait une robe de plage.
Craignez-vous une répression policière violente ce soir?
C'est très possible. La répression est de retour: jeudi dernier, une quarantaine de personnes ont été arrêtées après la manifestation à Sidi Bouzid, parmi lesquels des mineurs! Moi-même, j'ai été tabassée par dix policiers la semaine dernière lors d'une manifestation pacifique contre le gouvernement à Tunis. Les policiers risquent d'autant plus d'être agressifs que certains manifestants, dont je fais partie, vont marcher sur l'avenue Bourguiba et non pas sur l'artère Mohammed V, qui est le seul itinéraire autorisé par le ministère de l'Intérieur. Mais le parcours autorisé est exactement le même que celui qu'on avait le droit d'emprunter sous Ben Ali, quand on organisait des manifestations propalestiniennes par exemple! Si les gens sont morts pendant la révolution, c'est pour que l'on puisse manifester librement. Si je ressors dans la rue aujourd'hui, c'est pour dire qu'il y a des gens qui résistent contre cette nouvelle dictature, qui ne baissent pas les bras.
* Lina Ben Mhenni a activement participé à la «révolution de jasmin» en appelant sans relâche au soulèvement sur son blog «A Tunisian Girl». Le nom de cette professeur d'anglais de 29 ans avait été cité en 2011 pour le prix Nobel de la paix. Elle est désormais éditée en France (A Tunisian Girl, Indigènes éditions).
Madona- Nombre de messages : 3426
Date d'inscription : 30/01/2009
Re: «En Tunisie, les femmes se sentent menacées»
http://www.lefigaro.fr/international/2012/08/13/01003-20120813ARTFIG00352-en-tunisie-les-femmes-se-sentent-menacees.php?cmtpage=5
Madona- Nombre de messages : 3426
Date d'inscription : 30/01/2009
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