TORTURES ET SUPPLICES
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TORTURES ET SUPPLICES
TORTURES ET SUPPLICES
Combien d’aveux sont arrachés sous d’atroces supplices ? Combien de victimes algériennes soumises à la question sont mortes sous la torture ? Combien d’Algériens souffrent de traumatismes et d’infirmités suite aux multiples sévices subis ? On se sent froid dans le dos devant toutes ces inventions de souffrances, devant tous ces instruments de torture avec lesquels l’homme martyrisa l’homme.
Le camp de concentration de Cap-Aokas fut créé par les forces coloniales en juillet 1956. Le choix de son emplacement dans la ferme du colon Tourneux fut déterminé par la présence d’une trentaine de grandes et profondes amphores au col étroit où l’on enfermait les vins.
Ces grands récipients cylindriques désaffectés, munis d’un système de fermeture hermétique décourageant toute tentative d’évasion, furent utilisés comme cellules pénitentiaires. Des condamnés transférés de toute la région dans ce camp de la dernière heure étaient mutilés et défigurés avant d’être jetés dans ces oubliettes jusqu’à ce que mort s’ensuivît.
La chambre des tortures était une vaste construction close, genre entrepôt, dont les poutres apparentes du plafond soutenaient une poulie portant une corde servant à hisser des fardeaux au-dessus d’un bassin avant de les plonger dans le liquide noirâtre ; ces fardeaux étaient en l’occurrence des prisonniers ficelés comme des paquets de linge.
A proximité du réservoir d’eau, en vue d’un usage barbare, fut montée une installation produisant de violentes décharges électriques. Ces électrocutions provoquaient des pertes de connaissance brutales, des convulsions, des brûlures au point de contact ou, quelquefois, (heureuses délivrances !) des morts instantanées.
Ikhlef Youcef, se souvient de son passage dans ces lieux effroyablement redoutables.
Nous sommes au mois de décembre 1957. Il est seize heures. Ikhlef Youcef et son oncle ferment le restaurant familial et s’apprêtent à rentrer chez eux, au lieudit Taramannt. Ils cheminent tranquillement pendant quelques minutes quand ils entendent derrière eux le ronflement caractéristique d’une jeep. En reconnaissant l’implacable lieutenant Marcial, la peur saisit le cœur des deux Algériens. L’officier appuie sur l’accélérateur et immobilise le véhicule au niveau des deux hommes. Et sans préambule, il leur intime l’ordre de monter dans l’automobile.
Dans le camp de concentration, les deux parents sont séparés. Assis sur une chaise devant le lieutenant Marcial et l’adjudant Lagali, Youcef subit un interrogatoire en règle. L’officier qui nourrit une haine viscérale contre les jeunes qu’il considère tous comme de potentiels maquisards, use de ses poings pour faire parler Youcef.
« Alors, aboie-t-il, quels sont les noms des fellagas que tu connais ! »
« Je ne connais personne » répond invariablement le jeune captif d’une voix sourde.
« Hé bien, tu vas pourrir dans le cachot comme les autres ! » beugle encore Marcial.
Lorsqu’on verrouille derrière le prisonnier la porte en fonte de l’amphore, et qu’il se retrouve seul dans le noir le plus complet, des pensées horribles l’assaillent aussitôt. Et si Marcial mettait à exécution ses menaces et qu’il le laissait croupir dans ce trou ? Une détresse accablante l’envahit, une sensation affreuse de solitude et d’impuissance. Peut-être est-ce réellement la fin ? A cette idée, le visage de la mère de Youcef vient occuper son esprit. A cette heure, elle doit être rongée d’inquiétude. Mais un moment après, sentant du fond de son être monter une force mystérieuse, il s’entendit murmurer comme dans un rêve :
« Allez, il faut tenir le coup ! Ne pas s’abandonner au découragement. Dieu est grand. »
D’un moment à l’autre, jour et nuit, des cris déchirants parviennent aux oreilles de Youcef. Des prisonniers sont en proie aux affres de la torture. Ces hurlements de terreur et de souffrances font terriblement accroître le désespoir et l’angoisse des autres détenus. Même les bergers évitent de faire paître leurs troupeaux aux environs du camp de la mort pour ne pas entendre ces cris d’effroi.
Deux semaines plus tard, Youcef entend les pas réguliers des soldats venus le chercher pour un nouvel interrogatoire. En sortant de sa cellule, il met instinctivement les mains devant ses yeux aveuglés par la lumière éclatante du jour.
Dans la salle des tortures, on commande au prisonnier de se déshabiller et de s’asseoir sur une chaise. Aussitôt, les questions tonitruantes fusent :
« Qui collecte les fonds pour les fellagas ? Quelle maison accueille les maquisards ? Comment s’appelle le chef des terroristes ? »
Et la réponse, toujours la même, sort de la bouche de Youcef :
« Je ne sais pas, je ne sais pas. »
L’Adjudant Lagali, connu pour son indulgence, et parlant couramment le Kabyle, s’adresse à Youcef :
« Écoute mon petit, il vaut mieux nous donner les noms des fellagas. De toute façon tu ne peux pas leur nuire puisqu’ils sont déjà dans le maquis. Et toi, tu pourras enfin rentrer chez toi sain et sauf. »
Silence.
Tout à coup, les bourreaux se ruent sur la victime pour l’attacher. D’abord, ils engagent un solide bâton sous les genoux, puis ils lient les poignets et les avant-bras de part et d’autre de la trique, si bien que tout le corps s’en trouve plié en deux. L’une des deux extrémités de la corde qui pend d’une poulie est ensuite fixée entre les jambes, au milieu de la tige en bois. En tirant sur l’autre bout de la corde, la masse humaine est extirpée de la chaise puis, la tête en bas, elle est hissée par à coups comme un ballot jusqu’au dessus du bassin rempli d’eau savonneuse, sale et salée. Alors, la torture par immersion peut commencer.
Le corps est plongé brutalement dans le liquide poisseux. En apnée, le prisonnier éprouve une sensation terrible d’étouffement ; il est au bord de l’asphyxie. Il a l’impression que tout son corps est sur le point d’exploser. Ne tenant plus, il tente de respirer ; aussitôt, le liquide s’engouffre à flots dans ses poumons. Mais au moment où la mort par noyade semble irrémédiable, il est retiré de l’eau. Il émerge brusquement la bouche grande ouverte et avale d’un coup une grande quantité d’oxygène jusqu’à l’étourdissement.
Suspendu dans le vide, l’eau dégoulinant de son corps, la victime continue à être pressée de questions. Si la réponse tarde à venir ou ne satisfait pas le tortionnaire, le mauvais traitement est répété en conséquence jusqu’à arracher des aveux complets ; ceux-ci sont parfois inventés de toutes pièces par la victime pour que cesse son pénible et long calvaire.
Huit jours après, Youcef est transféré de sa cellule vers le camp de toile où sont regroupés les prisonniers près d’être relâchés. La tête hirsute, les yeux plissés devant l’éclat de la lumière du soleil, il est accueilli par les autres détenus qui sont touchés par la maigreur et la mauvaise mine de leur compatriote. Au milieu des tentes, il retrouve son oncle qu’il s’empresse d’embrasser comme s’il représentait le retour de la mort à la vie. Celui-ci fronce les sourcils devant le jeune homme avant de l’interroger :
« Qui es-tu mon fils ? »
La gorge nouée, Youcef peine à dévoiler son identité au frère de son père qui ne l’a pas reconnu.
« C’est moi, Youcef, ton neveu. »
Combien d’aveux sont arrachés sous d’atroces supplices ? Combien de victimes algériennes soumises à la question sont mortes sous la torture ? Combien d’Algériens souffrent de traumatismes et d’infirmités suite aux multiples sévices subis ? On se sent froid dans le dos devant toutes ces inventions de souffrances, devant tous ces instruments de torture avec lesquels l’homme martyrisa l’homme.
Le camp de concentration de Cap-Aokas fut créé par les forces coloniales en juillet 1956. Le choix de son emplacement dans la ferme du colon Tourneux fut déterminé par la présence d’une trentaine de grandes et profondes amphores au col étroit où l’on enfermait les vins.
Ces grands récipients cylindriques désaffectés, munis d’un système de fermeture hermétique décourageant toute tentative d’évasion, furent utilisés comme cellules pénitentiaires. Des condamnés transférés de toute la région dans ce camp de la dernière heure étaient mutilés et défigurés avant d’être jetés dans ces oubliettes jusqu’à ce que mort s’ensuivît.
La chambre des tortures était une vaste construction close, genre entrepôt, dont les poutres apparentes du plafond soutenaient une poulie portant une corde servant à hisser des fardeaux au-dessus d’un bassin avant de les plonger dans le liquide noirâtre ; ces fardeaux étaient en l’occurrence des prisonniers ficelés comme des paquets de linge.
A proximité du réservoir d’eau, en vue d’un usage barbare, fut montée une installation produisant de violentes décharges électriques. Ces électrocutions provoquaient des pertes de connaissance brutales, des convulsions, des brûlures au point de contact ou, quelquefois, (heureuses délivrances !) des morts instantanées.
Ikhlef Youcef, se souvient de son passage dans ces lieux effroyablement redoutables.
Nous sommes au mois de décembre 1957. Il est seize heures. Ikhlef Youcef et son oncle ferment le restaurant familial et s’apprêtent à rentrer chez eux, au lieudit Taramannt. Ils cheminent tranquillement pendant quelques minutes quand ils entendent derrière eux le ronflement caractéristique d’une jeep. En reconnaissant l’implacable lieutenant Marcial, la peur saisit le cœur des deux Algériens. L’officier appuie sur l’accélérateur et immobilise le véhicule au niveau des deux hommes. Et sans préambule, il leur intime l’ordre de monter dans l’automobile.
Dans le camp de concentration, les deux parents sont séparés. Assis sur une chaise devant le lieutenant Marcial et l’adjudant Lagali, Youcef subit un interrogatoire en règle. L’officier qui nourrit une haine viscérale contre les jeunes qu’il considère tous comme de potentiels maquisards, use de ses poings pour faire parler Youcef.
« Alors, aboie-t-il, quels sont les noms des fellagas que tu connais ! »
« Je ne connais personne » répond invariablement le jeune captif d’une voix sourde.
« Hé bien, tu vas pourrir dans le cachot comme les autres ! » beugle encore Marcial.
Lorsqu’on verrouille derrière le prisonnier la porte en fonte de l’amphore, et qu’il se retrouve seul dans le noir le plus complet, des pensées horribles l’assaillent aussitôt. Et si Marcial mettait à exécution ses menaces et qu’il le laissait croupir dans ce trou ? Une détresse accablante l’envahit, une sensation affreuse de solitude et d’impuissance. Peut-être est-ce réellement la fin ? A cette idée, le visage de la mère de Youcef vient occuper son esprit. A cette heure, elle doit être rongée d’inquiétude. Mais un moment après, sentant du fond de son être monter une force mystérieuse, il s’entendit murmurer comme dans un rêve :
« Allez, il faut tenir le coup ! Ne pas s’abandonner au découragement. Dieu est grand. »
D’un moment à l’autre, jour et nuit, des cris déchirants parviennent aux oreilles de Youcef. Des prisonniers sont en proie aux affres de la torture. Ces hurlements de terreur et de souffrances font terriblement accroître le désespoir et l’angoisse des autres détenus. Même les bergers évitent de faire paître leurs troupeaux aux environs du camp de la mort pour ne pas entendre ces cris d’effroi.
Deux semaines plus tard, Youcef entend les pas réguliers des soldats venus le chercher pour un nouvel interrogatoire. En sortant de sa cellule, il met instinctivement les mains devant ses yeux aveuglés par la lumière éclatante du jour.
Dans la salle des tortures, on commande au prisonnier de se déshabiller et de s’asseoir sur une chaise. Aussitôt, les questions tonitruantes fusent :
« Qui collecte les fonds pour les fellagas ? Quelle maison accueille les maquisards ? Comment s’appelle le chef des terroristes ? »
Et la réponse, toujours la même, sort de la bouche de Youcef :
« Je ne sais pas, je ne sais pas. »
L’Adjudant Lagali, connu pour son indulgence, et parlant couramment le Kabyle, s’adresse à Youcef :
« Écoute mon petit, il vaut mieux nous donner les noms des fellagas. De toute façon tu ne peux pas leur nuire puisqu’ils sont déjà dans le maquis. Et toi, tu pourras enfin rentrer chez toi sain et sauf. »
Silence.
Tout à coup, les bourreaux se ruent sur la victime pour l’attacher. D’abord, ils engagent un solide bâton sous les genoux, puis ils lient les poignets et les avant-bras de part et d’autre de la trique, si bien que tout le corps s’en trouve plié en deux. L’une des deux extrémités de la corde qui pend d’une poulie est ensuite fixée entre les jambes, au milieu de la tige en bois. En tirant sur l’autre bout de la corde, la masse humaine est extirpée de la chaise puis, la tête en bas, elle est hissée par à coups comme un ballot jusqu’au dessus du bassin rempli d’eau savonneuse, sale et salée. Alors, la torture par immersion peut commencer.
Le corps est plongé brutalement dans le liquide poisseux. En apnée, le prisonnier éprouve une sensation terrible d’étouffement ; il est au bord de l’asphyxie. Il a l’impression que tout son corps est sur le point d’exploser. Ne tenant plus, il tente de respirer ; aussitôt, le liquide s’engouffre à flots dans ses poumons. Mais au moment où la mort par noyade semble irrémédiable, il est retiré de l’eau. Il émerge brusquement la bouche grande ouverte et avale d’un coup une grande quantité d’oxygène jusqu’à l’étourdissement.
Suspendu dans le vide, l’eau dégoulinant de son corps, la victime continue à être pressée de questions. Si la réponse tarde à venir ou ne satisfait pas le tortionnaire, le mauvais traitement est répété en conséquence jusqu’à arracher des aveux complets ; ceux-ci sont parfois inventés de toutes pièces par la victime pour que cesse son pénible et long calvaire.
Huit jours après, Youcef est transféré de sa cellule vers le camp de toile où sont regroupés les prisonniers près d’être relâchés. La tête hirsute, les yeux plissés devant l’éclat de la lumière du soleil, il est accueilli par les autres détenus qui sont touchés par la maigreur et la mauvaise mine de leur compatriote. Au milieu des tentes, il retrouve son oncle qu’il s’empresse d’embrasser comme s’il représentait le retour de la mort à la vie. Celui-ci fronce les sourcils devant le jeune homme avant de l’interroger :
« Qui es-tu mon fils ? »
La gorge nouée, Youcef peine à dévoiler son identité au frère de son père qui ne l’a pas reconnu.
« C’est moi, Youcef, ton neveu. »
laic-aokas- Nombre de messages : 14034
Date d'inscription : 03/06/2011
Re: TORTURES ET SUPPLICES
pardon monsieur ikhlef , je présente ce pardon au nom de ma génération défaillante ,au nom de ma génération ingrate et horriblement indigne de cet aokas ,de la grandeur de votre combat ,pour libérer aokas .
je vous présente mes excuses au nom de ma génération qui immigre au canada pour insulter de làbas chez ,de làbas chez leur ancétres ,aokas .
je vous présente mes excuses au nom de ma génération qui immigre au canada pour insulter de làbas chez ,de làbas chez leur ancétres ,aokas .
Re: TORTURES ET SUPPLICES
je t'invite à lire le livre
laic-aokas- Nombre de messages : 14034
Date d'inscription : 03/06/2011
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