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L’Algérie au péril de l’arabisation

2 participants

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L’Algérie au péril de l’arabisation Empty L’Algérie au péril de l’arabisation

Message  Azul Lun 24 Déc - 20:35



  1. L’Algérie au péril de l’arabisation

    L’assassinat du chanteur kabyle Matoub Lounès suivi de l’entrée en
    vigueur de la loi d’arabisation entraînent des émeutes en Kabylie, où
    les émeutiers visent avec violence tout ce qui symbolise la langue arabe
    et l’Etat. Cette rage destructrice est l’une
    des conséquences prévisibles de la politique d’arabisation menée par le
    pouvoir algérien depuis l’indépendance.





" Parti unique, langue unique, pensée unique, Charte unique. "

Slogan du FLN



La loi d’arabisation est le point d’orgue d’un véritable projet que
poursuivent les arabistes en Algérie, projet inspiré par le courant
baâthiste, lui-même inspiré par tout le courant nationaliste moderne,
principalement français, qui veut que la nation
soit obligatoirement unifiée autour d’une langue, celle de l’élite
gouvernante.




Langue de la légitimation



Parmi les éléments de légitimation de l’Etat au Maghreb, deux sont d’une
importance capitale : l’islam et la langue arabe, qui lui est associée.
Fondée en opposition constante au colonialisme français, la conception
nationale valorise les éléments qui s’opposent
terme à terme à l’histoire coloniale, pour bien marquer,
symboliquement, les ruptures et la revendication d’une identité propre,
là où la synthèse serait la démarche la plus féconde du point de vue de
l’histoire et de l’avenir.


Symboliquement donc, on oppose le français à l’arabe, et l’islam au
christianisme, puisque la France coloniale a occupé le pays en affirmant
tantôt y apporter sa civilisation nationale, tantôt sa religion
nationale. Le hic est que l’Algérie est un produit complexe
de l’histoire, qui ne se réduit pas à la langue arabe, encore moins à
celle du Coran, ni à l’islam. Le pays a un fond berbère qui atteste de
sa pluralité, et pas seulement au plan linguistique. Les Berbères, qui
ont fait la guerre à la France, ont une démarche
pragmatique et ne souhaitent pas compromettre l’avenir dans des
aventures idéologiques, surtout quand elles ne sont pas en résonance
avec leur patrimoine historique, qui est toujours nié.


C’est pourquoi ils résistent à délivrer un certificat de légitimité à un
Etat qui leur paraît encore étranger à la société, même s’il est le
produit de leurs luttes anticoloniales. Il tiennent certes à l’unité
nationale, à leur façon, mais n’hésitent pas à
en contester les fondements tels que le pouvoir les énonce : l’Algérie
arabe et musulmane.


Pour légitimer ses choix, l’élite dirigeante veut leur donner un air
d’intérêt général. Ce faisant, elle semble donner raison à Marx, qui
écrit dans l’Idéologie allemande : " Chaque nouvelle classe qui prend la
place de celle qui dominait avant elle est obligée,
ne fût-ce que pour son intérêt comme pour l’intérêt commun de tous les
membres de la société, ou pour exprimer les choses sur le plan des idées
: cette classe est obligée de donner à ses pensées la forme de
l’universalité, de les représenter comme étant les
seules raisonnables, les seules universellement valables. "



Langue du pouvoir et intégrisme linguistique



L’arabe classique, lu, mais pas parlé au quotidien en vérité, par une
petite fraction de lettrés (10% environ), est une langue de l’élite.
Cette conscience d’être une caste gouvernante est par exemple bien
exprimée par Ibn Badis, le chef des oulémas, qui écrit
: " Le langage utilisé par les "langues" au marché, sur les chemins et
tous autres lieux populaires fréquentés par la masse ne peut être
confondu avec le langage des plumes et du papier, des cahiers et des
études, bref, d’une élite. " (Ibla, n° 128, 1971).
Dès l’abord donc, on voit que la différenciation entre les langues de
la khassa (l’élite) et de la ‘amma (la masse) est justifiée. De là le
mépris des langues maternelles, de là le mépris des langues populaires,
l’arabe parlé et le berbère. Mais, pour le berbère,
le mépris cache, derrière l’animosité, une crainte de l’irrédentisme
kabyle. En Tunisie, pour désigner la langue arabe populaire on l’appelle
barbri, le " berbère ", ce qui veut tout dire. Même là où cette langue
ne s’exprime pas, on la convoque à la table
du mépris.

Cela donne des situations cocasses et absurdes. Des hommes politiques,
de culture ou ayant une vie publique, qui s’expriment très mal en arabe
classique, baragouinent et cherchent désespérément leurs mots classiques
à la télévision au lieu de parler la langue
du peuple auquel ils s’adressent pourtant. Si eux, qui sont instruits
et cultivés, ne peuvent ainsi s’exprimer aisément en classique, on peut
imaginer la réception du côté du public. La langue est un instrument de
pouvoir, Orwell l’avait bien vu, qui a imaginé
un monde, celui de 1984, où l’on imposerait la Novlangue, à l’exclusion
de toute autre langue. Et imposer une langue, ce n’est pas simplement
imposer un outil au détriment d’un autre, comme dans une opération
technique. Plus profondément, une langue est une
pensée, et sa disparition signifie celle d’une pensée alternative à
celle qui s’impose. C’est ce que dit précisément Orwell quand il
explique, dans les principes de la Novlangue, ceci : " Le but de la
Novlangue était non seulement de fournir un mode d’expression
aux idées générales et aux habitudes mentales des dévots de l’Angsoc,
mais de rendre impossible tout autre mode de pensée. " C’est aussi ce
que, dans sa naïveté, le FLN a exprimé dans une banderole affichée à
Alger, au balcon du siège du parti, place Emir-Abdelkader,
en réponse aux revendications berbères : " Parti unique, langue unique,
pensée unique, Charte unique. "



Arabiser, c’est assimiler



Le but de l’arabisation n’a jamais été en vérité le partage d’une langue
vernaculaire, comme on le croit chez les esprits les plus naïfs. Très
tôt, le ministre Taleb Al-Ibrahimi, un arabo-islamiste, qui représente
le courant des oulémas (1) au pouvoir en Algérie,
reconnaissait lui-même que l’arabisation ne marcherait pas, mais qu’il
fallait la faire. Mostefa Lacheraf ne manquera pas de le lui rappeler,
lorsqu’il sera chargé de l’Education nationale au cours d’une polémique.
Pour Mouloud Kassim, l’inamovible ministre
des Affaires religieuses sous Boumédiène, il s’agissait, dès 1962, "
non d’une arabisation linguistique ", selon ses propres termes, mais "
d’arabiser les esprits et les cœurs ". Bref, on demande un ralliement
corps et âme aux Berbères, et non le partage d’un
espace de parole et de culture. Tout cela au nom d’un racisme qui
n’avoue pas son nom, mais considère la berbérité comme un résidu des
temps anciens, qu’il faudra assimiler. Le but profond de l’arabisme est
l’avènement de l’homme nouveau. Cette prétention,
qui était auparavant celle de la religion islamique, est maintenant
portée aussi par l’arabisme, une idéologie nationaliste, qui s’est
nourrie de la pensée fasciste dans son enfance. C’était par exemple le
but de la tentative d’arabisation de l’état civil
qui visait à interdire l’usage de prénoms berbères dans les années 70.
Le cheikh Bachir Al-Ibrahimi voulant plaider pour l’unité arabo-berbère
qu’aurait réalisée l’islam explique, dans El-Bassair (no 41), le journal
des oulémas, que les Berbères se sont fraternellement
soumis aux Arabes, et depuis sont frères. Il ne dit même pas qu’ils se
sont soumis à l’islam, non c’est aux Arabes, et de plus fraternellement.
C’est une telle fraternité qui fait croire peut-être qu’ils seront
éternellement soumis. Tout est bon pour les assimiler,
la trique, l’islam, la promesse ou la menace, c’est selon.



Bref retour sur le panarabisme



A entendre les arabistes et les islamistes algériens aujourd’hui, tout
le mal viendrait d’un complot de la France, qui soutiendrait, en
Algérie, un projet de république laïque et berbère, les Kabyles jouant
le rôle de Cheval de Troie dans cette affaire. Cette
aversion déclarée de l’Occident, à travers le cas de la France, n’était
pas exprimée par les pères de l’arabisme que furent Sati‘ al-Husri
(mort au Caire en 1963) ou Michel Aflak (1910-1989), fondateur du parti
Baath. Husri considérait même comme un bienfait
de favoriser l’influence des nationalismes européens sur le monde
arabe. Les imitant, il propose, dans une démarche laïque, de fonder le
nationalisme arabe sur la langue " commune " et non sur l’islam. En
réalité le mot commune est un euphémisme, qui cache
mal la volonté d’imposer la langue du pouvoir de gré ou de force.

L’arabisme veut tailler un même costume à chacun, exactement comme l’a
fait le maoïsme, et il propose à la société un idéal de caserne, où la
discipline et l’uniforme seront les bases de la nation arabe. Ainsi,
dans les années 30 et 40, le parti Jeune Egypte,
dans lequel se forma Nasser, avait l’habitude de défiler en chemises
vertes, en singeant les partis fascistes. Un mouvement putschiste
irakien se développe en Irak sous la direction de Rachid Ali Kilani, qui
s’allie aux nazis, en 1941. Anouar Al-Sadate lui-même
était lié aux actions en faveur des nazis à cette période. Il déclarera
dans les années 60 publiquement son admiration pour Hitler. On peut
citer également les organisations syrienne et libanaise de Antoun Saadé
ou de Pierre Gemayel, les Kataeb (Phalanges).
Il n’est jusqu'au mufti de Jérusalem Husseini qui chercha des armes du
côté des nazis et des Italiens sous Mussolini. Tout cela inquiéta
l’élite laïque et progressiste orientale, comme Loutfi Al-Sayyid ou les
écrivains Taha Hussein, Neguib Mahfouz et Toufik
Al-Hakim, qui se prononceront pour le pluralisme et la laïcité. Toufik
Al-Hakim dénoncera même en 1963 un danger de nazification dans son pays.
Dès l’abord donc, la pensée panarabiste est fondée sur une conception
autoritariste et même fasciste. On comprend
mieux pourquoi on peut avoir des Nasser, Hafed Al-Assad, Saddam Hussein
ou Boumédiène.



Un pouvoir arrogant



Rien n’est devenu plus étranger à la société algérienne que le pouvoir
algérien. Devant les révoltes qui ont secoué l’Algérie, ce pouvoir a été
littéralement surpris, et pour cause, il ne connaît pas bien la société
qu’il prétend gouverner.


Si on avait voulu dire aux Kabyles qu’ils n’étaient pas concernés par la
fête de l’Indépendance, on n’aurait pas mieux fait que de choisir la
date du 5 juillet pour appliquer la loi d’arabisation. Désormais, cette
date se confondra avec l’entreprise de négation
de leur culture et de leur langue et ils seront tenus en marge de la
République des képis et des bottes jusqu’à ce qu’un jour leur
insurrection aboutisse à une République égalitaire et sociale. En effet,
l’aspiration égalitariste est très répandue au Maghreb
et ne cesse d’inspirer tous les mouvements de contestation.

Du côté du pouvoir, au silence a succédé l’intimidation, puis les
promesses démagogiques, pour à nouveau avoir recours aux intimidations.
Le général Khaled Nezzar, qui a surtout à son actif un lourd passé de
dictateur de l’ombre, vient expliquer avec arrogance
dans la presse, à propos des actions du FFS et du RCD : " Ils
exacerbent les sentiments d’une minorité de notre société afin de cibler
des buts à caractère "politicien" tant ils sont aveuglés par le
pouvoir. " Que le FFS et le RCD soient critiquables, personne
n’en disconviendra, comme tous les partis, mais qu’un général à la
retraite vienne nous expliquer encore son mépris de la minorité (on ne
voit pas pourquoi il aurait souligné la chose autrement) et accuse les
partis de l’opposition d’être aveuglés par la soif
de pouvoir, il y aurait de quoi rire si la situation n’était tragique.
La seule minorité au pays et les seuls aveuglés par le pouvoir sont les
généraux, qui de plus gouvernent toujours dans l’ombre et ont recours à
des hommes de mains contre leurs adversaires,
comme contre Boudiaf, qu’ils ont assassiné, comme des lâches qu’ils
sont. C’est un fléau dont l’Algérie cherche désespérément à se
débarrasser. Elle y arrivera un jour, il n’y a aucune raison qu’il en
soit autrement. Ils iront alors rejoindre la cohorte des
généraux mis à la poubelle durant ce siècle. n

Dossier réalisé par Mustapha Hadjarab

1-Lettrés de l’islam dont la principale figure en Algérie est le
cheihk Ibn Badis, fondateur de l’association des oulémas à Constantine
en 1926.
Azul
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L’Algérie au péril de l’arabisation Empty Re: L’Algérie au péril de l’arabisation

Message  Mohouch Mar 25 Déc - 16:17

L'arabe en tant que langue ne sera jamais aimé comme langue tant il est attaché à l'islam.
Nous savons qu'il y a des arabes chrétiens qui disent la messe en arabe mais pour nous l'arabe c'est la langue de la secte mahométane.
Mohouch
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