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Olfa Youssef sur l'lslam et la modernité

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Olfa Youssef sur l'lslam et la modernité  Empty Olfa Youssef sur l'lslam et la modernité

Message  Zhafit Lun 17 Oct - 19:01

La romancière tunisienne très controversée Olfa Youssef a parlé à Magharebia de la réconciliation des valeurs islamiques et d'une vision contemporaine.
Interview par Jamel Arfaoui pour Magharebia à Tunis – 17/09/10


[Jamel Arfaoui] Porter le voile n'est pas un commandement divin, selon Olfa Youssef.

Olfa Youssef est une chercheuse tunisienne connue pour son approche critique de la pensée islamique et certaines opinions controversées. Intellectuelle et érudite islamique de renom, elle s'est exprimée contre l'inégalité entre hommes et femmes et elle a pris position contre le recours à la violence.

Deux ans après que Magharebia ait rencontré Youssef pour la première fois pour parler de son livre "Confusion d'une musulmane", nous l'avons retrouvée à Tunis pour parler de l'ijtihad, de son interprétation du Coran, de l'état du dialogue au sein de la communauté des Musulmans et d'autres questions d'actualité.

Magharebia : Comment la pensée islamique peut-elle être dynamique et réactive aux positions contemporaines, comme elle l'était au début de son avènement ?

Olfa Youssef : Simplement, nous devons vénérer Dieu tout puissant plutôt que les individus !

Ce qui s'est passé, c'est que nous avons commencé à considérer certaines personnes comme des seigneurs à la place de Dieu, et avons commencé à confondre ijtihad humain et vérité absolue. C'était très simple au temps du Prophète, mais au fil du temps, les esprits sont devenus plus étroits, et le caractère sacré a été ajouté aux individus. Nous embaumons aujourd'hui le passé, en oubliant que l'essence de l'Islam peut être adaptée à toute époque et à tout lieu.

Je vous en donnerai un exemple simple : il est mentionné dans le Sahih que les compagnons du Prophète Mahomet avaient pour habitude de l'accompagner dans ses déplacements. A cette époque, ceux qui ne jeûnaient pas ne blâmaient pas ceux qui jeûnaient, et inversement. Aujourd'hui, nous nous en prenons à ceux qui ne jeûnent pas, même s'ils ont une raison légitime, et nous leur demandons de se cacher au prétexte que "si vous commettez un péché, vous mourrez". Nous oublions que ceux qui ne jeûnent pas pour une raison légitime ne sont pas désobéissants, ils suivent en fait les paroles de Dieu, dont les licences doivent être respectées.

Magharebia : L'interprétation du Coran au cours des premiers siècles peut-elle convenir à notre époque actuelle ?

Olfa Youssef : Les interprétations du Coran, y compris les anciennes, sont différentes dans leurs opinions et leurs approches, tout comme l'interprétation donnée par al-Tabari n'est pas similaire à celle d'al-Razi, d'al-Qashiri, ou d'al-Tahrir et al-Tanwir.

Par exemple, lorsque al-Tahir Ibn Ashur parle des versets traitant de l'esclavage, il semble embarrassé par eux, et il tente donc de les replacer dans leur contexte historique. Pour moi, cela ne signifie qu'une seule chose : la grandeur du Coran repose dans le fait qu'il convenait à son temps et à son lieu, et en même temps, qu'il est porteur d'une essence qui peut être adaptée à d'autres temps et à d'autres lieux. L'esprit du texte, son objet et ses valeurs sont les fondements ; sinon, pourquoi l'esclavagisme aurait-il été aboli sur la base de l'esprit du texte, alors qu'il n'était pas interdit selon un texte explicite du Coran ?

Magharebia : Pensez-vous que le discours religieux en Tunisie aujourd'hui peut contrer les chaînes de télévision par satellite du Moyen Orient et du Golfe, qui propagent souvent des visions extrêmes ?

Olfa Youssef : De quel discours religieux tunisien parlez-vous ? Si vous parlez du discours des élites et des intellectuels, comme Djait, Charfi, Youssef Sedik, Ahmeida al-Neifr, Abu Yarab Marzouqi, Iqbal Gharbi, Zahia Jwairo et d'autres, leur discours ne bénéficie d'aucun soutien ni d'aucun encouragement.

Mais il existe un autre type de discours vulgaire et trop simpliste qui, lui, bénéficie d'un grand soutien. L'Islam est-il synonyme de simplification exagérée ? Signifie-t-il s'adresser à des publics en affichant une confiance absolue, comme si nous étions hier avec les compagnons du Prophète, alors que les anciens textes eux-mêmes se contredisent et diffèrent selon des différences sectaires et des intérêts historiques ? Le discours qui décrit le paradis de manière ridicule, comme s'il s'agissait d'un hôtel 4 étoiles, bien qu'il soit ce qu'aucun oeil n'a vu ni aucune oreille entendu, constitue-t-il une manière de "lutter" contre le discours extrémiste ?

La plupart des Musulmans aujourd'hui ont besoin de quelqu'un qui les sorte du paganisme ; la plupart des Musulmans aujourd'hui ont besoin de quelqu'un qui les réconcilie avec les valeurs de l'Islam, et qui parle de ces valeurs avec une vision contemporaine ; quelqu'un capable de concilier civilisation, respect des autres, conformité, respect des feux de circulation, honnêteté, et ne pas chercher le favoritisme, etc. envers l'Islam. L'Islam n'est ni une barbe ni une apparence ; l'Islam est une spiritualité qui a perdu sa signification dans la recherche frénétique de réponses toute faites, de l'illusion des indulgences et des clés du paradis.

Magharebia : Que répondriez-vous à ceux qui vous disent que vous devriez d'abord porter le voile, puis ensuite seulement parler de religion ?

Olfa Youssef : Je peux leur répondre simplement en leur disant que lorsque vous vous mettez à la place de Dieu pour me juger, vous commettez le péché de polythéisme, et je ne parle pas de religion avec un polythéiste. Toutefois, je ne le dirais naturellement pas, parce que la spiritualité de l'Islam m'a enseigné à ne juger ni les gens ni leur soi intérieur. Il m'a également appris que Dieu tout puissant est le seul à juger, et que nous sommes tous enclins à la fragilité humaine qui nous rend imparfaits, en attendant le seul être parfait.

Quant au voile, je ne le porte pas parce que je suis convaincue, sur la base de mes propres lectures (et de nombreux autres chercheurs sont d'accord avec moi) que ce n'est pas un commandement divin. Je porte ma responsabilité devant Dieu tout puissant, et je ne serais pas hypocrite envers Son peuple. Je voudrais juste dire qu'une chaîne de télévision a conditionné son acceptation d'une émission sur moi à mon accord de ne porter ne serait-ce qu'un voile transparent sur ma tête. La chose qui m'a amusée, c'est que ceux qui me l'ont demandé ont préféré plaire à leurs spectateurs plutôt que de m'autoriser à plaire à mon Dieu tout puissant en me gardant de toute hypocrisie qui m'aurait poussée à faire devant la caméra des choses que je ne fais pas dans ma vie. Je n'ai jamais obéi à une créature dans laquelle je voyais une hypocrisie et des mensonges qui ne plairaient pas à notre Créateur.

Magharebia : Pourquoi la Tunisie a-t-elle connu un retard dans la naissance du mouvement islamique des femmes comme d'autres pays ? Et que pensez-vous de tels mouvements ?

Olfa Youssef : Durant toute l'histoire, la Tunisie a toujours été différente des autres pays musulmans en matière de statut des femmes. Je voudrais seulement mentionner l'exemple d'al-Sadaq al-Qairawani et de sa protection des femmes contre leurs maris qui épousent d'autres femmes. En Tunisie, certains penseurs ont accordé une attention aux problèmes des femmes et à l'égalité de leurs droits avec les hommes, comme al-Tahir al-Haddad et d'autres. Mais aucun mouvement islamique n'est apparu, comme c'est par exemple le cas en Egypte (malgré la présence de certains noms, comme Bashira ben Mourad), parce que la réalité était une raison adaptée au développement de législations. C'est une bonne chose aujourd'hui de voir que malgré des préoccupations sur cette législation que certains expriment de manière différente, les femmes n'ont pas eu à vivre ni à souffrir ce dont les femmes dans d'autres pays musulmans ont souffert et souffrent encore.

Magharebia : Que pensez-vous de l'augmentation des manifestations de religiosité en Tunisie, comme le montre le port du voile par les femmes et celui de la barbe par les hommes ?

Olfa Youssef : Vous parlez de manifestations de religiosité, et je suis d'accord avec vous, ce ne sont que des apparences. La Tunisie connaît aujourd'hui les taux les plus élevés de différents crimes : la haine, la jalousie et la tyrannie dans les relations entre les gens. On trouve rarement le respect des autres dans ces positions, ces visions et ces choix. La loi est un concept qui est presque non-existant. Où est la religiosité dans tout cela ? Comment se fait-il que quand les barbes étaient moins nombreuses, les valeurs morales étaient en meilleur état ? S'agit-il d'une domination des apparences sur la spiritualité ? Les apparences sont plus faciles, et renvoient une image extérieure embellie. Quant aux valeurs morales, elles sont profondément cachées dans le coeur des gens et se manifestent dans les contacts, l'amour et la compassion ; une chose qui est difficile pour beaucoup de gens. Le Prophète, que la paix soit sur lui, n'a pas conditionné la foi à une barbe ou à un morceau de tissu de telle ou telle couleur sur la tête. Il a plutôt conditionné la foi au fait d'aimer pour son frère ce que l'on aime pour soi-même. Il a aussi conditionné l'Islam au fait d'éviter aux gens les mains et les langues des Musulmans. Ceux qui affichent une religiosité superficielle ont-ils les valeurs morales des Musulmans et des croyants ?

Magharebia : Certaines personnes appellent au mariage al-Misyar pour soulager la crise de l'âge tardif du mariage chez les hommes et les femmes. Que pensez-vous d'un tel appel ?

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Olfa Youssef : Pour quelles raisons devrions-nous avoir recours à l'al-Misyar ? Le mariage dans l'Islam est très simple. Toutefois, il est devenu compliqué parce que nous avons été influencés par la pensée de l'église concernant le seul partenaire pour la vie et l'impossibilité du divorce. Quel était, à l'époque du Prophète, le nombre d'hommes et de femmes musulmans qui n'avaient qu'un conjoint pour le reste de leur vie ? Le problème aujourd'hui est que nous ne faisons plus la différence entre sexe et mariage. Il est vrai que le mariage régit la vie sexuelle, mais c'est également une institution d'un point de vue moderne. Comment réconcilier les deux ? Cela demande des études sociales en profondeur.

Quel est le problème si de jeunes hommes et femmes se marient à un âge relativement jeune pendant qu'ils sont encore étudiants et que chacun habite dans sa famille ? Le problème est que notre société, contrairement aux premières communautés islamiques, n'accepte le mariage que comme "le plaisir d'une vie." En cas de séparation, c'est un désastre, et dans ce cas, une femme divorcée ne trouve aucun mari, contrairement à ce qui se passait dans les premières communautés islamiques, etc. Nos systèmes sont confus, mais que nous le voulions ou non, la réalité produira des solutions dont nous voyons des exemples dans certains pays. La réalité sociale et la chaleur de la vie sont plus fortes que la froideur de la théorie et de la pensée.

Magharebia : Que pensez-vous de l'action en justice intentée par des avocats contre les deux séries télévisées Youssef al-Sedik et Maryam al-Azraa au prétexte qu'elles transgressent le caractère sacré de certaines choses ?

Olfa Youssef : Ceux qui ont produit ces séries se sont eux-mêmes présentés comme des Musulmans. On peut avoir une opinion différente de la leur, mais on n'a pas le droit d'appeler à l'interdiction de leur travail. Cela paraît très drôle : des chaînes de télévision par satellite permettent à tous les gens de regarder ces séries, mais une simple pression sur un bouton vous permet de couper la télévision ! Le problème n'est pas artistique ou culturel ; c'est une question politique qui commence lorsque l'on intente une action en justice contre une chaîne parce qu'elle a diffusé une certaine série, et qui peut se terminer par une action en justice intentée contre une chaîne parce qu'elle aura montré une femme la tête découverte, ce qui, pour certaines personnes, constitue aussi une transgression du caractère sacré de certaines choses. Tout cela relève d'une tentative de revenir au temps de l'hesba (vérification) et non au temps de la loi, et ouvre la porte à l'inquisition, aux procès d'intention, et à la confiscation des libertés. Le plus dangereux c'est que nous, en tant que Musulmans en 2010, sommes encore incapabless de discerner les choses réelles de leur personnification et que nous pensons encore que l'art est le pur reflet de la réalité.

http://magharebia.com/cocoon/awi/xhtml1/fr/features/awi/features/2010/09/17/feature-02
Zhafit
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Olfa Youssef sur l'lslam et la modernité  Empty holocauste

Message  F zaidi Lun 17 Oct - 20:47

la société maghrébine ce divise a petit feu car le malékisme commence a disparaitre, et le grand problème que la doctrine salafisme radicale gagne le terrain. maintenant la société va rassasier de leur fruit.



F zaidi

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