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« Je ne pardonne pas aux assassins de mon frère » * d’Asma Guenifi

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Message  Zhafit Mar 5 Juil - 23:41

« Je ne pardonne pas aux assassins de mon frère » * d’Asma Guenifi
Le souvenir amer de la disparition tragique d’un frère


Youcef Zirem



Bien des années plus tard, pour reprendre l’incipit de Cent ans de solitude, de l’immense Gabriel Garcia Marquez, la fille de Constantine se souvient. Installée à Paris, épanouie, militante acharnée des droits de la femme et des libertés, Asma Guenifi vient de sortir un récit, à Paris, aux éditions Riveneuve. Livre émouvant et profond, « Je ne pardonne pas aux assassins de mon frère », plonge le lecteur dans les années de sang et de détresse.

Psychologue clinicienne, Asma Guenifi, qui dirige l’Association des femmes euro‑méditerranéennes, est allée au fond d’elle‑même pour restituer des pans entiers de son histoire, de celle de son frère tant aimé, de celle d’un pays qui se cherche.

« Il fait froid à Alger comme sous un voile noir. La pluie ne s’arrête pas. Ma mère est enceinte, elle attend d’un moment à l’autre l’arrivée de son premier enfant, sans savoir si ce sera une fille ou un garçon. Ce jour‑là, elle avait le sentiment d’être seule au monde car elle était loin de ses parents qui habitaient Constantine ». Ainsi démarre ce récit qui captive le lecteur, qui parfois va jusque dans les années 1950, ces terribles années de guerre qui débouchèrent sur l’indépendance algérienne.

Asma Guenifi raconte ainsi l’histoire de sa famille. Une histoire dans laquelle beaucoup d’Algériens peuvent se retrouver. C’est la fille du cinéaste Nasreddine Guenifi qui parle de son frère Hichem, tué à Bachdjarah, le 6 juin 1994. « Soudain, je sens mes jambes devenir lourdes, je mets un temps fou pour aller de la voiture à l’entrée de notre immeuble. Mon cœur se serre, je n’arrive plus à monter les escaliers. Je viens de grimper un étage lorsque des coups de feu éclatent. On vient de tirer sur mon frère, je le sais. Comment et pourquoi cette certitude ? Je n’en ai pas la moindre idée, je comprends simplement que quelque chose de grave vient de lui arriver », se souvient Asma Guenifi.

Le cycle infernal des violences multiples qui a frappé l’Algérie a laissé des traces indélébiles dans l’âme de tous ceux qui vu l’horreur de la bêtise humaine, la folie et le désarroi. Le témoignage d’Asma Guenifi vaut son pesant d’or pour paraphraser l’un des plus grands poètes d’Afrique du Nord, l’incorruptible père de Nedjma, Kateb Yacine. « Et quand la nostalgie m’envahit, j’écoute cheb Hasni, mon chanteur préféré assassiné par les ennemis des chants d’amour », écrit Asma Guenifi. Mais l’amour est toujours plus fort. Mais l’amour est invincible. Seul l’amour sait cheminer avec l’éternité.



* « Je ne pardonne pas aux assassins de mon frère », d’Asma Guenifi. Éditions Riveneuve, 216 pages.


http://www.tsa-algerie.com/culture-et-media/le-souvenir-amer-de-la-disparition-tragique-d-un-frere_16387.html
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« Je ne pardonne pas aux assassins de mon frère » * d’Asma Guenifi Empty Re: « Je ne pardonne pas aux assassins de mon frère » * d’Asma Guenifi

Message  Zhafit Mar 5 Juil - 23:45

«Je ne pardonne pas aux assassins de mon frère»*
Témoignage sur la décennie noire





Dans ce témoignage écrit sobrement et avec une extrême pudeur, sans manifestation excessive de quelque sentiment que ce soit, Asma
Guénifi montre combien, près de vingt ans après la tragédie qui a frappé les siens et de très nombreuses familles algériennes, qu’il est encore difficile de parler de pardon, et encore moins d’oubli.



Paris.
De notre correspondante


A la faveur d’une rencontre de présentation de son livre témoignage sur l’assassinat de son frère Hichem, réunissant ses proches, parents et amis, Asma Guénifi est revenue sur une période ô combien douloureuse pour nombre d’entre nous, la décennie noire 1990-2000.
Cette rencontre, Asma la voulait intime, réunissant ceux qui ont vécu dans leur chair et ceux qui ont été là dans les moments difficiles pour les soutenir, partageant leur peine et leurs convictions, leur lutte contre l’intégrisme islamiste, avec lesquels des liens ont été tissés par l’amitié et la tragédie.
«Ce livre est écrit dans ma tête depuis longtemps, je rendais hommage à nos chers disparus, à chaque date anniversaire de leur assassinat, c’était devenu un rituel», dit Asma, extrêmement émue. Ce livre modeste est un peu un deuil, depuis 17 ans je voulais quelque chose.» Asma explique que la première raison de ce livre témoignage tient à un livre dont l’auteur a rapporté des faits inexacts sur son père, Nasserdine Guénifi, réalisateur, et militant de l’ex-PAGS, et sur son frère. La seconde raison, à la suite d’un problème de santé qu’elle a eu, Asma réalise qu’il était impérieux qu’elle transmette à ses trois enfants la mémoire de sa famille et l’histoire de leur oncle. C’est la seconde raison de son témoignage.


Les mots sortent difficilement de la bouche de la jeune femme, elle essaie de ne pas croiser le regard de sa mère, Zahira, qui s’est retirée, très digne, dans un coin de la salle mise à disposition par un des amis de la famille depuis que les
Guénifi ont été contraints de quitter la cité
Bachdjarah où ils menaient une vie paisible, selon Asma, et où son frère, son aîné de un an, a été abattu par un terroriste au pied de son immeuble, alors qu’il venait d’entrer dans sa vingtième année. Asma évoque Rabah Asselah, qui était son camarade à l’Ecole des beaux-arts, assassiné avec son père, Ahmed, qu’il voulait, vainement, protéger de l’arme meurtrière. Asma évoque la mémoire de cette «grande dame» qu’était Anissa Asselah, emportée tragiquement par la douleur de la perte de son fils unique «Bouba», qui avait, lui aussi, vingt ans. «A chaque date anniversaire, Anissa Asselah m’appelait pour un rappel à l’ordre à la mémoire : ‘‘tu n’as pas oublié’’», dit Asma. «Aujourd’hui 24 juin (jour de la rencontre autour de son livre, ndlr), c’est la date anniversaire de l’assassinat de Mohamed Réda et Lila Kheddar, frère et sœur de Chérifa


Kheddar, présidente et fondatrice de l’association Djazaïrouna ; mon frère Hichem a été assassiné le 6 juin», dit Asma. «La famille de Chérifa m’a rendu le sourire», poursuit-elle. Les Guénifi trouvent à leur arrivée en France (fin de l’été 1994), en l’association Aïda — créée par des Algériens de Paris et de sa région ou nouvellement arrivés d’Algérie —, un soutien précieux : «Grâce à cette association, on a été hébergés à la Maison des retraités à Saint-Denis pendant 4 ans, on était trois familles réfugiées.» De sa vie en France, c’est la période que retient le plus Asma. Il y a Monique, une collègue de sa mère au centre Beaubourg qui leur prête son appartement pendant son départ en vacances, «tout un mois». Il y a eu Simon Blumenthal, emporté par la maladie, qui s’était tant et tant dévoué pour soutenir les victimes du terrorisme et leurs familles avec l’association qu’il avait créée : Algérie ensemble. Sa veuve et sa fille étaient dans la salle.
En 1995, avec quelques camarades, Asma crée à Paris le groupe Hichem, qui sera actif jusqu’en 2002. Nazim Mekbel et Amal Fardeheb qui, avec d’autres enfants ou proches de victimes du terrorisme islamiste, ont créé Ajouad Algérie Mémoires pour que l’oubli n’enferme pas les victimes et leurs proches, sont là aussi. «Nazim Mekbel et Amal Fardhebeb font un travail très lourd et chargé», dit Asma. Mais ô combien nécessaire. En effet, «refuser ce travail de mémoire, qui est à la source de cette association et de la charte qui en émane, serait priver les générations futures des repères nécessaires à la construction de leur identité». C’est le credo de Ajouad Algérie Mémoires.


Le titre de son livre, qu’elle a du mal à prononcer, est «une réponse à la charte de réconciliation nationale», explique Asma. «Pardonner, c’est un cheminement. Nous réclamons tous justice et réparation.
La charte de réconciliation nationale nous interdit de parler de mémoire.» Asma se tourne vers la psychologue Latifa Belaroussi, et signale qu’elle «a fait un travail formidable avec les enfants de victimes du terrorisme.» Faisant référence au livre d’Asma Guénifi,
Latifa Bélaroussi, rappelant Georges Semprun qui disait : «L’écriture ou la vie», «le livre d’Asma Guénifi est pour perpétuer la vie, c’est l’écriture et la vie». Ceux qui ne veulent pas de l’oubli et de l’amnésie devront lire, s’ils en ont la possibilité — dans l’attente qu’il soit disponible en Algérie — ce récit qui participe au travail de mémoire et de reconnaissance de la décennie noire.


* Je ne pardonne pas aux assassins de mon frère par Asma Guénifi (Riveneuve éditions, juin 2011).

http://www.elwatan.com/hebdo/france/temoignage-sur-la-decennie-noire-04-07-2011-131245_155.php
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