Béjaïa, mer, terre, vallées et montagnes
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Béjaïa, mer, terre, vallées et montagnes
Béjaïa, mer, terre, vallées et montagnes
Une géographie et une histoire aux dimensions de l’homme
La géographie et les vestiges historiques de Bougie et de sa région ont émerveillé des historiens, des géographes, des hommes de lettres et même des soldats et officiers de l’armée coloniale. Et comment ne pas l’être devant cette cité aux fragrances antiques, médiévales et contemporaines à la fois ? Comment peut-on rester indifférent face à Yemma Gouraya, Aïn Boukhlil et Sidi Touati ? Il faudrait redoubler d’ingéniosité et fouiner dans son lexique pour qualifier la Casbah, la Vieille ville, Bab Ellouz, Acherchour, Bordj Moussa.
La ville des deux saintes, Lalla Gouraya et Lalla Yamina, deux rivales gardiennes de la cité, abritait déjà une université, Sidi Touati, où des filles présentaient des thèses de mathématiques et d’astronomie.
Le Fort de Gouraya, qui reçoit des visiteurs toute l’année, est l’un des vestiges espagnols du XIVe siècle situé à 672 m d’altitude.
Du temps où elle était la capitale des Hammadites au XIIe siècle, Béjaïa compterait cent mille habitants, un chiffre énorme pour l’époque considérée. Les observateurs avertis ou les visiteurs occasionnels ne peuvent pas faire abstraction du reste du territoire de cette belle et généreuse partie de la Kabylie. Depuis la haute vallée de la Soummam, enserrée entre le Djurdjura et les Bibans (Aït Abbas, Aït Melikech, Aït Waghlis), jusqu’au domaine drainé par Oued Agrioun (Tamrijt, Darguina), en passant par Adekar, Taourirt Ighil, Toudja, Tichy, Aokas, Souk El Tenine, tout ce vaste pays kabyle, fait de monts, de vallons et de côtes, a fait l’objet d’intérêt qui lui a valu éloges, descriptions minutieuses et études de la part de voyageurs missionnaires connus ou de simples visiteurs frappés par la beauté et l’histoire des lieux. ةloges portant sur les sites, les hommes, les constructions. Qui n’aurait pas le vertige mérité, lorsque, perché sur Adrar Takoucht, à 1896 m d’altitude, juste à côté d’Ighil Izegoughène, il aperçoit la vastitude de la Méditerranée et les autres pitons dressés plus bas (Abladh Amellal, Adrar Djemaâ n’Siah). Pauvre est également celui qui n’a pas humé l’air de Boussellam à Tamokra, El Maïn, Tansaout, Aguemmoun n’Ath Aïssa et les thermes de Hammam Sidi Yahia. Que dire alors de celui à qui la chance n’a pas souri pour connaître la forêt de l’Akfadou, Adekar et les pentes ardues d’Aït Maâmar, Aït Idir et Adrar Ouchiouène ?
Outre la beauté des reliefs et des couverts végétaux, certains missionnaires avaient des raisons particulières de s’intéresser de près à cette partie importante et stratégique de la Kabylie. Nous pensons ici aux militaires français qui, déjà avant la conquête coloniale, ont parcouru ces espaces en vue d’en faire la connaissance la plus scrupuleuse possible aussi bien sur l’aspect physique (montagnes, rivières, forêts, régime hydrique) que sur le plan ethnologique, historique et culturel. Ces missionnaires avaient bien leurs objectifs stratégiques qui fondent leur connaissance du terrain et des hommes qu’ils allaient coloniser et soumettre. C’est paradoxalement pour cette raison que leur relation et leur récit sont très proches de la vérité. On n’a pas le droit de se tromper sur la transmission de l’information lorsqu’on prépare le terrain à l’installation des troupes.
Le golfe de Bougie, une merveilleuse perle
Officier de Génie au corps royal d’état-major, le capitaine Carette fit une description de Bougie et de sa région pendant la période allant de 1830 à 1833. Venant de Djidjelli (Jijel) et dépassant l’ex-Cavallo (El Aouana), le capitaine Carette écrit dans son journal : «Rien de plus imposant que le spectacle de la côte lorsqu’on a dépassé le cap Cavallo et qu’on pénètre dans le golfe de Bougie. Un vaste amphithéâtre de hautes montagnes apparaît dans l’enfoncement ; presque toutes ont leur sommet hérissé de roches nues ; quelques-unes conservent de la neige jusqu’au mois de juin. Au-dessous de la zone de roches et des neiges, règne un large bandeau de forêts. Au-dessous encore, commence la zone des vergers ; enfin la culture des potagers et des céréales occupe les déclivités inférieures. Quelques accidents remarquables se détachent sur ce fond majestueux. ہ l’Est, c’est le Babor, aplati en forme de table, au sommet sillonné de rides profondes sur les flancs. Au centre c’est le Kendirou, habité par une tribu de mineurs qui exploitent de riches gisements de fer. ہ l’Ouest, c’est le Toudja au pied duquel s’élève de beaux villages construits dans une forêt d’orangers.
Il se produit en entrant dans le golfe de Bougie une illusion qui fait que quelques arbres élevés, situés à fleur d’eau, s’éloignent par l’effet du mirage prêtant à la baie une profondeur immense. Mais, à mesure que l’on se rapproche de Bougie, l’illusion se dissipe et golfe montre dans leur réalité sa forme et son étendue. Enfin, on arrive au mouillage, on se trouve alors au pied des roches grises du Gouraya, en face d’un groupe de maisons blanches séparées par des massifs de vergers. C’est un des plus illustres débris de la grandeur musulmane en Afrique et la capitale actuelle de la Kabylie. La ville et le port de Bougie occupent le segment occidental de l’hémicycle que dessine le golfe».
Arrivé à Bougie-ville, Carette concentre toute son attention sur le mont Gouraya et le Cap Carbon, véritables joyaux de la nature dominant l’ancienne capitale des Hammadites. Depuis Cap Bouak, jouxtant l’avant-port, les Aiguades, Pointe noire, jusqu’à l’emplacement du phare sur Cap Carbon, le capitaine s’est arrêté sur les moindres détails rencontrés et sur toutes curiosités aperçues. Sur les cimes du Gouraya, il donne libre cours à ses capacités de description pour rapporter ce qui lui apparaît comme une merveille de la nature : la plaine de Bougie fendue par l’embouchure de la Soummam, Adrar Ufernu surplombant Boulimat et faisant face à Adrar Aghbalou (Toudja) et les villages sertissant tous ces flancs de montagnes.
Une géographie et une histoire aux dimensions de l’homme
La géographie et les vestiges historiques de Bougie et de sa région ont émerveillé des historiens, des géographes, des hommes de lettres et même des soldats et officiers de l’armée coloniale. Et comment ne pas l’être devant cette cité aux fragrances antiques, médiévales et contemporaines à la fois ? Comment peut-on rester indifférent face à Yemma Gouraya, Aïn Boukhlil et Sidi Touati ? Il faudrait redoubler d’ingéniosité et fouiner dans son lexique pour qualifier la Casbah, la Vieille ville, Bab Ellouz, Acherchour, Bordj Moussa.
La ville des deux saintes, Lalla Gouraya et Lalla Yamina, deux rivales gardiennes de la cité, abritait déjà une université, Sidi Touati, où des filles présentaient des thèses de mathématiques et d’astronomie.
Le Fort de Gouraya, qui reçoit des visiteurs toute l’année, est l’un des vestiges espagnols du XIVe siècle situé à 672 m d’altitude.
Du temps où elle était la capitale des Hammadites au XIIe siècle, Béjaïa compterait cent mille habitants, un chiffre énorme pour l’époque considérée. Les observateurs avertis ou les visiteurs occasionnels ne peuvent pas faire abstraction du reste du territoire de cette belle et généreuse partie de la Kabylie. Depuis la haute vallée de la Soummam, enserrée entre le Djurdjura et les Bibans (Aït Abbas, Aït Melikech, Aït Waghlis), jusqu’au domaine drainé par Oued Agrioun (Tamrijt, Darguina), en passant par Adekar, Taourirt Ighil, Toudja, Tichy, Aokas, Souk El Tenine, tout ce vaste pays kabyle, fait de monts, de vallons et de côtes, a fait l’objet d’intérêt qui lui a valu éloges, descriptions minutieuses et études de la part de voyageurs missionnaires connus ou de simples visiteurs frappés par la beauté et l’histoire des lieux. ةloges portant sur les sites, les hommes, les constructions. Qui n’aurait pas le vertige mérité, lorsque, perché sur Adrar Takoucht, à 1896 m d’altitude, juste à côté d’Ighil Izegoughène, il aperçoit la vastitude de la Méditerranée et les autres pitons dressés plus bas (Abladh Amellal, Adrar Djemaâ n’Siah). Pauvre est également celui qui n’a pas humé l’air de Boussellam à Tamokra, El Maïn, Tansaout, Aguemmoun n’Ath Aïssa et les thermes de Hammam Sidi Yahia. Que dire alors de celui à qui la chance n’a pas souri pour connaître la forêt de l’Akfadou, Adekar et les pentes ardues d’Aït Maâmar, Aït Idir et Adrar Ouchiouène ?
Outre la beauté des reliefs et des couverts végétaux, certains missionnaires avaient des raisons particulières de s’intéresser de près à cette partie importante et stratégique de la Kabylie. Nous pensons ici aux militaires français qui, déjà avant la conquête coloniale, ont parcouru ces espaces en vue d’en faire la connaissance la plus scrupuleuse possible aussi bien sur l’aspect physique (montagnes, rivières, forêts, régime hydrique) que sur le plan ethnologique, historique et culturel. Ces missionnaires avaient bien leurs objectifs stratégiques qui fondent leur connaissance du terrain et des hommes qu’ils allaient coloniser et soumettre. C’est paradoxalement pour cette raison que leur relation et leur récit sont très proches de la vérité. On n’a pas le droit de se tromper sur la transmission de l’information lorsqu’on prépare le terrain à l’installation des troupes.
Le golfe de Bougie, une merveilleuse perle
Officier de Génie au corps royal d’état-major, le capitaine Carette fit une description de Bougie et de sa région pendant la période allant de 1830 à 1833. Venant de Djidjelli (Jijel) et dépassant l’ex-Cavallo (El Aouana), le capitaine Carette écrit dans son journal : «Rien de plus imposant que le spectacle de la côte lorsqu’on a dépassé le cap Cavallo et qu’on pénètre dans le golfe de Bougie. Un vaste amphithéâtre de hautes montagnes apparaît dans l’enfoncement ; presque toutes ont leur sommet hérissé de roches nues ; quelques-unes conservent de la neige jusqu’au mois de juin. Au-dessous de la zone de roches et des neiges, règne un large bandeau de forêts. Au-dessous encore, commence la zone des vergers ; enfin la culture des potagers et des céréales occupe les déclivités inférieures. Quelques accidents remarquables se détachent sur ce fond majestueux. ہ l’Est, c’est le Babor, aplati en forme de table, au sommet sillonné de rides profondes sur les flancs. Au centre c’est le Kendirou, habité par une tribu de mineurs qui exploitent de riches gisements de fer. ہ l’Ouest, c’est le Toudja au pied duquel s’élève de beaux villages construits dans une forêt d’orangers.
Il se produit en entrant dans le golfe de Bougie une illusion qui fait que quelques arbres élevés, situés à fleur d’eau, s’éloignent par l’effet du mirage prêtant à la baie une profondeur immense. Mais, à mesure que l’on se rapproche de Bougie, l’illusion se dissipe et golfe montre dans leur réalité sa forme et son étendue. Enfin, on arrive au mouillage, on se trouve alors au pied des roches grises du Gouraya, en face d’un groupe de maisons blanches séparées par des massifs de vergers. C’est un des plus illustres débris de la grandeur musulmane en Afrique et la capitale actuelle de la Kabylie. La ville et le port de Bougie occupent le segment occidental de l’hémicycle que dessine le golfe».
Arrivé à Bougie-ville, Carette concentre toute son attention sur le mont Gouraya et le Cap Carbon, véritables joyaux de la nature dominant l’ancienne capitale des Hammadites. Depuis Cap Bouak, jouxtant l’avant-port, les Aiguades, Pointe noire, jusqu’à l’emplacement du phare sur Cap Carbon, le capitaine s’est arrêté sur les moindres détails rencontrés et sur toutes curiosités aperçues. Sur les cimes du Gouraya, il donne libre cours à ses capacités de description pour rapporter ce qui lui apparaît comme une merveille de la nature : la plaine de Bougie fendue par l’embouchure de la Soummam, Adrar Ufernu surplombant Boulimat et faisant face à Adrar Aghbalou (Toudja) et les villages sertissant tous ces flancs de montagnes.
Zhafit- Admin
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Date d'inscription : 26/04/2008
Re: Béjaïa, mer, terre, vallées et montagnes
Gouraya, la gardienne des foyers
ہ partir du site de la ville de Bougie, le mont Gouraya donne l’impression d’un rocher protecteur qui étend ses bras jusqu’aux portes de la Cité. Ce relief s’élevant au-dessus de la mer et la découpe du golfe ont imposé à Bougie une typologie de construction en cascades orientée vers les sud. Carette écrit à ce propos : «Bougie est bâtie en amphithéâtre sur deux croupes exposées au sud et séparées par un ravin profond appelé Oued Abzaz. Le ravin et les deux mamelons viennent se perdre dans la mer en formant une petite baie qui est le port actuel. En arrière de la ville règne un plateau de 145 mètres d’élévation d’où s’élance à pic à une hauteur de 671 mètres le Gouraya, remarquables par ses pentes abruptes, sa teinte grisâtre et ses formes décharnées. La crête du Gouraya s’abaisse par ressauts successifs jusqu’au Cap Carbon qui ferme à l’Ouest le golfe de Bougie. Le premier porte le nom de Malaâb-Eddib (le théâtre du chacal). Puis viennent sept dentelures juxtaposées que les bougiotes comprennent sous la dénomination commune de Sebaâ Djeblet (les sept montagnes). ہ la base règne une caverne haute et profonde creusée par le choc incessant des vagues qui viennent s’y engouffrer avec des bruits sourds ; elle traverse le rocher de part en part, ce qui lui a fait donner le nom d’El Methqoub (Rocher percé). La crypte naturelle d’El Methqoub fut au XIVesiècle le théâtre des pieuses méditations de Raymond Lulle. C’est dans cet oratoire sauvage et grandiose que l’infatigable apôtre venait chercher des inspiration durant le cours de sa mission en Afrique». Raymond Lulle était un philosophe, poète et missionnaire catalan (1235-1315), maîtrisant la langue arabe, et qui a fait plusieurs missions d’évangélisation en Afrique du Nord. Son port d’attache était la ville de Bougie.
Après une description assez poussée de la géographie physique dans laquelle s’exprime le capitaine polyvalent (le botaniste, l’agronome, le géologue), Carette revient sur l’histoire ancienne et récente de Bougie d’après les documents auxquels il a eu accès ou sous forme de témoignages lorsque des événements ont eu lieu au moment où il était présent.
Un prestige historique incontesté
De l’histoire berbéro-romaine, Bougie ne garde que de menues traces nébuleuses en comparaison de certaines villes de l’Est algérien. Carette écrit à ce propos : “Bougie occupe l’emplacement de la colonie romaine de Saldae. On y a retrouvé des soubassements de murs en pierres de taille, quelques tronçons de colonnes et plusieurs inscriptions latines. Mais la véritable grandeur de Bougie date de la période sarrasine (musulmane). Vers le milieu du XIe siècle, elle contenait plus de 20 000 maisons., ce qui suppose une population d’au moins 100 000 habitants. En 1509, au moment où elle fut prise par les Espagnols, elle renfermait plus de 8 000 défenseurs. La population indigène se trouve réduite aujourd’hui (aux environs de 1840, NDLR) à 146 individus dont un tiers de compose de Koulouglis et le reste de Kabyles.
Au temps de sa grandeur, Bougie avait des écoles renommées, de belles mosquées, des palais ornés de mosaïques et d’arabesques. Chaque années de nombreux pèlerins venaient la visiter. Aussi, l’appelait-on la petite Mecque. Un monument qui existe dans la haute ville rappelle cette tradition. C’est un puits situé parmi des débris sans nombre et sans nom. Les habitants l’appellent le puits de Zemzem. Par un caprice assez bizarre, le temps et la guerre, ces destructeurs impitoyables, ont respecté sur une grande partie de son étendue la muraille qui fermait Bougie alors qu’elle était la capitale des Hammadites et qu’elle tenait sous ses lois Bône, Constantine et Alger. On retrouve encore un échantillon de l’architecture de cette époque dans l’ogive gracieuse et pittoresque appelée Porte des Pisans, qui s’élève au bord de la mer à côté du débarcadère actuel. C’est par cette étroite ouverture que le 29 septembre 1833 les Français ont fait leur apparition dans Bougie sous le feu des Kabyles. La prise de Bougie par les Kabyles fut provoquée par des brigandages maritimes. En 1831, un brick de l’ةtat ayant fait naufrage sur ses côtés, l’équipage fut massacré. Plus tard, un brick anglais s’étant présenté devant la ville a reçu, sans aucune provocation, deux coups de canon. Aussitôt, le consul d’Angleterre à Alger demanda satisfaction de cette insulte et exprima l’espoir que la France, maîtresse de la côte d’Afrique, saurait y faire respecter les pavillons amis. L’expédition ne fut cependant décidée que le 14 septembre 1833, et le 23 septembre, une colonne de 2 000 hommes partait de Toulon sous le commandement du général Trézel. Le 29 septembre, au point du jour, elle parut devant Bougie. Le débarquement s’opéra de vive force à côté du grand arceau du Moyen-âge appelé Porte des Pisans. En deux heures, le fort Abdelkader, le fort Mouca et la Casbah furent en notre pouvoir. Mais, ma résistance qui avait été faible au moment de l’attaque, se prolongea pendant plusieurs jours de maison en maison. Enfin, le 12 octobre, le général français ayant reçu des renforts d’Alger et reconnaissant toute l’importance de la position du Gouraya résolut de l’enlever aux Kabyles. L’attaque fut bien conduite et réussie. Dès ce moment, les irruptions par la montagne cessèrent, et le cadavre de Bougie resta définitivement aux Français.”
Après une longue description technique du golfe de Bougie et son importance stratégique dans la défense et le commerce, le capitaine Carette trace les grands traits des populations kabyles : le sens et la valeur du travail, l’amour de la liberté et le sens de la dignité : “Le goût de la stabilité, l’amour du ravin natal, l’habitude du travail, l’exercice des arts professionnels, le soin et l’art des cultures ne se retrouvent nulle part au même degré que chez les habitants des montagnes qui entourent la ville de Bougie.”
L’embouchure de la Soummam : la manne du ciel se déverse dans la mer
Lorsqu’on se met à contempler l’embouchure de la Soummam sur le pont qui ouvre la route nationale n°9, il est certainement difficile d’imaginer que les eaux qui, à ce point, rejoignent la mer, ont pour premières origines les monts de Aïn Oulmane, au sud de Sétif, le mont Dirah, au sud de Bouira, et l’extrême ouest du Djurdjura.
l se trouve en effet que la géographie physique de la région positionne les sources les plus méridionales de la Soummam aux limites de la zone semi-aride caractérisée par des rigueurs liées au climat continental, alors que les sources les plus proches sont situées dans les territoires humides au climat tempéré. La Soummam constitue un réseau hydrographique dense et bien fourni, particulièrement dans sa partie située dans l’Atlas tellien : Djurdjura, Babors et Bibans. Son bassin versant couvre une superficie de 9 090 km2 étalée sur quatre wilayas : Bouira, Bordj Bou Arréridj, Sétif et Béjaïa. Avec le Cheliff, la Tafna et le Rhummel, la Soummam est l’une des plus grands cours d’eau d’Algérie.
Les cours d’eau s’organisent en réseaux hydrographiques, assemblages de rivières principales et de leurs affluents. Les ruisseaux se jettent dans les rivières les plus importantes qui, elles-mêmes, vont constituer le principal cours d’eau. Pour cette raison, on dit que ces réseaux de rivières et de vallées sont hiérarchisés.
Les réseaux hydrographiques drainent des bassins. Chaque bassin est séparé des bassins voisins par une ligne de partage des eaux qui correspond souvent à des accidents structuraux (sommets d’anticlinaux, d’escarpements de failles,…). Pour des raisons pratiques liées à cette architecture géomorphologique, le ministères des Ressources en eau a, à la fin des années 1990, institué des administrations spécifiques correspondant à ces bassins et chargées de la gestion de leurs ressources en eau. Elles sont appelées les Agences de bassins.
Les résultats du travail de creusements réalisés par les eaux qui ruissellent et qui se concentrent en ruisseaux, rivières ou fleuves aboutit à la formation des vallées. Ces dernières sont les formes de relief les plus répandues à la surface de la terre. Le nombre et la densité des rivières dans un même bassin hydrographique dépendent de la nature du sol. Sur les terrains imperméables, presque toutes les eaux de pluie ruissellent à la surface. Un réseau serré de rivières est nécessaire pour les évacuer. C’est pourquoi la densité des vallées y est plus élevée. Sur les terrains perméables, en revanche, une grande partie des eaux s’infiltre dans le sol et les vallées sont alors moins nombreuses.
Le réseau hydrographique de la Soummam est de type exoréique, car il se déverse dans la mer au niveau de la ville de Béjaïa, contrairement aux réseaux des Hauts Plateaux du Sud et du Shara où les eaux s’infiltrent dans les nappes souterraines où s’accumulent dans de vastes mares appelées chotts. Les réseaux exoréiques jouent un rôle très important dans le cycle de l’eau ; ce sont eux, en effet, qui assurent le retour à la mer de la plus grande partie des précipitations tombées à la surface des continents.
La rivière creuse son lit, en arrache des matériaux qu’elle transporte et qu’elle dépose. Elle exerce ainsi trois actions : action érosive, action de transport et action d’accumulation.
Les sources pluviales du Sud-Ouest
Le mont Dirah, situé à 30 km au sud de la ville de Bouira, culmine à 1810 m d’altitude. Sa ligne de crête sépare le bassin méditerranéen du bassin du Hodna. Ici, nous sommes à l’extrémité Sud-Ouest du bassin de la Soummam. Les eaux provenant de djebel Dirah coulent en torrents le long de l’Oued Guergour et Oued Mebiar lesquels prendront plus bas respectivement les noms de Oued Mahadjar et Oued Lahdjar. Ces deux ruisseaux, en perdant beaucoup de leur vitesse de progression, vont confluer au niveau de la ville de Sour El Ghozlane pour former Oued Lakhal sur lequel est construit, en 1984, le barrage du même nom.
L’Oued Lakhal reçoit par la suite les apports de l’Oued Sbisseb qui proviennent du mont Aïn Hazem, qui surplombe la ville d’El Hachimia, et les apports de l’Oued Ben Okba, entre Aïn Lahdjar et Aïn Turc. Oued Lakhal entre dans la grande rivière de l’Oued D’Hous au niveau de la ville de Bouira. Ainsi, Oued D’Hous constitue la véritable Haute Soummam qui s’orientera régulièrement vers le Nord-est jusqu’à la ville de Béjaïa. Les rivières de Zerrouk, Oued Okhriss et El Khemis provenant de la ligne de crête Maghnine-Hellala vont confluer pour former Oued Zaïane au niveau de la localité d’Ahl El Ksar. Zaïane va rejoindre Oued Sahel qui est une continuité de Oued D’Hous sur l’axe El Adjiba-M’chedallah. De même, les précipitations sur le massif de Sebkha (Tamellaht), Ath Mansour, Beni Ouaggag (wilaya de BBA) sont acheminées par les rivières de Sebkha et Sidi Aïssa au niveau d’Ighrem et Ahnif pour se déverser dans la Soummam. Le plus grand cours d’eau qui fait gonfler la Soummam à souhait est sans aucun doute l’Assif Amarigh qui prend ses sources dans les Hauts-Plateaux de Bordj Bou Arréridj. Assif Amarigh qui suit le défilé des gorges des Portes de Fer, se met au contact de la Soummam au niveau de la localité de Beni Mansour.
Assif Amarigh, au commencement de son cours, 4 km avant la localité d’El Achir (BBA), a pour nom Oued Messissi. Il reçoit les eaux du versant Nord du mont Mansourah (1862 m d’altitude) et du mont Chokchott (1832 m).
Les apports des Bibans sont ceux aussi reçus par l’intermédiaire du massif des Ath Abbas jusqu’à Guenzet (rive droite de la Soummam) où se fait la jonction avec le massif des Babors.
Les apports hydriques du Djurdjura pour la Soummam commencent au col de Tizi n’Djaboub, à partir duquel une ligne de partage des eaux vient sur Draâ Lakhmis (banlieue de Bouira), et se poursuivent sur le versant sud de la chaîne jusqu’au col de l’Akfadou. Ce sont des torrents en amont et des cours plus ou moins stabilisés en aval qui viennent ainsi renforcer la Soummam par sa rive gauche. Assif Boumsaâdane, Tessala, Assif Boudrar, Oued Baghbar, Assif Assemadh, Assif Rana, Ighzer Ouakour, Assif n’Ath Mlikech, Ighzer Amokrane et Oued R’Mila : ce sont là les principaux cours d’eau qui proviennent du versant sud du Djurdjura et qui se jettent directement dans la Soummam.
Depuis 2005, le barrage de Tilesdit (capacité de 170 millions de m3), installé dans la région de Bechloul (w. de Bouira) retient une partie de ces eaux qui, auparavant, se déversaient dans la mer.
Le haut pays de Bousellam et d’Il Maïn
La moyenne Soummam est alimentée sur sa rive droite par l’imposant cours de Bousellam. Sur le lit aval de celui-ci, en face de la ville d’Akbou, est construit le barrage de Tichy Haf. Le Bousellam plonge dans la Soummam juste après la grande boucle sinueuse de la station thermale de Hammam Sidi Yahia. Il reçoit sur son flanc ouest une autre grande rivière, Assif Ilmaïne, et d’autres branches plus modestes comme les cours de Boutouab et Galaâ.
ہ l’approche de l’embouchure de la Soummam, viennent s’ajouter d’autres talwegs de moyenne importance comme Assif Amassine, qui prend naissance à Adrar Takintoucht drainant les villages de Feraoun, Tifritine et Khelil. Le dernier cours d’eau de cette rive et qui se jette directement dans la Soummam est l’Oued Amizour qui a pour sources principales Souk Tléta et Barbacha.
Le cours de Bousellamn prend naissance sur le mont Boutaleb qui fait partie de la chaîne du Hodna. Il draine la plaine de Sétif et reçoit les apports de Djebel Megris (nord de Aïn Abassa). Le mont Megris et son prolongement vers l’ouest, le mont Hanini, forment une ligne de partage des eaux entre le bassin de la Soummam et le bassin de l’Agrioun. Ici, le Bousellam évolue exactement sur les Hauts Plateau de Sérif. Il arrose les localités de Salah Bey, Aïn Oulmane, Mezloug et Hammam Ouled Yelles. Entre Aïn Taghrout et Mahdia, est édifié le barrage de Aïn Zada qui est bien visible à partir de la R.N.5. La pente du terrain y est trop faible ; parfois, elle est nulle. L’écoulement de l’eau est assuré par la vitesse initiale acquise lors de la chute des reliefs de Boutaleb et de la région sud de Aïn Lekbira.
Après le barrage de Aïn Zada, le Bousellam entre dans les falaises de Hammam Guergour, à l’ouest de la ville de Bougaâ. La ligne de crête de Djebel Ras El Hadj, sur les hauteurs de Tala Ifassène, trace la limite nord entre la Soummam et l’Agrioun. ہ la sortie de Bougaâ, le Bousellam est traversé par la RN74 (joignant Takariets à Sétif) ; puis, il aborde la région de Beni Ourtilane d’où il prend une direction franche vers l’ouest. Il continue sur Taghits Ighil, et s’est près du village de Tansaout qu’il reçoit un autre affluent sur sa rive gauche, Assif Ilmaïn. Ce dernier prend naissance dans la région de Sidi M’Barek (w ; de BBA), passe dans les bas-fonds de Bordj Zemmoura en recevant les apports venus du versant sud de Hammam Guergour. Almaïn continue à tracer ses méandres abrupts vers Guenzet qu’il laisse sur sa droite et pique vers la localité d’El Maïn située sur la rive gauche du cours d’eau. ہ la sortie d’Il Maïn, ce cours d’eau voit son destin se mêler à celui de Bousellam, puis, cinq kilomètre après, à celui de la Soummam.
ہ partir du site de la ville de Bougie, le mont Gouraya donne l’impression d’un rocher protecteur qui étend ses bras jusqu’aux portes de la Cité. Ce relief s’élevant au-dessus de la mer et la découpe du golfe ont imposé à Bougie une typologie de construction en cascades orientée vers les sud. Carette écrit à ce propos : «Bougie est bâtie en amphithéâtre sur deux croupes exposées au sud et séparées par un ravin profond appelé Oued Abzaz. Le ravin et les deux mamelons viennent se perdre dans la mer en formant une petite baie qui est le port actuel. En arrière de la ville règne un plateau de 145 mètres d’élévation d’où s’élance à pic à une hauteur de 671 mètres le Gouraya, remarquables par ses pentes abruptes, sa teinte grisâtre et ses formes décharnées. La crête du Gouraya s’abaisse par ressauts successifs jusqu’au Cap Carbon qui ferme à l’Ouest le golfe de Bougie. Le premier porte le nom de Malaâb-Eddib (le théâtre du chacal). Puis viennent sept dentelures juxtaposées que les bougiotes comprennent sous la dénomination commune de Sebaâ Djeblet (les sept montagnes). ہ la base règne une caverne haute et profonde creusée par le choc incessant des vagues qui viennent s’y engouffrer avec des bruits sourds ; elle traverse le rocher de part en part, ce qui lui a fait donner le nom d’El Methqoub (Rocher percé). La crypte naturelle d’El Methqoub fut au XIVesiècle le théâtre des pieuses méditations de Raymond Lulle. C’est dans cet oratoire sauvage et grandiose que l’infatigable apôtre venait chercher des inspiration durant le cours de sa mission en Afrique». Raymond Lulle était un philosophe, poète et missionnaire catalan (1235-1315), maîtrisant la langue arabe, et qui a fait plusieurs missions d’évangélisation en Afrique du Nord. Son port d’attache était la ville de Bougie.
Après une description assez poussée de la géographie physique dans laquelle s’exprime le capitaine polyvalent (le botaniste, l’agronome, le géologue), Carette revient sur l’histoire ancienne et récente de Bougie d’après les documents auxquels il a eu accès ou sous forme de témoignages lorsque des événements ont eu lieu au moment où il était présent.
Un prestige historique incontesté
De l’histoire berbéro-romaine, Bougie ne garde que de menues traces nébuleuses en comparaison de certaines villes de l’Est algérien. Carette écrit à ce propos : “Bougie occupe l’emplacement de la colonie romaine de Saldae. On y a retrouvé des soubassements de murs en pierres de taille, quelques tronçons de colonnes et plusieurs inscriptions latines. Mais la véritable grandeur de Bougie date de la période sarrasine (musulmane). Vers le milieu du XIe siècle, elle contenait plus de 20 000 maisons., ce qui suppose une population d’au moins 100 000 habitants. En 1509, au moment où elle fut prise par les Espagnols, elle renfermait plus de 8 000 défenseurs. La population indigène se trouve réduite aujourd’hui (aux environs de 1840, NDLR) à 146 individus dont un tiers de compose de Koulouglis et le reste de Kabyles.
Au temps de sa grandeur, Bougie avait des écoles renommées, de belles mosquées, des palais ornés de mosaïques et d’arabesques. Chaque années de nombreux pèlerins venaient la visiter. Aussi, l’appelait-on la petite Mecque. Un monument qui existe dans la haute ville rappelle cette tradition. C’est un puits situé parmi des débris sans nombre et sans nom. Les habitants l’appellent le puits de Zemzem. Par un caprice assez bizarre, le temps et la guerre, ces destructeurs impitoyables, ont respecté sur une grande partie de son étendue la muraille qui fermait Bougie alors qu’elle était la capitale des Hammadites et qu’elle tenait sous ses lois Bône, Constantine et Alger. On retrouve encore un échantillon de l’architecture de cette époque dans l’ogive gracieuse et pittoresque appelée Porte des Pisans, qui s’élève au bord de la mer à côté du débarcadère actuel. C’est par cette étroite ouverture que le 29 septembre 1833 les Français ont fait leur apparition dans Bougie sous le feu des Kabyles. La prise de Bougie par les Kabyles fut provoquée par des brigandages maritimes. En 1831, un brick de l’ةtat ayant fait naufrage sur ses côtés, l’équipage fut massacré. Plus tard, un brick anglais s’étant présenté devant la ville a reçu, sans aucune provocation, deux coups de canon. Aussitôt, le consul d’Angleterre à Alger demanda satisfaction de cette insulte et exprima l’espoir que la France, maîtresse de la côte d’Afrique, saurait y faire respecter les pavillons amis. L’expédition ne fut cependant décidée que le 14 septembre 1833, et le 23 septembre, une colonne de 2 000 hommes partait de Toulon sous le commandement du général Trézel. Le 29 septembre, au point du jour, elle parut devant Bougie. Le débarquement s’opéra de vive force à côté du grand arceau du Moyen-âge appelé Porte des Pisans. En deux heures, le fort Abdelkader, le fort Mouca et la Casbah furent en notre pouvoir. Mais, ma résistance qui avait été faible au moment de l’attaque, se prolongea pendant plusieurs jours de maison en maison. Enfin, le 12 octobre, le général français ayant reçu des renforts d’Alger et reconnaissant toute l’importance de la position du Gouraya résolut de l’enlever aux Kabyles. L’attaque fut bien conduite et réussie. Dès ce moment, les irruptions par la montagne cessèrent, et le cadavre de Bougie resta définitivement aux Français.”
Après une longue description technique du golfe de Bougie et son importance stratégique dans la défense et le commerce, le capitaine Carette trace les grands traits des populations kabyles : le sens et la valeur du travail, l’amour de la liberté et le sens de la dignité : “Le goût de la stabilité, l’amour du ravin natal, l’habitude du travail, l’exercice des arts professionnels, le soin et l’art des cultures ne se retrouvent nulle part au même degré que chez les habitants des montagnes qui entourent la ville de Bougie.”
L’embouchure de la Soummam : la manne du ciel se déverse dans la mer
Lorsqu’on se met à contempler l’embouchure de la Soummam sur le pont qui ouvre la route nationale n°9, il est certainement difficile d’imaginer que les eaux qui, à ce point, rejoignent la mer, ont pour premières origines les monts de Aïn Oulmane, au sud de Sétif, le mont Dirah, au sud de Bouira, et l’extrême ouest du Djurdjura.
l se trouve en effet que la géographie physique de la région positionne les sources les plus méridionales de la Soummam aux limites de la zone semi-aride caractérisée par des rigueurs liées au climat continental, alors que les sources les plus proches sont situées dans les territoires humides au climat tempéré. La Soummam constitue un réseau hydrographique dense et bien fourni, particulièrement dans sa partie située dans l’Atlas tellien : Djurdjura, Babors et Bibans. Son bassin versant couvre une superficie de 9 090 km2 étalée sur quatre wilayas : Bouira, Bordj Bou Arréridj, Sétif et Béjaïa. Avec le Cheliff, la Tafna et le Rhummel, la Soummam est l’une des plus grands cours d’eau d’Algérie.
Les cours d’eau s’organisent en réseaux hydrographiques, assemblages de rivières principales et de leurs affluents. Les ruisseaux se jettent dans les rivières les plus importantes qui, elles-mêmes, vont constituer le principal cours d’eau. Pour cette raison, on dit que ces réseaux de rivières et de vallées sont hiérarchisés.
Les réseaux hydrographiques drainent des bassins. Chaque bassin est séparé des bassins voisins par une ligne de partage des eaux qui correspond souvent à des accidents structuraux (sommets d’anticlinaux, d’escarpements de failles,…). Pour des raisons pratiques liées à cette architecture géomorphologique, le ministères des Ressources en eau a, à la fin des années 1990, institué des administrations spécifiques correspondant à ces bassins et chargées de la gestion de leurs ressources en eau. Elles sont appelées les Agences de bassins.
Les résultats du travail de creusements réalisés par les eaux qui ruissellent et qui se concentrent en ruisseaux, rivières ou fleuves aboutit à la formation des vallées. Ces dernières sont les formes de relief les plus répandues à la surface de la terre. Le nombre et la densité des rivières dans un même bassin hydrographique dépendent de la nature du sol. Sur les terrains imperméables, presque toutes les eaux de pluie ruissellent à la surface. Un réseau serré de rivières est nécessaire pour les évacuer. C’est pourquoi la densité des vallées y est plus élevée. Sur les terrains perméables, en revanche, une grande partie des eaux s’infiltre dans le sol et les vallées sont alors moins nombreuses.
Le réseau hydrographique de la Soummam est de type exoréique, car il se déverse dans la mer au niveau de la ville de Béjaïa, contrairement aux réseaux des Hauts Plateaux du Sud et du Shara où les eaux s’infiltrent dans les nappes souterraines où s’accumulent dans de vastes mares appelées chotts. Les réseaux exoréiques jouent un rôle très important dans le cycle de l’eau ; ce sont eux, en effet, qui assurent le retour à la mer de la plus grande partie des précipitations tombées à la surface des continents.
La rivière creuse son lit, en arrache des matériaux qu’elle transporte et qu’elle dépose. Elle exerce ainsi trois actions : action érosive, action de transport et action d’accumulation.
Les sources pluviales du Sud-Ouest
Le mont Dirah, situé à 30 km au sud de la ville de Bouira, culmine à 1810 m d’altitude. Sa ligne de crête sépare le bassin méditerranéen du bassin du Hodna. Ici, nous sommes à l’extrémité Sud-Ouest du bassin de la Soummam. Les eaux provenant de djebel Dirah coulent en torrents le long de l’Oued Guergour et Oued Mebiar lesquels prendront plus bas respectivement les noms de Oued Mahadjar et Oued Lahdjar. Ces deux ruisseaux, en perdant beaucoup de leur vitesse de progression, vont confluer au niveau de la ville de Sour El Ghozlane pour former Oued Lakhal sur lequel est construit, en 1984, le barrage du même nom.
L’Oued Lakhal reçoit par la suite les apports de l’Oued Sbisseb qui proviennent du mont Aïn Hazem, qui surplombe la ville d’El Hachimia, et les apports de l’Oued Ben Okba, entre Aïn Lahdjar et Aïn Turc. Oued Lakhal entre dans la grande rivière de l’Oued D’Hous au niveau de la ville de Bouira. Ainsi, Oued D’Hous constitue la véritable Haute Soummam qui s’orientera régulièrement vers le Nord-est jusqu’à la ville de Béjaïa. Les rivières de Zerrouk, Oued Okhriss et El Khemis provenant de la ligne de crête Maghnine-Hellala vont confluer pour former Oued Zaïane au niveau de la localité d’Ahl El Ksar. Zaïane va rejoindre Oued Sahel qui est une continuité de Oued D’Hous sur l’axe El Adjiba-M’chedallah. De même, les précipitations sur le massif de Sebkha (Tamellaht), Ath Mansour, Beni Ouaggag (wilaya de BBA) sont acheminées par les rivières de Sebkha et Sidi Aïssa au niveau d’Ighrem et Ahnif pour se déverser dans la Soummam. Le plus grand cours d’eau qui fait gonfler la Soummam à souhait est sans aucun doute l’Assif Amarigh qui prend ses sources dans les Hauts-Plateaux de Bordj Bou Arréridj. Assif Amarigh qui suit le défilé des gorges des Portes de Fer, se met au contact de la Soummam au niveau de la localité de Beni Mansour.
Assif Amarigh, au commencement de son cours, 4 km avant la localité d’El Achir (BBA), a pour nom Oued Messissi. Il reçoit les eaux du versant Nord du mont Mansourah (1862 m d’altitude) et du mont Chokchott (1832 m).
Les apports des Bibans sont ceux aussi reçus par l’intermédiaire du massif des Ath Abbas jusqu’à Guenzet (rive droite de la Soummam) où se fait la jonction avec le massif des Babors.
Les apports hydriques du Djurdjura pour la Soummam commencent au col de Tizi n’Djaboub, à partir duquel une ligne de partage des eaux vient sur Draâ Lakhmis (banlieue de Bouira), et se poursuivent sur le versant sud de la chaîne jusqu’au col de l’Akfadou. Ce sont des torrents en amont et des cours plus ou moins stabilisés en aval qui viennent ainsi renforcer la Soummam par sa rive gauche. Assif Boumsaâdane, Tessala, Assif Boudrar, Oued Baghbar, Assif Assemadh, Assif Rana, Ighzer Ouakour, Assif n’Ath Mlikech, Ighzer Amokrane et Oued R’Mila : ce sont là les principaux cours d’eau qui proviennent du versant sud du Djurdjura et qui se jettent directement dans la Soummam.
Depuis 2005, le barrage de Tilesdit (capacité de 170 millions de m3), installé dans la région de Bechloul (w. de Bouira) retient une partie de ces eaux qui, auparavant, se déversaient dans la mer.
Le haut pays de Bousellam et d’Il Maïn
La moyenne Soummam est alimentée sur sa rive droite par l’imposant cours de Bousellam. Sur le lit aval de celui-ci, en face de la ville d’Akbou, est construit le barrage de Tichy Haf. Le Bousellam plonge dans la Soummam juste après la grande boucle sinueuse de la station thermale de Hammam Sidi Yahia. Il reçoit sur son flanc ouest une autre grande rivière, Assif Ilmaïne, et d’autres branches plus modestes comme les cours de Boutouab et Galaâ.
ہ l’approche de l’embouchure de la Soummam, viennent s’ajouter d’autres talwegs de moyenne importance comme Assif Amassine, qui prend naissance à Adrar Takintoucht drainant les villages de Feraoun, Tifritine et Khelil. Le dernier cours d’eau de cette rive et qui se jette directement dans la Soummam est l’Oued Amizour qui a pour sources principales Souk Tléta et Barbacha.
Le cours de Bousellamn prend naissance sur le mont Boutaleb qui fait partie de la chaîne du Hodna. Il draine la plaine de Sétif et reçoit les apports de Djebel Megris (nord de Aïn Abassa). Le mont Megris et son prolongement vers l’ouest, le mont Hanini, forment une ligne de partage des eaux entre le bassin de la Soummam et le bassin de l’Agrioun. Ici, le Bousellam évolue exactement sur les Hauts Plateau de Sérif. Il arrose les localités de Salah Bey, Aïn Oulmane, Mezloug et Hammam Ouled Yelles. Entre Aïn Taghrout et Mahdia, est édifié le barrage de Aïn Zada qui est bien visible à partir de la R.N.5. La pente du terrain y est trop faible ; parfois, elle est nulle. L’écoulement de l’eau est assuré par la vitesse initiale acquise lors de la chute des reliefs de Boutaleb et de la région sud de Aïn Lekbira.
Après le barrage de Aïn Zada, le Bousellam entre dans les falaises de Hammam Guergour, à l’ouest de la ville de Bougaâ. La ligne de crête de Djebel Ras El Hadj, sur les hauteurs de Tala Ifassène, trace la limite nord entre la Soummam et l’Agrioun. ہ la sortie de Bougaâ, le Bousellam est traversé par la RN74 (joignant Takariets à Sétif) ; puis, il aborde la région de Beni Ourtilane d’où il prend une direction franche vers l’ouest. Il continue sur Taghits Ighil, et s’est près du village de Tansaout qu’il reçoit un autre affluent sur sa rive gauche, Assif Ilmaïn. Ce dernier prend naissance dans la région de Sidi M’Barek (w ; de BBA), passe dans les bas-fonds de Bordj Zemmoura en recevant les apports venus du versant sud de Hammam Guergour. Almaïn continue à tracer ses méandres abrupts vers Guenzet qu’il laisse sur sa droite et pique vers la localité d’El Maïn située sur la rive gauche du cours d’eau. ہ la sortie d’Il Maïn, ce cours d’eau voit son destin se mêler à celui de Bousellam, puis, cinq kilomètre après, à celui de la Soummam.
Zhafit- Admin
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Re: Béjaïa, mer, terre, vallées et montagnes
Des sites bariolés sur l’étendue d’un vaste bassin
En drainant sur un superficie de 9090 km2 quatre wilayas du Nord et des Hauts Plateaux, la Soummam aura rencontré une multitude de paysages, de panoramas et de modes de vie de culture. Sur le plan géomorphologique, le contraste est fortement accusé entre les chutes d’eau dévalant les façades de Lalla Khedidja et la marche tranquille de l’eau dans les ruisseaux de la banlieue de Sétif. La différence est aussi prononcée entre les aires boisées des Bibans et la nudité des lieux sur le mont Dirah et la région de Sidi M’Barek. Du point de vue climatique, les affluents de la Soummam traversent des régions semi-arides où les précipitations annuelles ne dépassent pas 350 mm et des zones humides dont la pluviométrie dépasse les 1200 mm/an. Depuis les hautes plaines céréalières de Sétif jusqu’à la luxuriance de Tikjda, en passant par les monts nus de Mansourah et Dirah, les berges maraîchères et oléicoles de Maillot et d’Allaghène, des différences de taille sont constatées dans les systèmes de production, la relation entretenue avec la terre et la ressource hydrique, et, enfin, l’occupation et la gestion de l’espace. Remarquons également que les grandes infrastructures routières suivent souvent les vallées et les cours d’eau, et cela depuis l’antiquité, car la réalisation des travaux y est moins onéreuse. Il en est de même pour les chemins de fer : Alger-Bouira sur le cours de l’Isser ; Bouira-Beni Mansour sur la Haute Soummam ; Beni-Mansour-Bejaïa sur la Soummam moyenne et inférieure. La voie ferrée Beni Mansour-Bordj Bou Arréridj suit le cours d’Assif Amarigh. Les routes de crête et de montagne sont généralement ouvertes en période de guerre pour pouvoir dominer son ennemi. C’est ce que firent les Romains en aménageant la route départementale n°20 allant de Berrouaghia à El M’Hir pour éviter les routes de l’Isser et de la Soummam qui sont devenues “belliqueuses’’ et dangereuses du fait qu’elles abritaient les rebelles numides.
Par ses berges, ses méandres, ses falaises, la verdure des zones qui lui sont attenantes, ses eaux qui gonflent en hiver générant d’importantes crues et qui, en basse saison, coulent en filets limpides, la Soummam offre des sites d’une beauté enchanteresse. Cette splendeur s’accroît par la présence de villages et bourgades surplombant ses différents affluents : de Takarbouzt à Tibouamouchine, en passant par Ighil Ali et Tamokra, ces villages sont suspendus à leurs pitons, tiennent à leurs lopins de terres et se ressourcent sans fin dans le murmure et le bruissement des eaux de la Soummam, écumeuses en hiver et sages en automne et au printemps. Le lac du nouveau barrage de Tichy Haf ajoute nécessairement son grain de sel à ce panorama, d’autant plus que la station de Hammam Sidi Yahia y a est seulement à quelques brassées. Les ombres à ce tableau idyllique sont bien sûr l’exploitation sauvage du sable de la rivière et le déversement des eaux usées dans le lit même de plusieurs affluents du cours d’eau. Le patrimoine naturel dans lequel devraient se retrouver en symbiose la féerie des lieux, l’économie de la région et le cadre de vie du citoyen mérite une attention plus accrue des populations, des pouvoirs publics et du monde associatif de façon à sauver un joyau naturel et humain d’une exceptionnelle vivacité. Un joyau qui est là depuis des siècles à défier le temps et à voir passer des générations d’hommes de labeur et de communautés organisées selon les règles et les exigences d’une nature rude mais aussi généreuse.
Amar Naït Messaoud
En drainant sur un superficie de 9090 km2 quatre wilayas du Nord et des Hauts Plateaux, la Soummam aura rencontré une multitude de paysages, de panoramas et de modes de vie de culture. Sur le plan géomorphologique, le contraste est fortement accusé entre les chutes d’eau dévalant les façades de Lalla Khedidja et la marche tranquille de l’eau dans les ruisseaux de la banlieue de Sétif. La différence est aussi prononcée entre les aires boisées des Bibans et la nudité des lieux sur le mont Dirah et la région de Sidi M’Barek. Du point de vue climatique, les affluents de la Soummam traversent des régions semi-arides où les précipitations annuelles ne dépassent pas 350 mm et des zones humides dont la pluviométrie dépasse les 1200 mm/an. Depuis les hautes plaines céréalières de Sétif jusqu’à la luxuriance de Tikjda, en passant par les monts nus de Mansourah et Dirah, les berges maraîchères et oléicoles de Maillot et d’Allaghène, des différences de taille sont constatées dans les systèmes de production, la relation entretenue avec la terre et la ressource hydrique, et, enfin, l’occupation et la gestion de l’espace. Remarquons également que les grandes infrastructures routières suivent souvent les vallées et les cours d’eau, et cela depuis l’antiquité, car la réalisation des travaux y est moins onéreuse. Il en est de même pour les chemins de fer : Alger-Bouira sur le cours de l’Isser ; Bouira-Beni Mansour sur la Haute Soummam ; Beni-Mansour-Bejaïa sur la Soummam moyenne et inférieure. La voie ferrée Beni Mansour-Bordj Bou Arréridj suit le cours d’Assif Amarigh. Les routes de crête et de montagne sont généralement ouvertes en période de guerre pour pouvoir dominer son ennemi. C’est ce que firent les Romains en aménageant la route départementale n°20 allant de Berrouaghia à El M’Hir pour éviter les routes de l’Isser et de la Soummam qui sont devenues “belliqueuses’’ et dangereuses du fait qu’elles abritaient les rebelles numides.
Par ses berges, ses méandres, ses falaises, la verdure des zones qui lui sont attenantes, ses eaux qui gonflent en hiver générant d’importantes crues et qui, en basse saison, coulent en filets limpides, la Soummam offre des sites d’une beauté enchanteresse. Cette splendeur s’accroît par la présence de villages et bourgades surplombant ses différents affluents : de Takarbouzt à Tibouamouchine, en passant par Ighil Ali et Tamokra, ces villages sont suspendus à leurs pitons, tiennent à leurs lopins de terres et se ressourcent sans fin dans le murmure et le bruissement des eaux de la Soummam, écumeuses en hiver et sages en automne et au printemps. Le lac du nouveau barrage de Tichy Haf ajoute nécessairement son grain de sel à ce panorama, d’autant plus que la station de Hammam Sidi Yahia y a est seulement à quelques brassées. Les ombres à ce tableau idyllique sont bien sûr l’exploitation sauvage du sable de la rivière et le déversement des eaux usées dans le lit même de plusieurs affluents du cours d’eau. Le patrimoine naturel dans lequel devraient se retrouver en symbiose la féerie des lieux, l’économie de la région et le cadre de vie du citoyen mérite une attention plus accrue des populations, des pouvoirs publics et du monde associatif de façon à sauver un joyau naturel et humain d’une exceptionnelle vivacité. Un joyau qui est là depuis des siècles à défier le temps et à voir passer des générations d’hommes de labeur et de communautés organisées selon les règles et les exigences d’une nature rude mais aussi généreuse.
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